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LES MANDATAIRES JUDICIAIRES À LA PROTECTION DES MAJEURS

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Depuis le 1er janvier 2009, une profession unifiée, celle de « mandataire judiciaire à la protection des majeurs » est instaurée. En effet, c’est à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, qui peut être une personne physique ou morale, voire un « service » non doté de la personnalité juridique, que le juge des tutelles confiera l’exercice de la mesure de protection judiciaire prononcée, lorsque aucun membre de la famille ou aucun proche du majeur ne pourra l’exercer. C’est nécessairement un mandataire judiciaire à la protection des majeurs qui exerce la mesure d’accompagnement judiciaire.
Dans le cadre d’un mandat de protection future, le mandant peut également désigner, comme mandataire, une personne morale qui doit alors être inscrite sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (cf. supra, chapitre II, section 3, § 1, B, 1).


A. LES MISSIONS DU MANDATAIRE

[Code de l’action sociale et des familles, article L. 471-1]
La loi définit la mission de ces mandataires judiciaires à la protection des majeurs, que cette profession soit exercée par des services ou par des personnes physiques.
Selon l’article L. 471-1 du code de l’action sociale et des familles, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs sont les personnes qui exercent, « à titre habituel », les mesures de protection qui leur sont confiées par le juge dans le cadre de :
  • la sauvegarde de justice, dans la mesure seulement où le juge des tutelles aura estimé opportun de désigner un mandataire spécial à l’effet d’accomplir un ou plusieurs actes déterminés rendus nécessaires par la gestion du patrimoine de la personne protégée ;
  • la curatelle ;
  • la tutelle ;
  • la mesure d’accompagnement judiciaire.
Ainsi, cette appellation exclut l’ensemble des membres de la famille ou des proches de la personne protégée qui exerceront, par priorité, les mesures judiciaires de protection.
En revanche, la mission est suffisamment large pour permettre à des personnes exerçant par ailleurs une autre activité professionnelle d’être mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Selon les travaux parlementaires, « rien n’interdit donc qu’un avocat, un notaire ou un membre d’une profession médicale, par exemple, puisse exercer des mesures de protection », à condition de remplir les conditions d’exercice de cette profession (cf. infra, B). « En outre, en pratique, il y aura lieu de s’assurer que cette personne disposera bien, dans l’exercice de sa fonction de mandataire, de la disponibilité suffisante » (1).
Par ailleurs, selon l’article 480 du code civil, et dans le cadre du mandat de protection future, si le mandant désigne une personne morale pour exécuter le mandat, cette dernière doit être inscrite sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.


B. LES CONDITIONS D’EXERCICE DE LA PROFESSION

Plusieurs conditions sont nécessaires pour exercer la fonction de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.


1. SATISFAIRE À DES CONDITIONS D’ÂGE, DE MORALITÉ, DE FORMATION ET D’EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE

[Code de l’action sociale et des familles, articles L. 471-4, D. 471-3 et D. 471-4]
Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent satisfaire à des conditions de moralité, d’âge, de formation certifiée par l’Etat et d’expérience professionnelle.
Si le mandat judiciaire est confié à un service, ces conditions seront exigées des personnes physiques appartenant à ce service qui ont reçu délégation de celui-ci pour assurer la mise en œuvre de la mesure. Ce service doit, en outre, informer le représentant de l’Etat dans le département des méthodes de recrutement utilisées pour se conformer à ces exigences ainsi que des règles internes qu’il s’est fixées pour contrôler ses agents dans l’exercice de leur mission. Cette obligation est destinée à responsabiliser davantage les services tutélaires, et doit permettre de renforcer la surveillance du représentant de l’Etat dans le cadre du processus de désignation de l’agent de l’établissement.

a. Les conditions de formation...

Les intéressés doivent avoir suivi avec succès une formation complémentaire attestant des compétences nécessaires à l’exercice des fonctions de mandataire judiciaire (2). Pour pouvoir accéder à cette formation, les candidats doivent :
  • soit être titulaires d’un diplôme ou titre enregistré au niveau III du Répertoire national des certifications professionnelles (3) (ou, pour les ressortissants d’un autre Etat membre de l’Union européenne ou d’un autre Etat de l’Espace économique européen, d’un titre équivalent) ;
  • soit, le cas échéant, justifier d’une ancienneté d’au moins trois ans dans un emploi exigeant normalement un diplôme ou titre de ce niveau.

b. ... d’âge et d’expérience

Les conditions d’âge et d’expérience varient ensuite selon les cas suivants :
  • si le mandataire exerce son activité à titre individuel (cf. infra, section 2, § 2, A), il doit être âgé de 25 ans au minimum et justifier d’une expérience d’au moins trois ans dans l’un des domaines nécessaires à l’exercice des fonctions de mandataire judiciaire ;
  • si le mandataire exerce son activité en qualité de préposé d’un établissement dans lequel la personne protégée est accueillie (cf. infra, section 2, § 2, B), il doit être âgé de 21 ans au minimum et faire la preuve d’une expérience professionnelle d’une durée minimale de un an dans l’un des domaines nécessaires à l’exercice des fonctions de mandataire judiciaire. En outre, il doit être inscrit à la formation complémentaire dès sa déclaration (cf. infra, section 2, § 2, B, 3) et dispose de un an à compter de cette déclaration pour l’achever.
Lorsque le mandataire est une personne physique, qui a reçu délégation d’un service mandataire pour assurer la mise en œuvre de la mesure de protection des majeurs, il doit être âgé au minimum de 21 ans à son entrée en fonction et il dispose d’un délai maximal de deux ans à compter de son entrée en fonction au sein du service pour satisfaire aux conditions de formation requise.

