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Les discriminations en raison de la race et de l’origine ethnique

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[Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, article 19 ; Charte des droits fondamentaux, article 21 ; directive 2000/43/CE du 29 juin 2000, JOUE L. 180 du 19-07-00]
Les discriminations fondées sur la race ou l’origine ethnique ne sont combattues par l’Union européenne que depuis 1999 (traité d’Amsterdam). Cette politique est cependant rendue malaisée dans son application en raison du fait que les termes clés, « race » et « origine ethnique », ne sont pas définis. Le seul fait, d’ailleurs, que le droit de l’Union fasse référence au concept de « race » peut faire débat.


A. LES PRINCIPES DIRECTEURS



I. Le cadre général

La directive 2000/43/CE s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne :
  • les conditions d’accès à l’emploi aux activités non salariées ou au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion ;. l’accès à tous les types et à tous les niveaux d’orientation professionnelle, de formation professionnelle, de perfectionnement et de formation de reconversion, y compris l’acquisition d’une expérience pratique ;
  • les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ;
  • l’affiliation et l’engagement dans une organisation de travailleurs ou d’employeurs ou à toute organisation dont les membres exercent une profession donnée, y compris les avantages procurés par ce type d’organisation ;
  • la protection sociale, y compris la sécurité sociale et les soins de santé ;
  • les avantages sociaux ;
  • l’éducation ;
  • l’accès aux biens et services et la fourniture de biens et services, à la disposition du public, y compris en matière de logement.


II. Des discriminations au harcèlement discriminatoire

La directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 est relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique.
Elle prohibe les discriminations directes qui se produisent lorsque, pour des raisons de race ou d’origine ethnique, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable. Une discrimination est indirecte lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires.
Le harcèlement est considéré comme une forme de discrimination lorsqu’un comportement indésirable lié à la race ou à l’origine ethnique se manifeste, qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. Tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination à l’encontre de personnes pour des raisons de race ou d’origine ethnique est considéré comme une discrimination.


III. Les justifications des différences de traitement

Pour justifier une différence de traitement, la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 utilise le concept d’exigence professionnelle essentielle et déterminante : les Etats membres peuvent prévoir qu’une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée à la race ou à l’origine ethnique ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée.
Autre voie de justification, les actions positives : pour assurer la pleine égalité dans la pratique, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas un Etat membre de maintenir ou d’adopter des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés à la race ou à l’origine ethnique.


IV. Les aménagements procéduraux

Pour garantir l’effectivité de la directive, les Etats membres veillent à ce que des procédures judiciaires et/ou administratives, y compris, lorsqu’ils l’estiment approprié, des procédures de conciliation, visant à faire respecter les obligations découlant de la directive soient accessibles à toutes les personnes qui s’estiment lésées par le non-respect à leur égard du principe de l’égalité de traitement, même après que les relations dans lesquelles la discrimination est présumée s’être produite se sont terminées. Les Etats membres veillent à ce que les associations, les organisations ou les personnes morales qui ont un intérêt légitime à assurer que les dispositions de la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 sont respectées puissent, pour le compte ou à l’appui du plaignant, avec son approbation, engager toute procédure judiciaire et/ou administrative prévue pour faire respecter les obligations découlant de la directive.
En matière de charge de la preuve, les Etats membres prennent les mesures nécessaires, conformément à leur système judiciaire, afin que, dès lors qu’une personne s’estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l’égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou une autre instance compétente, des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe de l’égalité de traitement. Enfin, les Etats membres introduisent dans leur système juridique interne les mesures nécessaires pour protéger les personnes contre tout traitement ou toute conséquence défavorable en réaction à une plainte ou à une action en justice visant à faire respecter le principe de l’égalité de traitement.


B. LEUR MISE EN ŒUVRE

La Cour de justice n’a été saisie qu’à une seule reprise sur l’interprétation de la directive 2000/43. Le litige concernait le directeur d’une société belge, qui avait fait des déclarations publiques selon lesquelles il ne pouvait embaucher des salariés d’une certaine origine ethnique (« allochtones ») en raison de l’opposition de ses clients à leur donner accès à leur domicile pour la réalisation des travaux. L’équivalent belge du Défenseur des droits a saisi les juridictions du travail pour faire constater que l’entreprise appliquait une politique discriminatoire à l’embauche.
Pouvait-il y avoir une discrimination directe à l’embauche sans victime ? La réponse est positive : « le fait pour un employeur de déclarer publiquement qu’il ne recrutera pas de salariés ayant une certaine origine ethnique ou raciale, ce qui est évidemment de nature à dissuader sérieusement certains candidats de déposer leur candidature et, partant, à faire obstacle à leur accès au marché du travail, constitue une discrimination directe à l’embauche au sens de la directive 2000/43 ». En effet, « l’existence d’une telle discrimination directe ne suppose pas que soit identifiable un plaignant soutenant qu’il aurait été victime d’une telle discrimination ». Cette solution serait alors conforme à l’objectif de la directive de « promouvoir un marché du travail favorable à l’insertion sociale » qui serait « difficilement atteint si le champ d’application de la directive 2000/43 était limité aux seules hypothèses dans lesquelles un candidat malheureux à un emploi s’estimant victime d’une discrimination directe aurait engagé des poursuites judiciaires à l’encontre de l’employeur » (1).
De son côté, la Cour de cassation a reconnu l’existence d’une discrimination en raison de l’origine dans une affaire où, entre deux salariés en contrat à durée déterminée (CDD), l’employeur avait recruté en CDI celui qui portait un patronyme à consonance française. L’employeur n’ayant pas été en mesure d’apporter les éléments objectifs sur lesquels son recrutement a été fondé, la discrimination a été établie (2).


(1)
CJCE, 10 juillet 2008, aff. C-54/07, Firma Feryn NV.


(2)
Cass. soc., 15 décembre 2011, n° 10-15873.

SECTION 2 - LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

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