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Le cas particulier du décès constaté par jugement

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[Code civil, articles 88 à 92 et 122 à 132 ; code de procédure civile, articles 1062 à 1069]
L’établissement de l’acte de décès n’est pas toujours possible. Les familles peuvent en effet être confrontées au fait que l’un des leurs ait disparu sans que son corps ait pu être retrouvé, et sans avoir pour autant la certitude que la personne est bien décédée. Le droit civil établit la distinction qui est la suivante.
Dans l’hypothèse où la personne a cessé de paraître à son domicile, la protection de ses biens justifiera dans un premier temps que cette absence puisse être déclarée. Une telle démarche initiée devant le juge des tutelles qui exerce ses fonctions au sein du tribunal d’instance conduit en effet à considérer la personne dont on n’a plus de nouvelles comme étant présumée absente. L’intérêt d’une telle procédure est de veiller à ce que ses intérêts patrimoniaux soient sauvegardés pour le cas où elle réapparaîtrait à son domicile. Le tribunal saisi peut désigner à cette fin une personne qui sera chargée de la gestion de son patrimoine (il peut s’agir de son conjoint ou d’un administrateur provisoire désigné à cette fin). L’autre intérêt d’une telle déclaration est de faire courir les délais, en vue de faire déclarer ultérieurement cette personne comme judiciairement décédée.
La situation de la personne présumée absente ne fait pas l’objet d’une déclaration à l’état civil. Si le tribunal s’est prononcé en faveur de la mise en place d’une mesure de tutelle concernant ses biens, mention sera faite de cette décision au répertoire civil, mention reportée en marge de l’acte de naissance de l’intéressé.
Il est possible aux termes d’un certain délai – dix ans si le cas d’absence a été signalé au tribunal par les proches ou la famille, 20 ans dans le cas contraire – d’obtenir du tribunal de grande instance un jugement déclaratif de décès qui tiendra lieu d’acte de décès.
Il est encore possible que le membre de la famille ait disparu dans des conditions qui laissent penser qu’il a mis sa vie en danger (disparition en mer, crash aérien, incendie à l’issue duquel il n’a pas été possible d’identifier les corps, etc.) et là encore sans que son corps ait pu être retrouvé (1). Il s’agit là de disparition au sens civil du terme, et dans un tel cas le décès de la personne peut être établi dans le cadre d’un jugement déclaratif de décès dès lors que la juridiction de fond a considéré comme établies les circonstances mettant en danger la vie de la personne disparue (2). Lorsque la personne disparue est un ressortissant français, il importe peu que les faits liés à sa disparition se soient déroulés sur ou en dehors du territoire national. Il en va différemment pour les ressortissants étrangers. Un jugement déclaratif de décès ne peut être rendu que si les conditions de la disparition se sont produites sur le territoire national, excepté toutefois s’il avait sa résidence habituelle en France.
Dans un cas comme dans l’autre, disparition au sens strict ou l’absence prolongée, une requête doit être présentée au tribunal de grande instance du lieu où la personne est supposée avoir disparu ou être décédée. Elle peut être présentée à l’initiative des familles ou du procureur de la République. Lorsque le lieu de disparition n’est pas déterminé de façon certaine, le tribunal compétent est celui du dernier domicile ou de la dernière résidence de la personne disparue, voire encore le tribunal du lieu du port d’attache du navire ou de l’aéronef qui transportait la personne. La disparition des personnes concerne parfois plusieurs membres d’une même famille. La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 dite loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit autorise le dépôt d’une requête collective devant le tribunal territorialement compétent. Le jugement déclaratif de décès qui pourra être rendu à l’issue de la procédure et d’un complément d’enquête établira la date de décès de chacune des personnes de la procédure. Cette date est déterminée en fonction des circonstances de la cause du décès. Elle peut aussi être fixée au jour de la disparition de la personne et ne peut en aucun cas être indéterminée (C. civ., art. 90, al. 3). En tout état de cause, découleront de cette situation les effets juridiques habituels inhérents à un décès : la succession de la personne disparue est ouverte, son régime matrimonial liquidé et le conjoint survivant est autorisé à se remarier. Le jugement rendu fait l’objet d’une transcription sur les registres de l’état civil du lieu présumé du décès ou du décès réel. Dans l’hypothèse où le jugement rendu concerne plusieurs membres d’une même famille, ce sont les extraits individuels du dispositif du jugement qui seront transmis aux officiers de l’état civil du dernier domicile de chacune des personnes concernées, en vue de leur transcription sur les registres de l’état civil. Le procureur de la République ou toute partie intéressée peut demander toutefois l’annulation du jugement déclaratif de décès dans les conditions prévues par la loi. Cette alternative se présente lorsque la personne déclarée judiciairement décédée réapparaît postérieurement au jugement (C. civ., art. 92, al. 2, et 118), et le nouveau jugement fera lui aussi l’objet d’une transcription en marge des actes de l’état civil. La personne qui réapparaît retrouve le patrimoine qui est le sien dans l’état où il se trouve, c’est-à-dire qu’il ne concerne que les biens qui existent le jour où elle réapparaît (C. civ., art. 130). Toutefois, le mariage qui était le sien reste dissous et un nouveau mariage doit être célébré le cas échéant entre les ex-époux si leurs intentions matrimoniales et leur statut juridique respectif l’autorisent (C. civ., art. 132).


(1)
L’analyse est faite de manière concrète. Il appartient au tribunal de dire en quoi les circonstances de la disparition sont constitutives ou non d’une situation de disparition, et notamment de dire en quoi la personne disparue a pu mettre sa vie en danger.


(2)
Cass. civ. 1re, 14 mars 1995, n° 92.21226. Disparition d’une personne alors que le navire à bord duquel elle se trouvait était au large, par mer agitée d’une température de 9°.

SECTION 2 - L’ACTE DE DÉCÈS

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