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Le parquet

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La loi attribue trois missions principales au procureur de la République en matière d’état civil : assurer une surveillance générale des registres de l’état civil, traiter les anomalies signalées par l’officier de l’état civil et donner les instructions nécessaires pour qu’il soit procédé à la rectification des actes.


A. LA SURVEILLANCE GÉNÉRALE DES REGISTRES D’ÉTAT CIVIL

[Code civil, article 53 ; ordonnance du 26 novembre 1823 modifiée, article 1er ; décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifié, articles 1 et 4]
Le procureur de la République exerce une surveillance générale sur les registres de l’état civil. A cette fin, l’article 1er du décret de 1962 prévoit que les registres de l’état civil de chaque commune doivent être établis en double exemplaire par l’officier d’état civil. Il appartient à ce dernier, à la fin de chaque année civile, de les clôturer et de déposer l’un des exemplaires au greffe du tribunal de grande instance afin de permettre au procureur de la République de procéder à leur vérification (1). A l’issue de celle-ci, le procureur de la République fait connaître, le cas échéant, aux officiers d’état civil les irrégularités qui ont pu être constatées et ordonne de procéder aux rectifications nécessaires. Il s’agit là d’éviter que les officiers de l’état civil reproduisent les mêmes erreurs. Ce contrôle du parquet sur les actes de l’état civil est une garantie supplémentaire apportée aux personnes sur la fiabilité des informations figurant dans les actes de l’état civil et la régularité des actes eux-mêmes.


B. LE TRAITEMENT DES ANOMALIES SIGNALÉES PAR L’OFFICIER D’ÉTAT CIVIL

L’officier de l’état civil peut solliciter le procureur de la République à un double titre lorsqu’il constate une anomalie : en matière de prénom et en matière de mariage.


I. L’intervention du parquet en matière de prénom

[Code civil, articles 57 et 357]
Les nom et prénoms attribués à toute personne physique permettent de la distinguer au sein de sa propre parenté et des autres personnes qui composent la société. Or, il peut apparaître lors de la déclaration de naissance d’un enfant à l’état civil que le ou les prénoms choisis par ses parents, lorsqu’ils sont associés aux autres prénoms ou au nom de famille de l’enfant, apparaissent contraires à son intérêt, ou au droit des tiers à voir leur nom de famille protégé. L’appréciation est nécessairement subjective et peut donner lieu à des divergences d’appréciation entre l’officier de l’état civil et les parents de l’enfant. Ce n’est pas cette divergence qui fonde, à elle seule, la saisine du procureur de la République, mais, par exemple, le caractère ridicule ou ostentatoire d’un prénom associé à un nom. Les réticences d’un officier de l’état civil au prénom de Mégane associé au nom de famille de Renaud ont peu de chances d’emporter la conviction du tribunal en faveur d’un changement de prénom, compte tenu de la jurisprudence existante et de la liberté de choix reconnue aux parents depuis 1993. En revanche, l’attribution du prénom Titeuf (2) a été jugée contraire à l’intérêt de l’enfant compte tenu des caractères du personnage (maladroit, naïf) et des risques de moquerie subis par l’enfant.
Lorsque l’officier de l’état civil estime que le prénom choisi est contraire à l’intérêt de l’enfant, il en avise immédiatement le procureur de la République. Celui-ci peut alors saisir le juge aux affaires familiales, lequel peut décider de supprimer le prénom des registres de l’état civil et d’attribuer, le cas échéant, un autre prénom à l’enfant.


