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L’établissement de l’acte de mariage

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L’officier de l’état civil participe directement à la réalisation d’un événement qui modifie l’état des personnes : le mariage. La cérémonie du mariage interroge d’abord sur l’existence éventuelle d’un sursis à la célébration du mariage. Les conditions de sa célébration diffèrent ensuite dans les cas spécifiques prévus par la loi. Enfin, l’établissement de l’acte de mariage postérieurement à sa célébration finalise le processus visant à assurer la traçabilité de l’union matrimoniale.


A. LA QUESTION DU SURSIS À LA CÉLÉBRATION DU MARIAGE

[Code civil, articles 37, 74-1, 75, 146, 165, 175-2 et 180]
La célébration du mariage obéit à des règles strictes qui révèlent à la fois de la solennité qui s’y rattache et de la reconnaissance de la société à cette forme d’engagement conjugal. Au-delà du lieu et des délais à respecter maintes fois évoqués, la cérémonie du mariage interroge sur l’existence ou non d’un sursis à la célébration du mariage et de la publicité qui est donnée à cette même célébration. Ce dispositif ne concerne pas les époux déjà mariés et qui entendent renouveler leurs vœux de mariage. L’officier de l’état civil qui serait requis à cette fin ne serait alors pas tenu de prêter son concours et aucun formalisme légal n’a été prévu à cet effet (1).
Le sursis à célébration du mariage est une décision qui relève des prérogatives du procureur de la République. Il aura été saisi par l’officier de l’état civil, lui-même confronté à la situation d’un mariage potentiellement susceptible d’être annulé pour vice de consentement ou défaut de consentement. L’officier de l’état civil a donc l’obligation de faire part au procureur de la République des éléments qui fondent son inquiétude et qui témoignent de l’existence d’indices sérieux compromettant le consentement qui sera donné au mariage par les futurs époux. A ce titre, il nous semble que la seule différence d’âge entre les futurs époux ou la situation irrégulière d’un futur époux au titre du droit des étrangers ne puisse pas constituer des indices suffisamment sérieux. Le seul fait que le mariage qui doit être célébré puisse être qualifié de mariage de complaisance ou de mariage forcé est insuffisant en soi pour remettre en cause la date prévue pour la célébration du mariage. De même le défaut d’intention matrimoniale devra être établi par le ministère public. La difficulté à cerner ces indices sérieux a conduit le ministère de la Justice en 2010 à lister des situations de fait qui peuvent constituer des indicateurs de simulation de mariage ou d’absence d’intention matrimoniale (circulaire CIV/9/10 du 22 juin 2010). Tel serait le cas :
→ pour les futurs époux qui feraient l’aveu que la finalité première de leur projet de mariage serait l’obtention d’un titre de séjour ;
→ du retard répété dans la production des pièces demandées ;
→ de l’absence manifeste d’un époux à la constitution de son dossier de mariage ; du doute sur l’identité de l’un des futurs conjoints ;
→ d’un changement notable de train de vie, etc.
En tout état de cause, les situations de fait évoquées dans la circulaire ne sont mentionnées qu’à titre indicatif et ne préjugent ni de la décision prise par le procureur de la République, ni de celle qui est rendue par le président du tribunal de grande instance. L’appréciation positive de ces indices par le procureur de la République le conduira à surseoir à la célébration du mariage dans l’attente des résultats de l’enquête qu’il aura pris soin de diligenter pour apprécier aussi la volonté réelle des époux de s’engager dans le lien matrimonial (C. civ., art. 175-2).
Le délai maximal de ce sursis est de un mois, renouvelable une fois. Cette décision est susceptible de recours devant le président du tribunal de grande instance et il est exercé par l’un ou l’autre des futurs époux, quel que soit son âge. La décision du président du tribunal de grande instance doit intervenir dans les dix jours de sa saisine. A l’expiration de ce délai légal, il appartient au procureur de la République de faire connaître à l’officier de l’état civil qui l’a saisi s’il entend ne pas faire obstacle à la célébration du mariage, ou s’il entend former une opposition à celui-ci. A partir de là, les prérogatives de l’officier de l’état civil sont très limitées. Il ne peut notamment décider de son propre fait de ne pas célébrer le mariage, alors même que le procureur de la République ne s’y est pas opposé. Son abstention pourrait être considérée comme une faute commise dans l’exercice de ses fonctions, et de fait engagerait la responsabilité de l’Etat (2).
Quant à la publicité de la célébration, elle est garantie par le fait que le mariage doit être célébré à la mairie, portes tenues ouvertes, en présence de témoins désignés à l’avance et dont l’identité est confirmée avant la célébration du mariage par les futurs époux.
La solennité du mariage résulte de l’intervention de l’officier de l’état civil en présence des futurs époux, que le mariage soit célébré en France ou à l’étranger. La présence des époux est analysée par les tribunaux comme constituant une règle de fond (3) dont la violation ne pourrait que conduire à faire déclarer nul le mariage célébré dans de telles conditions (4). Quant au rituel de la célébration, il est décrit de manière détaillée par l’article 75 du code civil.


