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LA DÉNONCIATION CALOMNIEUSE ET LA DÉNONCIATION MENSONGÈRE

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Les professionnels appelés à faire des signalements craignent parfois de se faire condamner sur des incriminations de dénonciation calomnieuse ou mensongère.


A. LA DÉNONCIATION CALOMNIEUSE

[Code pénal, articles 226-10 à 226-12]
La dénonciation calomnieuse est prévue à l’article 226-10 du code pénal : « La dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, d’un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l’on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu’elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l’employeur de la personne dénoncée, est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée. En tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci. »
Ainsi, pour que cette incrimination soit constituée, il est nécessaire que l’ensemble des éléments constitutifs de l’infraction, matériels et intentionnels soient réunis. Le premier élément matériel consiste à faire une dénonciation, qui peut être effectuée par tout moyen, dirigée contre une personne déterminée, d’un fait de nature à entraîner des sanctions. Le deuxième élément matériel nécessite que les faits dénoncés soient totalement ou partiellement inexacts. Mais c’est surtout l’élément intentionnel qui est important. Le plaignant doit faire la preuve que le dénonciateur, le jour de la dénonciation, connaissait la fausseté du fait dénoncé. Ainsi la charge de la preuve appartient en principe au plaignant. Comme exemple de dénonciation calomnieuse caractérisée, il est possible de citer l’arrêt n° 01-87294 de la chambre criminelle du 22 octobre 2002 (1) qui condamne sur ce fondement une grand-mère. Celle-ci avait fait dire à sa petite-fille que son beau-père avait commis des sévices sexuels sur elle : « au cours d’une audition par le juge d’instruction, les enfants ont déclaré que c’était leur grand-mère qui avait dit de dire des méchancetés et des mensonges sur A. Z. et qu’elle leur avait appris des choses par cœur, pour accuser A. Z. des choses sexuelles répercutées aussitôt aux services de police quatre jours après les faits dénoncés... ». La diffamation dans cette hypothèse est flagrante : la grand-mère n’ignorait pas le caractère mensonger des faits imputés au beau-père de la petite-fille au moment où elle a alerté les autorités.


B. LA DÉNONCIATION MENSONGÈRE

[Code pénal, article 434-26]
La dénonciation mensongère concerne les incriminations pénales portant atteinte à l’autorité de justice. Ainsi, « le fait de dénoncer mensongèrement à l’autorité judiciaire ou administrative des faits constitutifs d’un crime ou d’un délit qui ont exposé les autorités judiciaires à d’inutiles recherches est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende ».
Les conditions de l’incrimination sont contenues dans l’article 434-26 du code pénal. Contrairement à l’incrimination de dénonciation calomnieuse (cf. supra, A), il n’est pas exigé que l’inexistence des faits dénoncés ait été constatée par une décision judiciaire d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu devenue définitive.
Cette incrimination peut être utilisée concernant des signalements abusifs (2).


LES CONSÉQUENCES DES SANCTIONS PÉNALES SUR LE STATUT PROFESSIONNEL

Certaines sanctions pénales prononcées par les magistrats peuvent avoir des conséquences sur le statut professionnel et entraîner également des sanctions professionnelles de la part des employeurs (cf. A savoir aussi, p. 65).
S’agissant notamment des atteintes volontaires à l’intégrité de la personne ou des agressions sexuelles, les magistrats peuvent d’emblée aggraver les peines prévues par des peines complémentaires. Celles-ci peuvent notamment prendre les formes suivantes :
  • l’interdiction à titre définitif ou temporaire (cinq ans au maximum) d’exercer une fonction publique ou l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise (C. pén., art. 222-44 et 222-45, 2°) ;
  • l’interdiction des droits civiques, civils et de famille (dix ans au maximum pour un crime, cinq ans pour un délit) (C. pén., art. 222-45, 1°) ;
  • l’interdiction d’exercer, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs (C. pén., art. 222-45, 3°) ;
  • l’obligation d’accomplir un stage de citoyenneté (C. pén., art. 222-45, 4°) ;
  • l’obligation d’accomplir un stage de responsabilité parentale (C. pén., art. 222-45, 5°). Ces interdictions concernent uniquement les auteurs directs et ne peuvent pas être appliquées pour les infractions concernant la non-dénonciation de mauvais traitements infligés à un mineur de 15 ans. La Cour de cassation a cassé un arrêt qui avait condamné un directeur à un an d’emprisonnement avec sursis et trois ans d’interdiction des droits civils et de famille pour ce délit (3) ;
  • un suivi socio-judiciaire (10 ans pour un délit, 20 ans pour un crime) (C. pén., art. 131-36-1).
L’impact de ces sanctions pénales sur le statut professionnel des travailleurs sociaux n’est pas sans conséquence. Pour juger, un tribunal prendra toujours en considération la nature des fonctions exercées, et ce, même si les faits n’ont pas eu lieu pendant son service (4).
La loi rénovant l’action sociale et médico-sociale du 2 janvier 2002 a édicté des règles très strictes concernant les personnes destinées à exploiter, à diriger ou à travailler dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (CASF, art. L. 133-6). Est ainsi incapable d’exploiter, de diriger tout établissement, service ou structure, d’y exercer une fonction, à quelque titre que ce soit, ou d’être agréée, toute personne condamnée définitivement pour crime, ou condamnée pour les incriminations sur les atteintes à la personne humaine, notamment les atteintes à la vie, les atteintes à l’intégrité physique, la mise en danger d’autrui, les atteintes aux libertés de la personne, les atteintes à la dignité de la personne, les atteintes aux mineurs et à leur famille.


(1)
Cass. crim., 22 octobre 2002, n° 01-87294 ; Cass. soc., 28 octobre 2009, n° 08-40206, disponibles sur www.legifrance.gouv.fr


(2)
Cass. crim., 8 décembre 2009, n° 09-80156, disponible sur www.legifrance.gouv.fr


(3)
Cass. crim., 12 janvier 2000, Bull. crim., n° 393.


(4)
La révocation d’un cadre d’un établissement pour handicapés, pour cause d’attentat à la pudeur, est légitime, même si les faits ne sont pas liés à son activité professionnelle, Cass. soc., 21 mai 2002, ADAPEI, RDSS n° 1/2003, p. 120, note Elie Alfandari.

SECTION 3 - LA DÉFENSE JURIDIQUE DES SALARIÉS

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