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Le juge français face aux directives de l’Union européenne

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En principe, les directives ne peuvent pas être invoquées directement devant un juge national car, par nature, elles doivent faire l’objet d’une transposition en droit interne. Les exceptions à cette absence d’« effet direct » des directives (cf. infra, chapitre 3) mises à part, le juge national reste tenu de parvenir à régler le litige en respectant le droit de l’Union européenne, et ce même si la directive n’a pas été transposée ou l’a été de manière incorrecte ou partielle.
Pour parvenir au respect du droit de l’Union européenne, le juge national est tenu de procéder à une « interprétation conforme » du droit interne. Autrement dit, il doit donner à la norme interne une interprétation qui lui permet d’être compatible avec la directive. Pour la Cour de justice, « en appliquant le droit national, qu’il s’agisse de dispositions antérieures ou postérieures à la directive, la juridiction nationale appelée à l’interpréter est tenue de le faire dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de la directive pour atteindre le résultat visé par celle-ci » (1).
Pèse donc sur le juge national une obligation générale d’interpréter les normes nationales conformément au contenu des directives communautaires, quitte à bousculer le droit interne. En effet, « l’obligation des Etats membres, découlant d’une directive, d’atteindre le résultat prévu par celle-ci ainsi que leur devoir de prendre toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution de cette obligation s’imposent à toutes les autorités des Etats membres, y compris, dans le cadre de leurs compétences, aux autorités juridictionnelles » (2). Le juge national peut puiser dans tout le droit interne, sans se limiter aux normes qui ont expressément transposé la directive.
La Cour de cassation s’est approprié cette méthode, en interprétant des dispositions du droit interne « à la lumière de... ». Les juges du fond y sont tenus de la même manière. Par l’interprétation conforme, il s’agit parfois de renforcer les dispositions nationales, parfois de les adapter. La procédure d’interprétation conforme permet donc de minorer les effets du principe d’inopposabilité directe des directives devant le juge national, mais il ne l’anéantit pas. Il est en effet de jurisprudence constante que le juge national n’a pas à procéder à l’interprétation conforme d’une disposition nationale directement contraire à la norme européenne. En d’autres termes, il ne peut pas y avoir d’interprétation contra legem du droit interne, même pour assurer le respect de la directive (3).
Lorsqu’une juridiction nationale refuse de procéder à une interprétation conforme (et que la directive n’est pas applicable directement entre particuliers), il reste possible : de mobiliser, si les circonstances s’y prêtent, une disposition du traité, un article de la charte des droits fondamentaux ou un principe général du droit de l’Union ; d’engager la responsabilité de l’Etat pour non-transposition de la directive (4) ; d’alerter la Commission européenne pour qu’elle engage une action en manquement contre l’Etat.


(1)
CJCE 13 novembre 1990, aff. C-106/89, Marleasing.


(2)
CJCE 19 janvier 2010, aff. C-555/07, Kücukdevici.


(3)
CJCE, 16 juillet 2009, aff. C-12/08, Mono Car Styling ; Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-22285.


(4)
CJCE 19 novembre 1991, aff. C-6/90, Francovich.

SECTION 4 - LE RÔLE DES JURIDICTIONS FRANÇAISES

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