c. La délivrance d’un certificat national de compétence

Le suivi avec succès de cette formation est ensuite attesté par la délivrance d’un certificat national de compétence de mandataire judiciaire. Il comporte deux mentions permettant l’exercice :
  • d’une part, des mesures de protection des ma-jeurs au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, ou de la tutelle ;
  • d’autre part, de la mesure d’accompagnement judiciaire.
Un arrêté a précisé l’agencement de cette formation, le contenu des enseignements, les conditions et modalités d’entrée en formation... (cf. encadré, p. 114).


2. ÊTRE INSCRIT SUR UNE LISTE DÉPARTEMENTALE

a. Le principe de l’inscription

[Code de l’action sociale et des familles, article L. 471-2]
Pour exercer leurs missions, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent être inscrits sur une liste dressée et tenue à jour par le représentant de l’Etat dans le département. Y figurent :
  • les services soumis à autorisation mettant en œuvre les mesures de protection des majeurs ordonnées par l’autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle ou de la tutelle ou de la mesure d’accompagnement judiciaire ;
  • les personnes physiques qui exercent à titre individuel et habituel les mesures de protection des majeurs ordonnées par l’autorité judiciaire et qui font l’objet d’un agrément ;
  • les agents désignés par un établissement accueillant des personnes âgées ou des personnes adultes handicapées en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.
Dès lors, le préfet de département centralise l’ensemble des informations.
L’effet pratique de cette unification des listes est de permettre à la direction départementale de la cohésion sociale d’instruire les demandes de l’ensemble des personnes physiques ou morales sollicitant l’exercice de la fonction de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.
Pour autant, le procureur de la République n’est pas évincé de la procédure d’établissement et de radiation des listes puisqu’il dispose d’un pouvoir d’avis conforme sur l’agrément des personnes physiques, agrément qui doit être préalable à l’inscription sur la liste (cf. infra, section 2, § 2, A, 1, a). De même, il intervient dans la procédure d’autorisation des services mettant en œuvre des mesures de protection des majeurs (cf. infra, section 2, § 1, A) et dans la procédure d’opposition à la déclaration d’un préposé d’un établissement (cf. infra, section 2, § 2, B, 4).

b. Le contenu de la liste

[Code de l’action sociale et des familles, article D. 471-1]
Les informations à inscrire sur la liste départementale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs sont précisées. Il s’agit :
  • du nom et des coordonnées du mandataire judiciaire à la protection des majeurs ;
  • du nom et des coordonnées :
    • de l’organisme gestionnaire si ces données sont différentes de celles du service mandataire à la protection des majeurs,
    • de l’établissement qui a désigné le mandataire judiciaire à la protection des majeurs en tant que préposé,
    • des établissements qui ont désigné le service mandataire pour exercer la mesure, en particulier par voie de convention (CASF, art. L. 472-5) ;
  • la catégorie de mesures de protection des majeurs pour lesquels le mandataire judiciaire à la protection des majeurs a reçu une habilitation.