II. L’intervention du parquet en matière de mariage

L’intervention du ministère public en matière de mariage est multiple, qu’il s’agisse d’accorder une dispense en vue de sa célébration ou d’autoriser qu’il soit célébré dans des circonstances exceptionnelles, de former opposition au mariage ou d’assurer la transcription des mariages qui ont été célébrés à l’étranger.

a. L’octroi d’une autorisation spéciale ou d’une dispense

[Code civil, article 169]
S’agissant des dispenses accordées par le procureur de la République, elles visent de fait à simplifier les démarches en vue de la célébration du mariage. Ainsi en est-il de la dispense accordée par ce dernier à de futurs époux d’accomplir la publication des bans en mairie, ou de respecter le délai légal d’affichage public.

b. L’autorisation de célébrer le mariage dans des circonstances exceptionnelles

[Code civil, articles 75, alinéa 2, et 169 ; IGREC n° 393]
L’intervention du procureur de la République est encore nécessaire pour autoriser la célébration du mariage en un lieu spécifique (la résidence ou le domicile de l’un des époux, l’hôpital, la maison de retraite, etc.), compte tenu de circonstances graves et exceptionnelles : la maladie, l’infirmité (3). La personne qui souhaite se marier et qui est confrontée à de telles circonstances doit donc vérifier au préalable si elle peut saisir le procureur de la République, et pour quelle finalité : obtenir une autorisation ou une dispense avant d’apporter les arguments qui emporteront la conviction du procureur de la République. La personne gravement malade et infirme, accueillie dans un établissement social ou médico-social et dont l’espérance de vie est comptée, peut à la fois solliciter l’autorisation de se marier en dehors de la mairie et être dispensée de la publication des bans.

c. L’opposition au mariage

[Code civil, articles 175-1 et 175-2]
Lorsque l’officier d’état civil a des doutes sur les intentions réelles des futurs époux de contracter le mariage et d’en accepter les effets prévus par la loi, il doit en informer le procureur de la République. En effet, le choix du mariage peut être motivé par des raisons autres que celles d’établir une union matrimoniale. Tel serait le cas si l’unique objectif poursuivi était, en se mariant, d’obtenir la nationalité française. Le procureur pourra alors intervenir à titre préventif, par la voie de l’opposition, chaque fois que la situation des futurs époux lui permettrait d’invoquer la nullité du mariage si celui-ci était célébré. Il en est ainsi si l’un des époux est déjà engagé dans les liens d’un mariage non dissous (4) (cf. infra, section 3, § 2, B, I, b, 2). Le procureur de la République dispose alors d’un délai de 15 jours pour faire opposition au mariage ou se prononcer en faveur d’un sursis à sa célébration. Un tel sursis ne peut excéder un mois renouvelable une fois par décision spécialement motivée.

d. La transcription du mariage célébré à l’étranger

[Code civil, articles 171-1 à 171-8 ; décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifié, article 7 ; décret n° 2007-773 du 10 mai 2007, articles 8 à 11, JO du 11-05-07 ; décret n° 2008-521 du 2 juin 2008, article 5 ; IGREC n° 507]
La célébration du mariage à l’étranger n’est pas à exclure, qu’elle concerne un couple de ressortissants français ou le mariage entre un ressortissant français et un conjoint d’une autre nationalité. De tels mariages donnent lieu à transcription de l’acte de mariage, en marge des actes de naissance des époux, du moins si un acte de naissance a été établi en France. Pour faciliter la publicité et l’utilisation en France des actes de l’état civil, concernant des Français, dressés à l’étranger dans les formes locales, la loi prévoit la possibilité de les transcrire sur les registres consulaires français. Le décret du 3 août 1962 règle cette matière dans son article 7, alinéa 1er : « Les actes de l’état civil dressés en pays étranger qui concernent des Français sont transcrits soit d’office, soit sur la demande des intéressés, sur les registres de l’état civil de l’année courante tenus par les agents diplomatiques ou les consuls territorialement compétents ». L’article 5, alinéa 2, du décret du 2 juin 2008 sur l’état civil consulaire prévoit que les officiers de l’état civil consulaire « transcrivent également sur ces registres les actes concernant les Français, établis par les autorités locales, lorsqu’ils sont conformes aux dispositions de l’article 47 du code civil et sous réserve qu’ils ne soient pas contraires à l’ordre public ». La transcription du mariage célébré à l’étranger est devenue obligatoire lorsqu’il concerne au moins un ressortissant français. L’article 171-5 du code civil dispose désormais que « pour être opposable aux tiers en France, le mariage d’un Français célébré par une autorité locale étrangère doit être transcrit sur les registres de l’état civil français. La procédure de transcription est déterminée par le décret du 10 mai 2007.
Le procureur de la République apprécie s’il y a possibilité ou non de transcrire un mariage célébré à l’étranger par un officier de l’état civil local (C. civ., art. 171-7). Il vérifie, par ailleurs, qu’il n’existe aucun indice sérieux qui pourrait rendre possible une hypothèse de nullité du mariage (pour absence de consentement, défaut de présence, existence d’un précédent mariage...). Bien que le code civil ne s’y réfère pas expressément, il faut admettre que l’hypothèse d’une fraude à la loi ou d’un mariage célébré sans comparution d’un époux ne permettrait pas de considérer un tel mariage comme valable... Dans de telles circonstances, le procureur de la République peut engager une action en nullité du mariage, en visant la cause précise.
En l’absence de transcription, le mariage d’un Français qui aurait été valablement célébré par une autorité étrangère produit ses effets en France, tant à l’égard des époux que de leurs enfants. La sanction retenue par la loi n’est donc pas la nullité mais l’inopposabilité. Le conjoint étranger d’un époux français qui demanderait que lui soit versé, si les conditions légales sont réunies, une pension de réversion ne pourrait se prévaloir de sa qualité d’époux à l’égard de la caisse de sécurité sociale concernée si le mariage n’est pas transcrit. Le texte précité ne prévoit pas dans de telles circonstances l’opposabilité du mariage non transcrit aux tiers, ce qui peut aussi soulever des difficultés en matière fiscale, car ils seraient alors traités comme des personnes célibataires.


