La loi de finances pour 2010 (1) a mis en place un mécanisme destiné à accroître l’autonomie des jeunes. Le fonds d’appui aux expérimentations en faveur des jeunes peut financer, à titre expérimental, pour une durée de trois ans, un revenu contractualisé d’autonomie. Le revenu contractualisé d’autonomie est une aide financière destinée aux jeunes à la recherche d’un premier emploi. Il fait l’objet d’une expérimentation de deux ans depuis janvier 2011, afin de mesurer les effets de l’allocation d’un revenu garanti, pendant une durée déterminée, sur le parcours d’insertion professionnelle d’un jeune. Le revenu contractualisé d’autonomie doit concerner 5 500 jeunes volontaires au plus.
Le dispositif se décline en deux volets :
- un volet destiné aux jeunes en insertion accompagnée par les missions locales (revenu contractualisé d’autonomie [RCA - ML]) ;
- un volet destiné aux jeunes diplômés (niveau licence), inscrits depuis plus de six mois à Pôle emploi (RCA - JD).
Pour réaliser l’expérimentation, le ministère chargé de la jeunesse a lancé un appel à candidatures auprès des missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes situées dans des zones urbaines, dont des zones urbaines sensibles, des zones périurbaines et des zones rurales. Dans les 82 missions locales ayant été retenues pour mettre en œuvre l’expérimentation, des jeunes se voient proposer de mettre fin à leur CIVIS pour signer un contrat « revenu contractualisé d’autonomie ».
A. LE PUBLIC ÉLIGIBLE
[Décret n° 2011-128 du 31 janvier 2011, articles 2 et 3]
Sont éligibles à l’expérimentation :
- les jeunes de 18 ans à 22 ans révolus remplissant les conditions d’éligibilité du CIVIS inscrits dans les missions locales ayant répondu à l’appel à candidatures qui sont sélectionnées, de manière aléatoire, par l’organisme évaluateur compte tenu, d’une part, du nombre de missions locales participant à l’expérimentation et, d’autre part, des possibilités d’appariement ;
- les jeunes à la recherche d’un emploi stable, âgés de 18 à 23 ans révolus, titulaires au minimum d’un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d’une indemnisation. Le revenu contractualisé d’autonomie est proposé aux jeunes résidant dans des territoires présentant un intérêt particulier au regard de l’objet de l’expérimentation et de la situation des jeunes qui y résident, sélectionnés par le ministère chargé de la jeunesse.
Lorsqu’un enfant ouvrant droit aux allocations familiales participe à l’expérimentation de la dotation d’autonomie, le montant des allocations familiales dues à la famille est, pendant la durée de sa participation à l’expérimentation, réduit de manière forfaitaire. Dans ce cas, l’entrée dans l’expérimentation est subordonnée à l’accord de la famille.
B. LE MONTANT ET LE VERSEMENT DE L’ALLOCATION
[Décret n° 2011-128 du 31 janvier 2011, articles 4 et 7]
Le bénéficiaire du revenu contractualisé d’autonomie perçoit une allocation mensuelle dont le montant varie en fonction du montant de ses ressources mensuelles d’activité.
Sont considérées comme des ressources d’activité les rémunérations du travail, les indemnités de chômage, les allocations de formation, les indemnités de stage et les indemnités de formation professionnelle.
Le revenu contractualisé d’autonomie peut être versé pendant deux ans (jeunes faiblement qualifiés) ou un an (titulaires d’une licence) et cumulé partiellement avec un salaire. En revanche, dès que l’allocataire décroche un emploi à temps complet au SMIC, l’aide est supprimée.
Le revenu contractualisé d’autonomie est cumulable avec toute autre allocation ou aide perçue par le bénéficiaire à l’exception du revenu de solidarité active et des indemnités de service civique.
Les jeunes de 18 ans à 22 ans révolus remplissant les conditions d’éligibilité du contrat d’insertion dans la vie sociale participant à l’expérimentation perçoivent, lorsqu’ils ne disposent d’aucune ressource d’activité, une allocation d’un montant fixé à : 250 € la première année du contrat ; 240 € le premier trimestre de la deuxième année du contrat ; 180 € le deuxième trimestre de la deuxième année du contrat ; 120 € le troisième trimestre de la deuxième année du contrat ; 60 € le quatrième trimestre de la deuxième année du contrat.
Lorsque ces jeunes disposent de ressources d’activité, le montant maximal de cette allocation est diminué du montant des ressources d’activité multiplié par le montant maximal de l’allocation pour la période concernée divisé par 1 050 €.
Les jeunes à la recherche d’un emploi stable, âgés de 18 à 23 ans révolus, titulaires au minimum d’un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d’une indemnisation, participant à l’expérimentation perçoivent, lorsqu’ils ne disposent d’aucune ressource d’activité, une allocation d’un montant fixé à 250 € pendant toute la durée du contrat.
Lorsque ces jeunes disposent de ressources d’activité, le montant maximal de cette allocation est diminué du montant des ressources d’activité multiplié par le montant maximal de l’allocation divisé par 1 050 €.
Le bénéficiaire de l’allocation déclare chaque mois au représentant légal de l’opérateur chargé de l’accompagnement au nom de l’Etat (ou à toute personne dûment habilitée par celui-ci) le montant des ressources d’activité éventuellement perçues durant le mois. Il certifie la sincérité des informations communiquées et s’engage à procéder à leur actualisation lorsque la perception de ces ressources d’activité est postérieure à la date du calcul du montant de l’allocation.
L’allocation est versée mensuellement et à terme échu, au nom de l’Etat, par l’Agence de services et de paiement.
C. LE STATUT DU JEUNE
[Décret n° 2011-128 du 31 janvier 2011, article 5]
Le régime varie selon l’appartenance des jeunes à l’un des deux ensembles :
- pour les jeunes de 18 ans à 22 ans révolus remplissant les conditions d’éligibilité du CIVIS : ils disposent des mêmes droits et sont astreints aux mêmes devoirs que les bénéficiaires du CIVIS mis en œuvre par les missions locales pendant la durée du contrat ;
- pour les jeunes à la recherche d’un emploi stable, âgés de 18 à 23 ans révolus, titulaires au minimum d’un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d’une indemnisation : ils bénéficient d’un accompagnement spécifique prescrit par Pôle emploi. Ils disposent de la protection sociale et sont astreints aux devoirs attachés à leur statut de demandeurs d’emploi pendant la durée du contrat.
D. L’OBJET ET LA DURÉE DU CONTRAT
[Décret n° 2011-128 du 31 janvier 2011, article 6]
Un contrat est conclu entre le bénéficiaire du revenu contractualisé d’autonomie et l’opérateur chargé de l’accompagnement au nom de l’Etat. Il définit le projet professionnel du jeune, les modalités de son accompagnement et les principales étapes de son parcours vers l’emploi. Il prévoit les engagements du bénéficiaire du revenu contractualisé d’autonomie ainsi que ceux de l’opérateur, en vue de son insertion professionnelle en contrepartie du versement de l’allocation.
Le contrat est conclu pour une durée de :
- deux ans avec les jeunes de 18 ans à 22 ans révolus remplissant les conditions d’éligibilité du CIVIS ;
- de un an avec les jeunes à la recherche d’un emploi stable, âgés de 18 à 23 ans révolus, titulaires au minimum d’un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d’une indemnisation.
Le contrat prend fin :
▸ en cas de manquement de son bénéficiaire à ses engagements contractuels, en particulier en cas de non-présentation sans motif légitime aux rendez-vous fixés par l’opérateur chargé de l’accompagnement ou de refus sans motif légitime des offres de formation ou d’emploi proposées par le référent et correspondant au projet professionnel défini par le contrat. Dans ce cas, après avoir invité l’intéressé à fournir ses explications, le représentant légal de l’opérateur chargé de l’accompagnement du jeune procède à la rupture du contrat, dûment motivée et la notifie par courrier recommandé avec avis de réception au bénéficiaire de l’accompagnement dans les cas suivants :
- lorsque le jeune change de domicile pour résider dans un territoire non couvert par l’expérimentation,
- si le jeune met fin au contrat par écrit adressé au signataire du contrat au nom de l’Etat,
- si le changement de situation du jeune le rend éligible au revenu de solidarité active en cours d’expérimentation.
E. LE BILAN DE L’EXPÉRIMENTATION
L’expérimentation a bénéficié à 276 jeunes à la recherche d’un emploi stable, âgés de 18 à 23 ans révolus, titulaires au minimum d’un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d’une indemnisation (RCA - JD).
L’expérimentation s’est déroulée sur six sites : Lille, La Défense, Montreuil, Lyon, Marseille et Toulouse.
L’évaluation du RCA - JD repose sur une analyse détaillée de la mise en œuvre du dispositif et de sa perception par les jeunes allocataires et les acteurs de terrain. Les évaluateurs ont souligné l’intérêt de la démarche d’accompagnement vers l’emploi des jeunes diplômés mais également la nécessité de définir plus précisément les contours d’une telle démarche. L’évaluation a montré que le dispositif n’atteint pas totalement sa cible à cause de critères d’éligibilité trop restrictifs. L’allocation est plutôt perçue comme une aide à la recherche d’emploi que comme un revenu permettant d’accéder à l’autonomie (cf. encadré).
Le bilan de l’expérimentation du Rca pour les jeunes diplômés
Le Centre de recherche en économie de Grenoble a rendu, en mai 2013, son rapport d’évaluation sur l’expérimentation du revenu contractualisé d’autonomie pour les jeunes diplômés (RCA - JD).
Les auteurs du rapport relèvent que la mise en œuvre de l’accompagnement renforcé est appropriée lorsque le jeune diplômé ne parvient pas à trouver un emploi après quelques mois de recherche infructueuse. De même, le ciblage sur des jeunes en difficulté paraît judicieux, même si les critères d’éligibilité et les processus de repérage devraient évoluer afin d’en toucher un plus grand nombre.
Sur l’allocation, le rapport montre qu’elle a facilité la recherche d’emploi, mais a aussi contribué plus largement aux dépenses du quotidien et à la prise d’indépendance vis-à-vis de la famille. Les appréciations portées sur son montant sont nuancées. Elles varient selon les représentations de ses finalités. Elle est tout d’abord perçue comme une aide à la recherche d’emploi, et au vu de cette finalité le montant est jugé tout à fait correct. Ses usages pour les dépenses du quotidien confirment que le RCA - JD est bien l’ébauche d’un « revenu d’autonomie », forme de RSA pour les jeunes et pas seulement une aide à la recherche d’emploi.
En tant que revenu, les jugements recueillis dépendent des situations personnelles des jeunes, selon qu’ils vivent chez leurs parents ou qu’ils ont « décohabité » pour vivre seuls ou en couple. Ils dépendent aussi des ressources des jeunes. L’allocation est le plus souvent vue comme un complément de ressources satisfaisant pour des jeunes vivant chez les parents ou soutenus par ces derniers, cas qui semble le plus fréquent parmi les bénéficiaires.
Mais l’allocation souffre d’un caractère faiblement redistributif : versée sans conditions de ressources elle profite en effet parfois à des jeunes qui n’en avaient pas besoin et l’ont épargnée.
Dans une perspective de généralisation, il conviendrait, pour les auteurs du rapport, de clarifier les finalités d’un tel dispositif, plus particulièrement au regard du type de difficultés auxquelles il apporte des solutions, difficultés financières ou difficultés d’insertion professionnelle.
(1)
Loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, article 138.