LE CONTENU DE LA FORMATION COMPLÉMENTAIRE DES MANDATAIRES JUDICIAIRES

Le contenu de la formation complémentaire que doivent avoir suivi avec succès les personnes souhaitant exercer les fonctions de mandataire judiciaire à la protection des majeurs est fixé par un arrêté du 2 janvier 2009 qui a été validé par le Conseil d’Etat (4).
Chaque mention (mesure de protection juridique, d’un côté, mesure d’accompagnement judiciaire, de l’autre) est préparée par une formation complémentaire spécifique (art. 1).
UNE FORMATION THÉORIQUE ET PRATIQUE
Cette formation complémentaire comporte des enseignements théoriques et un stage pratique.
L’enseignement théorique – 300 heures dont 66 obligatoires pour la mention « mesure judiciaire à la protection des majeurs » et 180 heures dont 78 obligatoires pour la mention « mesure d’accompagnement judiciaire » – est organisé sous forme de modules de formation, regroupés en domaines de formation. Les compétences attendues par module de formation et les programmes de ces modules sont précisés dans les annexes I et II de l’arrêté, annexes qui détaillent les référentiels de formation attachés à chaque certificat.
La formation pratique se déroule sous la forme d’un stage, d’une durée de dix semaines consécutives (350 heures), réalisé auprès d’une personne physique ou d’un service inscrits sur les listes départementales des mandataires judiciaires à la protection des majeurs pour l’exercice des mesures correspondant à la formation complémentaire suivie (art. 2).
Des dispenses et allégements de formation – définis dans les référentiels de formation – peuvent être accordés aux candidats par l’établissement de formation au vu de leurs qualifications et expériences professionnelles (art. 3).
En tout état de cause, les professionnels qui ont validé la formation d’adaptation à l’exercice des fonctions de tuteur aux majeurs protégés, prévue par l’arrêté du 28 octobre 1988, bénéficient d’une dispense de tous les modules de la formation complémentaire préparant au certificat national de compétence de mandataire judiciaire mention « mesure judiciaire à la protection des majeurs », à l’exception de celui qui est intitulé « relation, intervention et aide à la personne » (art. 4).
Par ailleurs, les titulaires du certificat national de compétence aux fonctions de délégué à la tutelle aux prestations sociales prévu par l’arrêté du 30 juillet 1976 sont titulaires de droit du certificat national de compétence de mandataire judiciaire portant la mention « mesure d’accompagnement judiciaire », sous réserve de justifier avoir suivi le module intitulé « Les contours de l’intervention et ses limites » (art. 6).
Chaque domaine de formation est validé indépendamment des autres, sans compensation de notes. Un domaine de formation est validé lorsque tous les modules de ce domaine le sont.
Et la formation l’est lorsque tous les domaines de la formation sont validés. En cas de nonvalidation d’un domaine de formation, les validations obtenues pour les autres domaines restent acquises (art. 14).
LE DÉPÔT DU DOSSIER DE CANDIDATURE
Outre de remplir les conditions requises (cf. supra, 1, a), les candidats doivent, pour entrer en formation, présenter un dossier de demande en précisant le certificat national de compétence et la mention envisagée et indiquant, le cas échéant, les dispenses ou allégements de formation souhaités compte tenu de leurs parcours en joignant les justificatifs correspondants. Ce dossier doit notamment comporter :
  • un curriculum vitæ présentant de façon détaillée la trajectoire personnelle et professionnelle et incluant la formation initiale et continue ;
  • une ou des fiches de poste précisant les fonctions et activités exercées ;
  • les photocopies de tous les diplômes et de tous les documents relatifs aux conditions posées pour accéder à la formation.
Ce dossier doit être adressé à un établissement de formation ayant reçu délégation du préfet de région pour dispenser la formation complémentaire (art. 7). Pour obtenir cette délégation, l’établissement de formation doit répondre à certaines exigences. Il doit notamment s’engager à satisfaire aux conditions d’un cahier des charges figurant en annexe IV de l’arrêté.
La délégation est valable dix ans (art. 13).
Le directeur de l’établissement de formation établit avec chacun des candidats admis à suivre la formation un programme de formation individualisé au regard des dispenses ou allégements de formation qui lui ont été accordés.
[Arrêté du 2 janvier 2009, NOR : MTSA0900276A, JO du 15-01-09 ; circulaire DGCS/SD4A n° 2010-217 du 23 juin 2010, BO Santé- Protection sociale-Solidarités n° 2010/7]
Concrètement, l’ouverture après autorisation d’un service mandataire à la protection des majeurs (cf. infra, section 2, § 1, A), l’agrément d’une personne exerçant à titre individuel et la prise d’effet de la désignation d’un préposé valent inscription sur cette liste. Le préfet doit la notifier sans délai aux juridictions intéressées.
Parallèlement, le mandataire judiciaire à la protection des majeurs doit être informé de cette notification.


3. PRÊTER SERMENT

[Code de l’action sociale et des familles, articles L. 471-2 et R. 471-2]
Dans les six mois de leur inscription sur cette liste, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent prêter serment devant le tribunal d’instance du chef-lieu de département. Lorsque le mandataire judiciaire est inscrit sur plusieurs listes, la prestation de serment n’est effectuée que lors de la première inscription sur une liste.
Le serment est le suivant : « Je jure et promets de bien et loyalement exercer le mandat qui m’est confié par le juge et d’observer, en tout, les devoirs que mes fonctions m’imposent. Je jure également de ne rien révéler ou utiliser de ce qui sera porté à ma connaissance à l’occasion de l’exercice du mandat judiciaire. » Si le mandataire est un service, la prestation de serment est effectuée par toute personne physique appartenant à ce service qui a reçu délégation de celui-ci pour assurer la mise en œuvre d’un mandat judiciaire à la protection des majeurs dans les six mois suivant son recrutement. Si le service est autorisé dans plusieurs départements, la personne prête alors serment devant le tribunal d’instance du chef-lieu du département où est implanté le siège de l’organisme gestionnaire du service.


(1)
Rap. Sén. n° 212, de Richemont, février 2007, p. 256.


(2)
Sur la formation des mandataires judiciaires et la délivrance du certificat national de compétence, cf. André S., « Le défi de la formation pour les mandataires judiciaires », ASH n° 2628 du 16-10-09, p. 30.


(3)
Equivalent bac + 2.


(4)
Conseil d’Etat, 4 février 2011, requête n° 325886, consultable sur www.legifrance.gouv.fr

SECTION 1 - LES PRINCIPAUX ACTEURS

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