Recevoir la newsletter

La reconstitution administrative d’un acte d’état civil

Article réservé aux abonnés

La reconstitution d’un acte de l’état civil n’emprunte pas toujours la voie judiciaire. La défaillance constatée à la suite de la destruction ou de la perte de certains registres est susceptible de concerner plusieurs personnes. Dans de telles circonstances, la démarche administrative a été privilégiée. Il convient donc de préciser, d’une part, ce qui constitue les causes et les modalités de la reconstitution administrative avant de préciser, d’autre part, le rôle de la commission instituée à cet effet, et de s’intéresser enfin à l’intérêt d’obtenir un acte de notoriété dans l’attente de la décision de la commission.


A. LES CIRCONSTANCES DONNANT LIEU À RECONSTITUTION ADMINISTRATIVE

Les différents conflits dans lesquels la France a été engagée au cours de son Histoire ont eu des répercussions sur les registres de l’état civil alors existants, et qui ont été totalement ou partiellement détruits. Le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour déterminer les procédures à mettre en œuvre et ayant pour objectif de reconstruire, remplacer et reconstituer les actes et registres perdus ou détruits. Il s’agit donc d’une procédure spécifique qui ne s’inscrit pas dans un cadre judiciaire et qui ne donne pas lieu à contentieux. Les deux guerres mondiales ont contraint les législateurs (1) successifs à agir en ce sens assez rapidement, même si l’épisode de la Commune en donnait déjà une illustration à propos des registres de l’état civil de Paris, entièrement détruits (2). L’absence de contentieux ne signifie pas l’absence de difficultés concernant les opérations matérielles et juridiques de reconstitution des actes de l’état civil. La reconstitution des actes peut être réalisée d’après les extraits authentiques des actes dont les originaux ont été détruits, ou à partir des déclarations des personnes intéressées ou des témoignages fournis par les tiers. Les documents produits au soutien de cette démarche (comme le livret de famille) présentent, eux aussi, un certain intérêt, comme l’est également la possibilité de se prévaloir des tables de décès, à partir notamment des registres des hôpitaux ou des cimetières. La loi du 15 décembre 1923, relative à la reconstitution des actes et archives détruits dans les départements par suite des événements de guerre, définit aussi l’autorité compétente en charge d’une telle responsabilité. La reconstitution des registres est effectuée dans chaque arrondissement concerné et relève d’une commission administrative (art. 2). Quant au procureur de la République, il doit faire publier au Journal officiel, au recueil des actes administratifs de la préfecture et dans tous les journaux du département, une liste des registres à reconstituer. La publicité ainsi organisée a pour objectif d’inviter toute personne susceptible de détenir ou de recevoir un extrait authentique ou un livret de famille se rapportant à un acte à reconstituer, à le déposer à la mairie ou au greffe du tribunal d’instance ou de grande instance de son ressort territorial, ou encore à l’étranger auprès des ambassades et consulats compétents. Une telle démarche doit être effectuée dans les trois mois qui suivent la publication au Journal officiel de l’information donnée par le procureur de la République, ou dans le mois qui suit la date à laquelle l’extrait d’acte authentique ou le livret de famille parvient entre ses mains.


B. LE RÔLE DE LA COMMISSION DE RECONSTITUTION DES ACTES D’ÉTAT CIVIL

C’est à une commission administrative au sein des communes (3) qu’a été confiée la tâche de reconstituer administrativement les actes de l’état civil. Elle procède au rétablissement des actes, soit d’office, soit à la requête des intéressés et à ce titre fait diligenter les enquêtes et vérifications nécessaires. Lorsque la décision est prise de reconstituer un acte de l’état civil, elle est prise à la majorité des voix, et après avoir entendu un avis du rapporteur désigné pour chaque dossier.
Mais avant que la commission ne soit saisie, les maires des communes dont les registres ont été détruits doivent dresser la liste des personnes qui habitaient leur commune avant le sinistre ou les faits de guerre, en incluant si possible la résidence actuelle de ces personnes. C’est cette liste qui est transmise à la commission administrative. Seuls les noms des personnes pour lesquelles cette reconstitution doit être envisagée sont inscrits sur cette liste, à l’exclusion de tout autre. Toutes les personnes mentionnées sur cette liste sont tenues d’effectuer à la mairie de leur résidence ou à l’étranger auprès des services consulaires et ambassades compétents une déclaration indiquant l’ensemble des faits liés à leur état civil (naissances, reconnaissances, décès, mariages ou transcriptions de jugements de divorce) survenus dans les communes où l’état civil a été détruit, alors même que les registres de l’état civil ou certains d’entre eux ont été détruits. Les démarches doivent être ini-tiées dans le délai de un an à compter de l’instant où la publicité a été donnée à cette situation au Journal officiel, encore que la loi du 15 décembre 1923 n’ait pas prévu la sanction applicable en cas de non-respect du délai légal. Comme toute requête, celle-ci doit être accompagnée de pièces justificatives permettant d’établir que l’événement qui ne peut être attesté par un acte de l’état civil a pourtant bien eu lieu il y a moins de 100 ans (4). L’officier de l’état civil donnera lecture de sa déclaration au comparant et celui-ci pourra alors la signer ; cette déclaration doit aussi être signée par l’officier de l’état civil qui doit la transmettre ensuite, avec copie ou extrait des pièces présentées à l’appui, à la commission concernée (loi du 15 décembre 1923 modifiée, art. 4). Dans l’hypothèse probable où celle-ci se prononce en faveur de la reconstitution de l’acte, au vu des éléments et pièces fournies, un acte original d’état civil est dressé immédiatement, autrement dit sans délai, ainsi que deux copies de l’acte. L’acte ainsi dressé contient tous les éléments essentiels de l’acte originel. La commission conserve aussi au sein de ses archives l’original de l’acte d’état civil, archives qui font l’objet d’un dépôt ultérieur au greffe du tribunal. Ce sont en fait les différentes copies des actes nouvellement établis, qui une fois réunies constituent les nouveaux registres de l’état civil de la personne concernée. La conservation de ces registres reprend le schéma prévu pour les registres de l’état civil qui n’ont pas été détruits : un exemplaire est remis à la mairie et l’autre au greffe du tribunal. Reconstituer un voire plusieurs actes de l’état civil engendrent des frais avancés par l’Etat qui dispose de la faculté de se retourner contre toute personne ou collectivité publique responsable (loi du 15 décembre 1923 modifiée, art. 11). Il est par ailleurs possible qu’un seul exemplaire des registres ait été perdu, détruit ou endommagé. De fait, le nombre d’actes à reconstituer semble, a priori, moins important. C’est le procureur de la République qui doit alors apprécier quelles sont les modalités de la reconstitution des actes à envisager : reconstitution par photocopie ou par tout autre moyen de preuve, le premier procédé étant moins onéreux et plus rapide. L’urgence de la situation (la nécessité de se prévaloir d’un état civil auprès des tiers) pour les personnes concernées peut les amener à solliciter le juge d’instance aux fins d’établir un acte de notoriété.


