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Les ententes, abus de position dominante et aides d’Etat

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[Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, articles 101, 102 et 107]
La prohibition des ententes et des abus de position dominante fait partie du droit antitrust de l’Union européenne : sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre Etats membres ; est également incompatible avec le marché intérieur et interdit le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci.


A. LE MONOPOLE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Les organismes évoluant dans le milieu social sontils des entreprises évoluant dans un marché, au sens des articles 101 et 102 du TFUE ? Rien a priori ne l’exclut. Néanmoins, dans certains cas particuliers, les opérateurs du milieu social n’agissent pas comme des entreprises sur un marché. Dans ce cas, le droit de la concurrence ne leur est pas applicable. La solidarité, objectif poursuivi par la sécurité sociale, est le point d’ancrage de cette exception. La solidarité permet de tenir à l’écart l’organisation de la protection sociale des règles du jeu du marché normalement applicables aux entreprises.
C’est dans ce contexte que le monopole des régimes de sécurité sociale a été protégé par la CJUE, qui a rejeté les demandes fondées par des assurés ou par des compagnies d’assurances sur la violation du droit de la concurrence. En effet, si la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement, elle ne saurait s’étendre à des organismes qui exercent une fonction à caractère exclusivement social, telle que l’activité des caisses de maladie ou des organismes qui concourent à la gestion du service public de la sécurité sociale, fondée sur le principe de solidarité nationale et dépourvue de tout but lucratif. Le système d’affiliation obligatoire est considéré comme indispensable à l’application du principe de la solidarité ainsi qu’à l’équilibre financier des régimes. Dès lors que l’activité n’est pas économique au sens du droit communautaire, il ne peut y avoir violation des règles du droit des ententes ou du droit des abus de position dominante (1).
La Cour de justice a écarté toutes autres tentatives de contester les monopoles existant en matière de gestion de la sécurité sociale. Elle a refusé d’admettre que le monopole institué par la législation française en matière d’assurances sociales est contraire à la directive n° 92/49/CEE du 18 juin 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe autre que l’assurance sur la vie (2). Il a également été jugé que des groupements de caisses de maladie ne constituent pas des entreprises ou des associations d’entreprises lorsqu’ils établissent des montants fixes maximaux correspondant à la limite maximale du prix des médicaments pris en charge par les caisses de maladie (3).
De même, le système national de santé espagnol fonctionne conformément au principe de solidarité dans son mode de financement par des cotisations sociales et autres contributions étatiques et dans sa prestation gratuite de services à ses affiliés sur la base d’une couverture universelle. Il s’ensuit que les organismes qui en assurent la gestion n’agissent pas en tant qu’entreprises lorsqu’ils achètent le matériel sanitaire vendu par les entreprises membres de l’association requérante aux fins d’offrir des services de santé gratuits aux affiliés du système national de santé (4).


B. LES AIDES D’ÉTAT

Les aides d’Etat sont susceptibles de fausser le jeu normal de la concurrence. C’est pourquoi elles sont suspectes : « sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » (TFUE, art. 107).


I. La notion d’« aide d’etat »

La notion d’« aide d’Etat » est entendue de manière large, ce qui permet de couvrir de multiples formes d’aide : allégement ou dégrèvement de cotisations sociales, exonération de pénalités pour non-paiement des cotisations sociales, prêts sans intérêts, etc. Les aides d’Etat sont accordées directement non seulement par les Etats membres, mais aussi par tous les organismes (collectivités locales, établissements publics, etc.) qui distribuent des aides à partir de fonds publics.
La notion d’« aide d’Etat » est plus générale que celle de « subvention », parce qu’elle comprend non seulement des prestations positives telles que les subventions elles-mêmes, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d’une entreprise et qui, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques.
Il y a aide d’Etat si l’avantage est sélectif ; il revient ainsi au juge de vérifier si l’aide entraîne des avantages au bénéfice exclusif de certaines entreprises ou de certains secteurs d’activité. Pour qu’il y ait aide d’Etat, il faut que l’entreprise bénéficiaire reçoive un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché.


II. Les aides à caractère social

Les aides étatiques peuvent échapper à la censure communautaire lorsqu’elles répondent à certains objectifs. Sont compatibles avec le marché intérieur les aides à caractère social octroyées aux consommateurs individuels ainsi que les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires (TFUE, art. 107).
Peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi ou encore les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun. Dans le cadre des exceptions permises, peuvent être autorisées des aides d’Etat sectorielles ou des aides d’Etat horizontales. Par exemple, il existe des lignes directrices pour les aides d’Etat à la formation, pour les aides d’Etat en faveur de l’emploi ou pour les aides d’Etat à finalité régionale.


III. Les compensations de service public

Dans un important arrêt, la Cour de justice a considéré que les compensations de service public accordées à des entreprises privées ne constituent pas des aides d’Etat si quatre critères cumulatifs sont remplis :
  • l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public clairement définies ;
  • les paramètres sur la base desquels la compensation est calculée doivent être préalablement établis de façon objective et transparente ;
  • la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable ;
  • lorsque le choix de l’entreprise chargée de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant la sélection du candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée, aurait encourus (5).


(1)
CJCE, 17 février 1993, aff. C-159/91 et C-160/91, Poucet et Pistre.


(2)
CJCE, 26 mars 1996, aff. C-238/94, Garcia.


(3)
CJCE, 16 mars 2004, aff. C-264/01, AOK Bundesverband.


(4)
TPICE, 4 mars 2003, aff. T-319/99, Fenin c/ Commission et CJCE, 11 juillet 2006, aff. C-205/03 P, Fenin/ Commission.


(5)
CJCE, 24 juillet 2003, aff. C-280/00, Altmark.

SECTION 3 - LA RÉALISATION DU MARCHÉ INTÉRIEUR

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