Comme tout événement affectant la vie des personnes, le décès de l’individu doit faire l’objet d’une déclaration à l’état civil. La déclaration de décès est enfermée dans un délai légal et elle relève de la compétence de l’officier de l’état civil. Si le certificat médical constatant le décès est indispensable, les informations relatives à l’identité et au statut juridique de la personne décédée le sont tout autant car elles permettront de répondre aux exigences légales concernant l’acte de décès. Pour l’officier de l’état civil, la déclaration de décès est suivie de l’accomplissement de certaines formalités.
A. LA COMPÉTENCE DE L’OFFICIER D’ÉTAT CIVIL
[Code civil, articles 78 et 87 ; IGREC nos 423, 441 et 442]
La compétence matérielle et territoriale de l’officier de l’état civil est justifiée par les règles du code civil : c’est l’officier de l’état civil du lieu où le décès a été constaté qui reçoit la déclaration. Des circonstances particulières peuvent expliquer la désignation d’un autre critère de compétence territoriale de l’officier de l’état civil. Il en est ainsi chaque fois que le corps de la personne est découvert, et ne peut être dans un premier temps identifié. Dans ce cas, retenir la compétence de l’officier de l’état civil du lieu de la découverte du corps ne paraît pas incongru, même en l’absence de dispositions légales claires. Pour autant, cette déclaration ne pourra permettre l’inhumation de la personne tant que le décès n’aura pas été médicalement constaté. Une fois cette déclaration faite, il convient de procéder au transport du corps et à l’organisation des obsèques.
Le déclarant auprès de l’officier de l’état civil peut être un membre de la famille, un préposé de l’établissement social ou médico-social du lieu où le décès est survenu, l’officier de police judiciaire dans les hypothèses de mort violente ou suspecte, et d’une manière plus générale, toute personne qui serait en mesure de fournir les informations les plus exactes sur la personne défunte. L’Instruction générale relative à l’état civil détermine de façon plus précise les conditions relatives à la déclaration de décès, lorsque celui-ci intervient au cours d’un transport routier, ferroviaire, maritime ou aérien. A l’origine, c’est un décret du 15 avril 1919, abrogé depuis (1), qui invitait les familles à déclarer le décès de leurs proches, dans les 24 heures. La règle, aujourd’hui coutumière, est toujours rappelée par les municipalités, et elle trouve un certain appui avec les dispositions légales concernant l’inhumation de la personne décédée. En effet, pour un décès en France, l’inhumation ne peut intervenir avant 24 heures au moins et six jours au plus après le décès (CGCT, art. R. 2213-33). Le dépassement de ce délai ne met toutefois pas fin à l’obligation de déclarer l’acte constatant le décès d’une personne. Tel est le cas lorsque le corps d’une personne vient d’être retrouvé et peut être identifié. Il est donc impossible, pour l’officier de l’état civil, d’invoquer le caractère tardif de la déclaration pour refuser de la prendre en compte.
B. L’OBTENTION DU CERTIFICAT DE DÉCÈS
[Code civil, articles 79, 80 et 85 ; code général des collectivités territoriales, articles L. 2223-42, R. 2212-1-2, alinéa 3, R. 2213-1-2 et R. 2213-17 ; décret n° 2006-938 du 27 juillet 2006, JO du 29-07-06 ; arrêté du 24 décembre 1996, modifié, NOR : TASP9720101A]
L’officier de l’état civil donne délégation à un médecin en vue de faire constater le décès (2). L’établissement du certificat de décès doit être conforme à un modèle fixé par l’arrêté du 24 décembre 1996 ; un certificat de décès électronique existe également depuis 2006. Le certificat de décès est doté de deux volets : le volet médical et le volet administratif. Ce dernier volet est établi en trois exemplaires et est signé par le médecin ayant constaté le décès. Deux mairies en sont destinataires : celle du lieu du décès et celle du lieu où le corps du défunt sera transporté. Le volet médical est relatif aux causes du décès et il est effectué par le médecin référent. La confidentialité est garantie par le fait qu’il ne comporte ni le nom ni le prénom de la personne décédée. Ce certificat fait l’objet d’une transmission à l’Inserm et à l’organisme qui est en charge de la gestion du système des certificats de saisie.