C. LE RECOURS À L’ACTE DE NOTORIÉTÉ

[Code civil, articles 71, 310-3, 317, 335 et 730-1 ; code de procédure civile, articles 1157 et 1157-1 ; loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, JO du 29-03-11]
C’est la loi du 20 juin 1920 qui détermine le régime juridique propre à la délivrance de tels actes, destinés à suppléer à l’impossibilité de se procurer des expéditions des actes de l’état civil dont les orignaux ont été détruits ou sont disparus par suite de faits de guerre. Le droit civil prévoit par ailleurs le recours à l’acte de notoriété comme possibilité légale visant à établir la filiation ou comme moyen d’établir la qualité d’héritier.


Dans quel cas obtenir un acte de notoriété ?

En matière de reconstitution des actes de l’état civil, les personnes concernées pourront saisir le cas échéant le juge du tribunal d’instance de leur domicile ou de leur résidence en présence de trois témoins (5).
L’acte sera établi dans les formes prescrites par l’article 71 du code civil. En matière de mariage, l’article 13 de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, applicable depuis le 1er mai 2011 substitue la compétence du notaire à celle du juge, qui reste toutefois compétent pour les démarches entreprises antérieurement à cette date (loi du 28 mars 2011, art. 37). Le juge saisi devra donc dire si les témoignages et documents produits peuvent être considérés comme suffisants, et si tel n’est pas le cas, il pourra « faire recueillir d’office par toute personne de son choix des renseignements sur les faits qu’il y a lieu de constater » (C. pr. civ., art. 1157). Il faut rappeler par ailleurs qu’une jurisprudence déjà ancienne prévoit que la faculté offerte à l’article 71 du code civil suppose de rapporter la preuve d’un acte préexistant : l’acte de naissance. La délivrance d’un acte de notoriété par le juge d’instance répond aux circonstances exceptionnelles visées par la loi et est en soi suffisant. Il ne donne pas lieu à l’homologation du tribunal, mais une copie de cet acte de notoriété est adressée au procureur de la République de l’arrondissement où se trouvait l’original de l’acte de l’état civil, qui la transmettra à la commission administrative compétente pour dresser les actes donnant lieu à restitution. Lorsqu’en matière de filiation, l’acte de notoriété vise à faire constater la possession d’état d’un enfant à l’égard d’un de ses parents, le juge qui l’a établi en donne avis au procureur de la République du lieu où est détenu l’acte de naissance de l’intéressé (C. pr. civ. 1157-1). Ces actes sont établis sans aucuns frais.


(1)
Cf. la loi du 1er juin 1916, relative à la reconstitution des registres des actes de l’état civil détruits par suite d’événements de guerre, complétée par les lois du 20 juin 1920 (JO du 22-06-20) et du 15 décembre 1923 (DP 1925. 4. 257), relatives à la reconstitution des actes et archives détruits dans les départements par suite des événements de guerre. La loi du 15 décembre 1923 a une portée plus large : elle concerne les actes de l’état civil détruits par suite d’événements de guerre. Elle a fait l’objet de deux modifications successives (loi du 6 février 1941, DA 1941. 104 et loi n° 49-1066 du 2 août 1949 [D. 1949. 352]). Les dernières modifications légales ont ainsi favorisé la reconstitution des actes de l’état civil dont les originaux ont été détruits par suite d’un sinistre ou de faits de guerre.


(2)
Loi du 19 juillet 1871, DP 1871. 4. 136, et du 12 février 1872, DP 1872. 5. 29.


(3)
Décret du 30 octobre 1925 (JO du 8-11-25), modifié par le décret n° 53-692 du 1er août 1953 (JO du 8-08-53).


(4)
Les actes remontant à plus de 100 ans ne peuvent donner lieu à reconstitution (IGREC n° 158).


(5)
Loi du 20 juin 1920 modifiée par la loi du 6 février 1941, article 2.

SECTION 2 - L’OBTENTION D’UN NOUVEL ACTE D’ÉTAT CIVIL

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur