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Les conditions de nationalité

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Les ressortissants des 28 Etats membres de l’Union européenne bénéficient de règles très favorables en matière de libre circulation. Ce principe de faveur découle de deux corps de règles de l’Union européenne : la libre circulation des travailleurs et le statut de citoyen de l’Union. Tandis que la libre circulation des travailleurs implique « l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des Etats membres, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail », la citoyenneté de l’Union confère « le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres » (TFUE, art. 20 § 2 a).
Ces droits sont susceptibles de s’étendre aux personnes unies aux travailleurs ou aux citoyens de l’Union par des liens familiaux ou de proximité personnelle, peu importe qu’elles n’aient pas la nationalité d’un Etat membre de l’Union. Ces droits, dits dérivés, contribuent à assurer l’efficacité (l’« effet utile », dans le vocabulaire communautaire) de la liberté de circulation conférée aux travailleurs et aux citoyens de l’Union.


A. LES RESSORTISSANTS DE L’ESPACE ÉCONOMIQUE EUROPÉEN ET DE LA SUISSE

Des ressortissants de certains Etats non membres de l’Union européenne sont placés dans une situation intermédiaire en vertu d’accords internationaux conclus avec l’Union européenne et ses Etats membres. La liberté de circulation des travailleurs couvre ainsi les ressortissants de l’Espace économique européen (EEE), espace qui s’étend à trois pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE), l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein. Réciproquement, en tant que zone de libre-échange dans laquelle est assurée la libre circulation, l’EEE permet aux ressortissants des 28 Etats membres de l’Union européenne d’accéder librement aux territoires de l’Islande, de la Norvège et du Liechtenstein et d’y travailler sans être discriminés en raison de la nationalité. Les règles de coordination des systèmes nationaux de sécurité sociale (cf. infra, § 3, B) s’appliquent également aux pays de l’EEE.
La Suisse, membre de l’AELE mais pas de l’EEE, bénéficie d’un régime particulier défini dans le cadre d’accords signés avec l’Union européenne. Entrés en vigueur le 1er juin 2002, ces accords ont été renouvelés au 1er juin 2009. L’accord sur la libre circulation des personnes, dit ALCP concerne la libre circulation des personnes et porte sur trois thèmes distincts :
  • la reconnaissance des diplômes et des qualifications acquises sur le territoire d’un Etat contractant afin de faciliter l’accès au marché du travail ;
  • la coordination des régimes de sécurité sociale ;
  • le droit d’entrée, de séjour, d’accès au marché du travail et de demeurer sur les territoires des Etats concernés aux salariés, travailleurs indépendants, retraités et étudiants.


B. LES RESSORTISSANTS D’ÉTATS TIERS : ACCORDS D’ASSOCIATION ET DE COOPÉRATION

Les ressortissants des autres pays non membres de l’Union européenne sont désignés sous l’expression « ressortissants d’Etats tiers ». Toutefois, ces étrangers ne sont pas tous placés dans la même situation au regard des règles de libre circulation à l’intérieur de l’Union européenne et, surtout, en matière de droits sociaux. L’Union européenne a en effet compétence pour conclure des accords internationaux, seule ou conjointement avec les Etats membres, avec des pays extérieurs à l’Union européenne. Ces accords couvrent des domaines variés, dont les droits sociaux.


I. Les accords d’association

a. Les accords d’association préparatifs à l’adhésion à l’Union européenne

Une première catégorie d’accords, intitulés « accords d’association », a pour objet de préparer une adhésion à l’Union européenne. Il s’agit des accords les plus approfondis. La Turquie est dans ce cadre liée à l’Union européenne par un accord d’association depuis 1963. Cet accord confère aux ressortissants turcs de nombreux droits sociaux dans l’Union européenne.
Un exemple significatif de la portée concrète de ces accords a été donné par la Cour de cassation en matière d’allocations familiales. Elle a jugé qu’« en application de l’article 3 § 1, de la décision 3/80 du conseil d’association CEE-Turquie du 19 septembre 1980, relative à l’application des régimes de sécurité sociale des Etats membres des Communautés européennes aux travailleurs turcs et aux membres de leur famille, applicable aux prestations familiales aux termes de son article 4, l’absence de toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d’application de cette décision implique qu’un ressortissant turc visé par cette dernière soit traité de la même manière que les nationaux de l’Etat membre d’accueil, de sorte que la législation de cet Etat membre ne saurait soumettre l’octroi d’un droit à un tel ressortissant turc à des conditions supplémentaires ou plus rigoureuses par rapport à celles applicables à ses propres ressortissants » (1). La Cour de cassation en déduit que l’application des articles L. 512-2, D. 512-1 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale qui, en ce qu’ils soumettent le bénéfice des allocations familiales à la production d’un document attestant d’une entrée régulière des enfants étrangers en France et, en particulier pour les enfants entrés au titre du regroupement familial, du certificat médical délivré par l’Office français de l’intégration et de l’immigration, instituent une discrimination directement fondée sur la nationalité.
Plus généralement, les accords d’association avec les pays tiers contiennent un volet social développé, principalement pour les questions relevant de l’accès à l’emploi, des conditions de travail et de la protection sociale. Les dispositions sociales de ces accords produisent, pour certaines, un effet direct et peuvent donc être invoquées par un justiciable devant un juge national. Les accords comportent toutefois une limite importante : ils ne donnent pas aux ressortissants de ces pays un droit d’accès au territoire des pays de l’Union européenne. En d’autres termes, les Etats membres de l’UE demeurent maîtres des conditions dans lesquelles il est possible pour ces personnes d’entrer et de séjourner sur leur territoire national, sous réserve toutefois du respect des règles relatives à la politique communautaire d’immigration (cf. infra, section 4).

b. Les autres accords d’association

D’autres accords sont moins approfondis. Ils comportent parfois un volet social qui a des conséquences très importantes sur les droits en matière de protection sociale. Les dispositions sociales de ces accords ont pour la plupart un effet direct et peuvent donc être invoquées par un justiciable devant le juge national. Les ressortissants de ces pays tiers bénéficient ainsi de conditions favorables leur permettant de prétendre au régime de protection sociale et aux prestations sociales correspondantes du pays de l’Union dans lequel ils travaillent ou sont assurés sociaux, avec possibilité de maintien des droits lorsqu’ils retournent dans leur pays d’origine de manière temporaire ou définitive. Parmi les pays concernés, on trouve notamment les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie, Algérie). Ces accords sont susceptibles d’avoir des effets concrets sur les droits des intéressés.
En application de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et l’Algérie, il a été jugé que, pour ce qui concerne le droit aux prestations familiales, « l’application des articles L. 512-2, D. 512-1 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale qui, en ce qu’ils soumettent le bénéfice des allocations familiales à la production du certificat médical délivré par l’Office français de l’intégration et de l’immigration à l’issue de la procédure de regroupement familial, instituent une discrimination directement fondée sur la nationalité, devait être écartée » lorsque le demandeur est de nationalité algérienne (2).


II. Les accords de partenariat et de coopération

Des accords de partenariat et de coopération, conclus avec les républiques issues de l’ex-bloc soviétique (Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Russie, Ukraine, etc.) contiennent des dispositions à plus faible portée juridique. Ils prévoient une coopération dans le domaine social, l’objectif étant d’aider ces pays, par un système d’aide technique (mise à disposition d’experts, financement de programmes de travail), à réformer leur système de protection sociale. Ces mesures n’ont pas d’impact concret sur les droits des étrangers concernés, qui sont donc traités comme des ressortissants d’Etats tiers « classiques ».


(1)
Cass. ass. plén., 5 avril 2013, n° 11-18947.


(2)
Cass. ass. plén., 5 avril 2013, n° 11-17520.

SECTION 1 - LA LIBRE CIRCULATION À L’INTÉRIEUR DE L’UNION EUROPÉENNE

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