Quant au médecin désigné pour établir ce certificat de décès, deux hypothèses se présentent :
→ la commune a prévu que soient désignés spécifiquement des médecins par les officiers de l’état civil, ce qui dispense les familles de rémunérer le service rendu : le médecin ainsi désigné est autorisé à procéder à toutes les formalités légales requises, et notamment à constater le décès et à établir le certificat médical ;
→ lorsque la commune n’a délivré aucune habilitation spécifique, la famille ou la personne présente peut faire appel à n’importe quel médecin.
Quel que soit le médecin appelé à constater le décès, il peut refuser qu’une autorisation de transport soit délivrée lorsque le décès soulève un problème médico-légal. Tel serait le cas si l’état du corps ne permettait pas son transport, ou si le médecin référent constate que la personne défunte était atteinte d’une des maladies contagieuses fixées par arrêté du ministère de la Santé.
L’importance, en droit, de l’heure et de la date du décès
Quand deux personnes héritières l’une de l’autre (un parent et son enfant) décèdent au cours d’un même événement (par exemple un accident de la circulation), et que leurs biens sont dévolus à leurs héritiers successifs, il importe de déterminer précisément l’heure et la date du décès.
L’article 725-1 du code civil détermine les critères pour établir l’ordre des décès. Quoi qu’il en soit, le fait de préciser dans l’acte de décès, outre le jour, l’heure et le lieu du décès le mois et l’année du décès, contribueront à faciliter le régime de preuve quant à la date exacte du décès. C’est aussi à la date du décès que la loi désigne les personnes appelées à recueillir une succession en leur qualité d’héritier. Le principe est le même pour la personne décédée et qui était mariée : le régime matrimonial qui est le sien est dissous dans les mêmes conditions.
La difficulté à déterminer l’heure exacte du décès, notamment pour les personnes qui ont un moment été en situation « d’état végétatif » explique que le législateur ait apporté son concours dans la gestion de cette difficulté. Le code de la santé publique prévoit que dans l’hypothèse où la personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents :
- une absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée ;
- l’abolition de tous les réflexes du tronc cérébral ;
- une absence totale de ventilation spontanée.
Il s’agit ni plus ni moins que d’attester dans le cadre de ces constatations médicales du caractère irréversible de la destruction encéphalique. L’article R. 1232-2 du code de la santé publique détermine le nombre et la nature des examens nécessaires pour dresser l’acte de décès.
[Code civil, article 725-1 ; code de la santé publique, articles R. 1232-1 et 1232-2]
C. LE CONTENU DE L’ACTE DE DÉCÈS
Quant au contenu de l’acte de décès, il est fixé par l’article 79 du code civil. L’acte doit énoncer :
→ le jour, l’heure et le lieu de décès ;
→ les prénoms, nom et date du lieu de naissance, profession et domicile de la personne décédée ;
→ les prénoms, noms et professions et domiciles de ses père et mère ;
→ les prénoms et nom de l’autre époux si la personne décédée était mariée, veuve ou divorcée ;
→ les prénoms, nom et âge, profession et domicile du déclarant, et s’il y a lieu son degré de parenté avec la personne décédée.
I. La date du décès
[Code civil, article 79 ; IGREC n° 426-6]
S’agissant de la date du décès, elle peut se révéler déterminante sur le plan successoral. Il n’en demeure pas moins que la date comme l’heure du décès peuvent être contestées. Les mentions qui figurent dans l’acte de décès n’établissent qu’une présomption simple. Dans des circonstances exceptionnelles, la date et surtout l’heure de décès résulteront de l’autopsie qui aura été demandée ou ordonnée dans le cadre d’une procédure judiciaire.
