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LES PRINCIPES DE LA RESPONSABILITÉ CONTRACTUELLE

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Toute personne peut décider librement de se lier par un contrat. Le non-respect d’une clause d’un contrat qui entraîne un dommage à l’un des cocontractants est susceptible dès lors d’engager la responsabilité contractuelle de l’autre.


A. LA NOTION DE CONTRAT

La définition du contrat est donnée par l’article 1101 du code civil : « Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. » Mais l’intérêt de la norme contractuelle précisée par la loi est avant tout - plutôt que de définir les objets et son champ laissés à la liberté des contractants - de donner un cadre et une sécurité formelle à la convention. L’article 1134 de ce même code ajoute que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » et qu’« elles doivent être exécutées de bonne foi ». Et l’article 1135 stipule que « les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ».


LA RESPONSABILITÉ DES SERVICES ET DES ÉTABLISSEMENTS POUR LES DOMMAGES CAUSÉS PAR LES USAGERS AUX SALARIÉS

Deux types de questions se posent. L’une concerne le régime de responsabilité à appliquer, responsabilité pour faute ou sans faute ; l’autre concerne la possibilité de recourir au droit commun de la responsabilité en complément ou en lieu et place du régime des accidents du travail.
LE RÉGIME APPLICABLE
Concernant le régime de responsabilité, le Conseil d’Etat et la Cour de cassation n’ont pas la même position. Le Conseil d’Etat estime que seul le régime de la faute est possible. Lorsque la victime des dommages est un agent contractuel du département, celle-ci ne peut rechercher la responsabilité de son employeur - le département - devant le juge administratif. Dans une affaire où une monitrice éducatrice avait été agressée par un mineur confié à l’ASE, le Conseil d’Etat a estimé que « la qualité d’employeur du département prévaut, pour les actions en réparation de cet accident du travail, sur celle de la personne chargée de la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur auquel cet accident est imputable ».
Dans ce cas de figure, il n’est donc pas possible d’engager la responsabilité sans faute du gardien (1). Alors que la Cour de cassation a admis cette possibilité (2).
LE RECOURS AU DROIT COMMUN DE LA RESPONSABILITÉ
Concernant la possibilité de compléter le régime des accidents du travail, une évolution importante s’est produite par ce même arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 24 mars 2009. Les salariés subissant des dommages pendant leur temps de travail sont en principe indemnisés par la sécurité sociale au titre des accidents du travail. En l’espèce, un éducateur travaillant dans un établissement géré par une association de sauvegarde est victime d’agressions perpétrées par quatre mineurs confiés au foyer d’accueil par décision judiciaire. L’éducateur intente une action civile en réparation à l’encontre des agresseurs et de son employeur alors que, conformément à l’article L. 451-1 du code de la sécurité sociale, aucune action civile en réparation des accidents du travail ne peut être exercée par la victime ou ses ayants droit conformément au droit commun. Toutefois, s’appuyant sur une exception prévue lorsque le préjudice est commis par un tiers, définie à l’article L. 454-1 du code de la sécurité sociale, la Cour de cassation estime en effet que « si l’action de l’employé victime d’un accident du travail est irrecevable à l’encontre de son employeur [...], ladite victime conservait la possibilité de demander réparation aux auteurs de l’accident, selon les règles du droit commun ».
Ainsi, si l’association ne peut être déclarée responsable en tant qu’employeur, elle pourrait l’être en tant que responsable civil des personnes dont elle avait la charge pour les fautes intentionnelles commises par ces dernières. Mais depuis cet arrêt, le Conseil constitutionnel a émis des réserves à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité (3). Il a conclu à la conformité des dispositions du régime « accident du travail » à la Constitution et au principe de responsabilité et d’égalité devant la loi. Cependant, en présence d’une faute inexcusable de l’employeur, les juridictions doivent vérifier que ce régime « ne conduise pas à une atteinte disproportionnée au droit des victimes ».
En toute hypothèse, l’employeur est toujours tenu d’une obligation de sécurité en cas d’accident du travail. Cependant, avant décembre 2011, afin de percevoir une indemnité complémentaire, le salarié devait toujours prouver une faute inexcusable de l’employeur. Il devait prouver que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il l’exposait et qu’il n’a pas pris de mesure de protection (4). Mais en décembre 2011, la chambre sociale de la Cour de cassation a admis qu’à défaut de pouvoir faire reconnaître l’existence d’une faute inexcusable, le salarié a la possibilité d’engager une action contre son employeur sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contractuelle (5).
Concernant la couverture des dommages, les salariés des établissements publics semblent privilégiés ; le Conseil d’Etat, après avoir appliqué les lois sur les pensions civiles prévoyant une indemnisation forfaitaire en cas d’incapacité de travail, accepte une indemnisation très favorable en l’absence de faute (possibilité d’indemnité complémentaire à raison des souffrances morales ou physiques et des préjudices esthétiques ou d’agrément, des troubles dans les conditions d’existence) et même intégrale en cas de faute, indemnisation pour assistance d’une tierce personne, pour aménagement de l’appartement de l’agent et pour préjudice de carrière (6).
Cette liberté est donc sous surveillance. Et le juge devra associer des obligations annexes à de nombreux contrats : l’obligation de sécurité, l’obligation d’information et de conseil et une certaine obligation d’équilibre. Par exemple, même si un contrat de transport ne comporte pas explicitement de clauses concernant la sécurité, le juge, du fait de l’existence du contrat, estimera que les cocontractants sont liés par de telles clauses. Il en est de même pour l’obligation d’information. Tout contrat d’hébergement et d’offre de services comporte une obligation d’information et de conseil. Ainsi, tous les actes engagés par l’établissement ou le service dans le cadre de la réalisation du contrat de séjour nécessitent une information préalable. De même, les obligations d’information concernant les prestations thérapeutiques ont été renforcées par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il existe également une protection implicite d’obligation d’équilibre contractuel. Le contrat doit être juste, équilibré. Par exemple le juge peut intervenir pour contrôler le prix, notamment s’il constate un abus dans sa fixation. Il peut même intervenir pour supprimer des clauses contraires à l’économie du contrat.
Ces contrats entre des personnes souvent vulnérables, par exemple les usagers de services sociaux et des professionnels prestataires de services, font l’objet de contrôles. La Commission des clauses abusives relève souvent de telles clauses réprimées par les articles R. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation. Les clauses sont dites abusives quand elles ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif à l’avantage du professionnel (C. consomm., art. L. 132-1, al. 1). Plusieurs recommandations de la Commission des clauses abusives visant à supprimer dans les contrats ces clauses peuvent être citées :
  • la recommandation du 5 juillet 1985 concernant les contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées (7) ;
  • la recommandation relative aux contrats proposés par certains établissements hébergeant des personnes âgées et non habilités à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale, complétant celle de 1985 (8) ;
  • la recommandation relative aux contrats de services à la personne du 15 mars 2012 (9). Ces activités de services se déroulent au domicile du client. Cette recommandation vise par exemple à supprimer de nombreuses clauses ayant pour objet de limiter la responsabilité des professionnels.
Concernant les questions de responsabilité, il existe deux types d’obligations : l’obligation de résultat et l’obligation de moyens.