B. LES CAS PARTICULIERS

Deux cas spécifiques peuvent se présenter à l’officier de l’état civil. Ce sont les cas d’un mariage qui doit être célébré in extremis et du mariage qui sera célébré à titre posthume. Le code civil prend en compte ces deux cas de figure.


I. Le mariage célébré in extremis

[Code civil, article 75 ; IGREC nos 393 et 394]
Dans ce premier cas, au-delà des convictions propres aux futurs époux, la célébration du mariage civil aura des conséquences concrètes pour le futur conjoint survivant, notamment au regard des règles régissant la dévolution successorale. La particularité du mariage célébré in extremis vise le cas où l’un des époux est confronté à une situation de mort imminente. De fait, l’officier de l’état civil qui célèbre le mariage est autorisé à se déplacer sur le lieu de domicile ou de résidence de l’époux concerné, y compris s’il s’agit d’un établissement social ou médico-social, d’une maison de retraite, d’un établissement de long séjour, d’un établissement pénitentiaire... L’autorisation préalable du procureur de la République n’est pas requise. L’officier sera toutefois tenu de procéder à un certain nombre de vérifications, qui tiennent notamment à l’identité des futurs époux et à leur volonté certaine de voir leur union célébrée. Le mariage célébré en présence de témoins et du public conserve son caractère solennel, l’interpellation des époux sur l’existence d’un régime matrimonial sera effectuée, mais l’officier de l’état civil ne sera pas obligé de donner lecture des articles 212 et suivants du code civil, concernant les droits et devoirs des époux dans le cadre du mariage.


II. Le mariage célébré à titre posthume

[Code civil, articles 171 et 206]
Dans le cas du mariage célébré à titre posthume, la chronologie des faits est bouleversée : le mariage qui doit être célébré concerne la situation d’une personne qui ne peut l’envisager qu’après le décès de la personne qu’elle souhaitait épouser. La gravité de la situation assujettit la célébration d’un tel mariage à l’autorisation du président de la République. Une requête doit être déposée en ce sens au ministère de la Justice par l’intermédiaire du procureur de la République, ministère qui est en charge de l’instruction de la demande. Elle est accompagnée de toutes les pièces nécessaires attestant de la gravité de la situation. Là encore, les questions d’identité et d’appréciation de la volonté réelle de se marier seront appréciées. Le fait que des démarches aient été établies en ce sens avant le décès de l’un des conjoints facilitera l’administration de la preuve requise. La célébration du mariage conserve toute sa solennité. Ses effets remontent à la veille du décès de l’époux, mais ne créent pas de régime matrimonial dans les rapports entre époux. L’organisation d’une dévolution successorale légale au bénéfice du conjoint survivant ne peut donc être envisagée. Celui-ci pourra toutefois se prévaloir des dispositions testamentaires établies en sa faveur, ou d’un capital décès, et sur le terrain des devoirs familiaux l’obligation alimentaire à l’égard des beaux-parents subsistera, du moins, si les règles applicables en matière de filiation font état de l’existence d’enfants communs au couple dont le mariage a été célébré à titre posthume. La date du mariage posthume se substituera à celle de la date de décès s’agissant du calcul de certaines prestations sociales. La Chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée en ce sens à propos de la durée de versement de l’allocation veuvage (5).