II. Les circonstances de la mort
[Code civil, article 85]
Les circonstances de la mort ne peuvent apparaître sur l’acte de décès. Il n’est donc pas possible de faire état du suicide ou de l’assassinat de la personne dans l’acte de décès qui la concerne (3), même si ces circonstances peuvent tout particulièrement intéresser les tiers. Ainsi en est-il en matière d’assurance-vie où il n’est pas rare qu’une clause du contrat mentionne l’exclusion de la garantie (par exemple, en cas de suicide). Il appartiendra à la compagnie d’assurances de se prévaloir d’autres moyens de preuve le cas échéant.
III. Le nom et les prénoms de l’époux
La personne défunte a pu avoir plusieurs conjoints au cours de sa vie maritale. C’est le nom du dernier d’entre d’eux qui doit être indiqué dans l’acte, qu’il soit ou non survivant au sens du droit successoral. La référence au conjoint permet de faire référence à sa situation de famille au moment du décès.
IV. L’indication du domicile du défunt
[Code civil, articles 79, 102 et 720 ; code de procédure civile, article 45 ; IGREC n° 428]
Les officiers de l’état civil sont invités par l’Instruction générale relative à l’état civil à mentionner le domicile du défunt dans l’acte de décès. Cette recommandation extralégale est d’autant plus justifiée que cette mention apparaît dans l’acte de décès, elle a son intérêt là encore sur le plan successoral, puisque l’article 720 du code civil prévoit que la succession s’ouvre au dernier domicile du défunt. Il y a là un critère légal qui a son importance pour déterminer le tribunal territorialement compétent pour connaître des actions successorales ou encore la loi applicable sur le plan du droit international privé, lorsqu’il existe un élément d’extraneïté (par exemple des biens meubles situés à l’étranger). L’indication d’une telle mention facilite la preuve attendue en matière successorale.
Pour clarifier les choses, la référence à la commune du lieu de décès qui est prévue par la loi présentera aussi un intérêt, notamment lorsque la personne défunte ne décède pas à son domicile puisque le droit établit une distinction entre le domicile légal qui est unique et la résidence, notion de fait.
V. Le défaut de renseignements
[Code civil, articles 79 et 80]
En l’absence de certains renseignements, l’acte de décès est établi au seul vu des renseignements fournis. Si par la suite les renseignements qui font défaut au moment de l’acte sont connus, le procureur de la République donnera les consignes nécessaires pour qu’une mention spéciale permette de compléter l’acte incomplet.
L’acte de décès établi, il appartiendra à l’officier de l’état civil de mentionner ou de faire mentionner le décès en marge de l’acte de naissance de la personne, et, le cas échéant, de veiller à ce qu’une copie de l’acte de décès soit adressée à l’officier de l’état civil du lieu où le défunt avait son dernier domicile.
D. LES FORMALITÉS ADMINISTRATIVES POSTÉRIEURES
[Code général des collectivités locales, articles L. 2213-14, R. 2213-1-2, R. 2213-1-3, R. 2213-14, R. 2213-33 et R. 2213-35 ; code électoral, article R. 18 ; livre des procédures fiscales, article L. 102 A ; code de l’action sociale et des familles, article R. 131-6 ; code de la santé publique, article R. 2112-21, alinéa 2 ; IGREC nos 426 et 608]
L’obtention du certificat médical permet à l’officier de l’état civil de délivrer l’autorisation administrative nécessaire à l’inhumation. Cette autorisation ne relève pas toujours des prérogatives de l’officier de l’état civil. L’hypothèse de mort violente (le meurtre par exemple) ou tout au moins le décès qui n’est pas relié à une cause naturelle ne manqueront pas, d’une part, d’alerter l’officier de l’état civil et, d’autre part, d’amener ce dernier à saisir le procureur de la République. De fait, dès lors qu’une procédure pénale est diligentée à l’initiative d’un membre du parquet et qu’un juge d’instruction est désigné, il lui appartiendra d’autoriser l’inhumation. C’est dans le cadre de ses prérogatives de police administrative que le maire pourra autoriser les membres de la famille à faire transporter le corps sur le territoire national (4), à l’inhumer et à envisager telle ou telle forme d’obsèques. Et ce sont les fonctionnaires désignés par l’article L. 2213-14 du code général des collectivités territoriales (5) qui devront, sous l’autorité du maire ou du préfet, assister aux opérations consécutives au décès (fermeture des cercueils hors de la commune, opérations de crémation, exhumation et réinhumation). Dans l’hypothèse où la personne décédée a décidé de son vivant, et par une déclaration écrite (confirmée le plus souvent par une carte de donateur) de faire don de son corps à la science, information en sera donnée à l’officier de l’état civil. Dans ce cas, et à partir de l’instant où le corps aura été accepté par l’établissement bénéficiaire, il appartient à ce dernier d’assurer à ses frais l’inhumation sans avoir à respecter les conditions de droit commun rappelées par le code général des collectivités territoriales.