C. L’INTERVENTION DU PARQUET EN MATIÈRE DE RECTIFICATION D’UN ACTE DE L’ÉTAT CIVIL

[Code civil, article 99]
L’établissement des actes de l’état civil peut être source d’erreur, ne serait-ce que sur le plan matériel lorsque le principal intéressé (la personne référencée dans l’acte ou ses ayants droit [héritiers]) constatent, que le nom ou un prénom ont été mal orthographiés, qu’il y a erreur sur le sexe de la personne ou sa profession. Il peut y avoir aussi omission matérielle. Tel est le cas, par exemple, si au moment où l’acte de mariage est rédigé, il n’est pas fait référence à l’existence d’un contrat de mariage conclu entre les époux.
La loi donne compétence au procureur de la République pour procéder à la rectification administrative des erreurs ou omissions purement matérielles d’un acte de l’état civil, par exemple redonner aux noms des parties (les époux) leur orthographe exacte. En effet, dès lors qu’un acte d’état civil est établi et signé par les parties, il ne peut plus être modifié par l’officier d’état civil. Il appartient donc au procureur de la République du lieu où l’acte a été dressé ou transcrit de donner toutes les instructions nécessaires aux dépositaires des registres, c’est-à-dire aux maires (et éventuellement les greffiers), pour que l’erreur constatée puisse être rectifiée. Le procureur de la République qui agit alors comme administrateur du service de l’état civil peut aussi être amené à intervenir d’office, parce qu’il aura été saisi d’une réclamation par la personne concernée ou ses ayants droit, ou parce qu’il aura été informé de la situation par un officier de l’état civil (sur la procédure suivie et les effets de la rectification administrative, cf. infra, chapitre 2, section 1, §  2, A).


(1)
L’autre exemplaire est déposé par l’officier de l’état civil aux archives de la commune.


(2)
Cass. civ. 1re, 15 février 2012, nos 10-27512 et 11-19963.


(3)
En effet, parce que la règle applicable de droit commun est la célébration d’un mariage en présence du public (C. civ., art. 165).


(4)
Il n’est pas possible de célébrer le mariage d’une personne déjà engagée dans les liens matrimoniaux. Le mariage d’un bigame est un mariage nul, et dans la mesure où le parquet peut en demander la nullité, il peut aussi former opposition à la célébration d’un tel mariage.

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