C. LES MENTIONS FIGURANT DANS L’ACTE DE MARIAGE

[Code civil, articles 74, 76, 1316-4 et 1319 ; IGREC n° 396]
L’acte de mariage doit être établi dès lors que l’union des époux a été célébrée par l’officier de l’état civil. Rappelons, à ce titre, que le mariage ne peut être célébré que dans la commune où l’un des futurs époux a son domicile ou sa résidence établie depuis plus de un mois et de manière continue. Une attache avec la commune doit être rapportée. L’usage selon lequel le mariage peut être célébré à la mairie du lieu de résidence des parents de l’un des futurs époux ne relève que d’une tolérance administrative et suppose d’une part que les parties concernées pourront produire un justificatif de domicile et d’autre part qu’ils reconnaissent que leur enfant réside avec eux de manière habituelle.
L’acte de mariage est donc dressé sur le champ, même si les principales mentions sont, dans les faits, indiquées dans l’acte par anticipation. Le jour du mariage, l’acte de mariage doit être signé par les époux. On a pu légitimement se demander sous quel nom ces derniers devaient signer leur acte de mariage. L’utilisation du nom de famille qui est le leur avant la célébration de l’union est bien sûr encouragée, mais le recours au nom marital d’usage n’est pas proscrit (6). La signature apposée dans l’acte de mariage permet d’identifier la personne qui est désignée comme telle, et celle de l’officier de l’état civil confère à l’acte de l’état civil son caractère authentique. La signature des époux permet aussi de traduire leur consentement aux obligations qui découlent de l’établissement de l’acte.
L’acte de mariage doit énoncer un certain nombre de mentions auxquelles s’ajoutent parfois des mentions spécifiques, comme le fait que le mariage ait pu être célébré hors mairie ou qu’une autorisation ait pu être donnée à l’un des époux. S’il a été nécessaire de recourir à la présence d’un interprète assermenté (époux ne maîtrisant pas la langue française), mention en sera faite dans l’acte de mariage. De même, si les futurs époux sont atteints d’un handicap empêchant leur expression par la parole (sourd, muet), ils peuvent être assistés d’une personne apte à communiquer avec eux.
Dans l’hypothèse où l’acte établi apparaît comme l’ayant été de manière irrégulière, le mariage ne sera pas pour autant déclaré nul mais il risque de mettre en difficulté les époux eux-mêmes, s’ils sont amenés à se prévaloir par exemple de la date de leur mariage (en cas d’erreur sur celle-ci). L’officier de l’état civil engage aussi sa responsabilité puisque sa négligence l’expose au versement d’une amende. Mais l’erreur commise peut aussi donner lieu à rectification de l’acte, soit à la demande des parties elles-mêmes, soit à celle qui est exprimée par le procureur de la République (cf. supra, chapitre 2, section 1, §  2). Les mentions référencées dans l’acte de mariage font foi jusqu’à inscription de faux si elles témoignent des constatations faites par l’officier de l’état civil ; ce qui est mentionné dans l’acte de mariage a pu, selon les informations référencées, être vérifiées par l’officier de l’état civil. Si tel n’est pas le cas, il ne peut s’agir que des énonciations faites par les parties, et leur preuve contraire peut toujours être établie. L’officier de l’état civil devra aussi remettre un livret de famille aux époux.


Les maires peuvent-ils invoquer la liberté de conscience pour refuser la célébration d’un mariage ?

L’adoption de la loi sur le mariage pour tous en mai 2013 n’a pas manqué de susciter chez un certain nombre de maires la question de leur liberté de conscience, inquiétude renforcée par les risques de sanctions pénales auxquels se réfère la circulaire du ministre de l’Intérieur du 13 juin 2013 (7) face à un refus illégal de célébrer un mariage. Le Conseil d’Etat a donc été saisi d’un recours contre la circulaire précitée. Il a estimé que la question soulevée par les maires devait être considérée comme nouvelle, et que la circulaire en cause ne comportait pas les garanties qu’exige le respect de la liberté de conscience. Il a, de fait, choisi de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité. Dans leur décision rendue le 18 octobre 2013 (8), les sages du Conseil constitutionnel ont estimé « d’une part, que la volonté du législateur était d’assurer l’application de la loi relative au mariage et [de] garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l’état civil et, d’autre part, « qu’eu égard aux fonctions de l’officier de l’état civil dans la célébration du mariage, [le législateur] n’a pas porté atteinte à la liberté de conscience ».


(1)
Rép. min., Kucheida, n° 96447, JOAN [Q] du 22-02-11, p. 1830.


(2)
Cass. civ. 1re, 6 février 2007, n° 06-10403 ; Rap. min., Masson, n° 01711, JO Sén. (Q) du 9-04-09, p. 906.


(3)
Pour les militaires, la célébration du mariage peut intervenir dans des cas exceptionnels hors la comparution personnelle du principal intéressé (C. civ., art. 93 à 96-2).


(4)
Cass. civ. 1re, 15 juillet 1999, n° 99-10269, à propos de la célébration au Maroc d’un mariage hors la présence d’une personne possédant la double nationalité française et marocaine.


(5)
Cass. soc., 15 février 2001, n° 99-17199 ; Bull. civ., V, n° 57.


(6)
Rép. min., Reiss, n° 78794, JOAN (Q) du 19-10-10, p. 11443.


(7)
Circulaire du 13 juin 2013, NOR : INTK1300195C, consultable sur www.circulaires.gouv.fr


(8)
Décision n° 2013-353 QPC du 18 octobre 2013, JO du 20-10-13.

SECTION 1 - L’ACTE DE MARIAGE

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