Le certificat de décès qui aura été établi par le médecin est aussi adressé par l’officier de l’état civil à des fins statistiques à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Si la personne décédée était par ailleurs bénéficiaire de l’aide sociale, inscrite sur les listes électorales, ou ressortissant étranger, un certain nombre de tiers sont informés et la loi prévoit à cet effet l’accomplissement de formalités de publicité très diverses qui dépendent du statut de la personne et de la situation juridique qui était la sienne. Ainsi, un avis de radiation des listes électorales devra être adressé par l’officier de l’état civil et une information sera aussi communiquée aux services des impôts dans le cadre des relevés trimestriels ou aux autorités consulaires et alerter le service de l’aide sociale référent dans les dix jours à compter du décès. En outre, dans l’hypothèse où le décès concerne un enfant de moins de six ans, l’officier de l’état civil doit informer dans les 48 heures de la déclaration de décès le médecin responsable du service de protection maternelle et infantile. Par ailleurs, il n’est pas rare qu’une demande particulière soit adressée aux officiers de l’état civil par les parents d’une personne qui est décédée en étant majeure, célibataire, et sans enfants. La requête qui leur est adressée vise à faire inscrire sur leur propre livret de famille l’acte de décès d’un enfant célibataire. Force est de constater que la loi n’interdit pas formellement une telle démarche, mais dans le même temps, s’agissant des mentions qui peuvent être inscrites sur le livret de famille, l’article 3 du décret n° 74-449 du 15 mai 1974 modifié précise que seuls les extraits d’acte de décès des enfants morts, avant leur majorité, doivent y être insérés. Cette restriction s’explique par le fait que le livret de famille n’a pas vocation à retracer de manière exhaustive les événements importants de la vie familiale (6).
(1)
Article 6 du décret n° 76-435 du 18 mai 1976 modifiant le décret du 31 décembre 1941 codifiant les textes relatifs aux opérations d’inhumation, d’exhumation, d’incinération et de transport de corps ainsi que le décret du 12 avril 1905 sur le taux des vacations funéraires (JO du 19-04-05).
(2)
Le certificat de décès constate, d’un point de vue médical, le décès de la personne.
(3)
Exception faite pour les militaires ou les civils décédés à la suite de faits de guerre. Ces actes doivent contenir la mention « morts pour la France » (code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, art. L. 388, L. 490 et L. 492 ter).
(4)
La compétence relève du préfet pour le transport des corps à l’étranger.
(5)
Le texte précité prévoit que dans les communes dotées d’un régime de police d’Etat, ces opérations puissent se dérouler sous la responsabilité du chef de circonscription, en présence d’un fonctionnaire de police délégué par ses soins ; elles s’organisent dans les autres communes, sous la responsabilité du maire, en présence du garde champêtre ou d’un agent de police municipale délégué par le maire.
(6)
Rép. min. Lagarde, n° 16579, JOAN (Q) du 9-07-13, p. 7215.