B. L’OBLIGATION DE RÉSULTAT OU L’OBLIGATION DE MOYENS

L’obligation de sécurité peut être de résultat ou de moyens. Si une obligation est de résultat, le contractant s’oblige à obtenir le résultat déterminé. La responsabilité du débiteur est engagée sur la seule preuve que le fait n’est pas réalisé. Si l’obligation est seulement de moyens, le débiteur s’engage à appliquer ses soins et ses capacités. Pour le médecin par exemple, ces soins doivent être consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science (C. santé publ., art. R. 4127-32).
Ainsi il existe une obligation de résultat pour les transports et la restauration. L’exécution du contrat de transport comporte pour le convoyeur l’obligation de conduire le voyageur sain et sauf à destination. De même, le restaurateur a une obligation déterminée qui consiste à rendre le client sain et sauf à l’issue du repas. Si, pour la qualité gustative et digestive des mets servis, le restaurateur n’est tenu que d’une obligation de diligence ordinaire, en revanche, en ce qui concerne la sécurité du client, l’obligation contractuelle assumée est bien une obligation de résultat.
Pour les autres activités de loisirs et de sports, l’organisateur est tenu à une obligation de moyens. Il en est de même pour la surveillance : l’établissement social, en cas de contrat, a en général une obligation de moyens. Sa responsabilité ne peut être engagée qu’en cas de faute.
Dans le secteur social, le principe appliqué généralement par la jurisprudence est l’obligation de moyens. Mais il existe des exceptions, comme nous le verrons en étudiant les différents secteurs du champ social et médico-social.


C. LES CONDITIONS DE VALIDITÉ DU CONTRAT

[Code civil, article 1108]
Pour qu’une convention soit valide, quatre conditions sont exigées, à savoir :
  • le consentement de la partie qui s’oblige ;
  • sa capacité de contracter ;
  • un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
  • une cause licite dans l’obligation.


D. LES CONSÉQUENCES DE L’INEXÉCUTION CONTRACTUELLE

Le plus souvent, le non-respect d’une clause contractuelle se concrétise par le paiement de dommages et intérêts. « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part » (C. civ., art. 1147).


(1)
Conseil d’Etat, 22 juin 2011, n° 320744, disponible sur www.legifrance.gouv.fr


(2)
Cass. crim., 24 mars 2009, n° 08-85083, obs. JML RDSS, n° 6/2009, p. 1138.


(3)
Décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, JO du 19-06-10.


(4)
Cass. civ., 2e, 22 mars 2005, n° 03-20044, disponible sur www.legifrance.gouv.fr


(5)
Cass. soc., 7 décembre 2011, n° 10-22875, D. 12 janvier 2012.


(6)
Conseil d’Etat, 15 juillet 2004, n° 224276 ; Conseil d’Etat, 25 juin 2008, n° 286910 ; Conseil d’Etat, 5 mars 2008, n° 272447, disponibles sur www.legifrance.gouv.fr


(7)
Recommandation n° 85-03, BOCC, 4 novembre 1985.


(8)
Recommandation n° 08-02, BOCCRF, 23 avril 2008.


(9)
Recommandation n° 12-01, BOCCRF du 18 mai 2012.

SECTION 1 - LE DROIT COMMUN DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE ET ADMINISTRATIVE

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