Aux côtés du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse, un important secteur associatif habilité existe dans le dispositif de protection de l’enfance. Il intervient également dans le domaine éducatif propre à la prise en charge des mineurs délinquants.
A. UNE HABILITATION NÉCESSAIRE
[Code de l’action sociale et des familles, article L. 313-10 ; décret n° 88-949 du 6 octobre 1988, modifié en dernier lieu par le décret n° 2003-180 du 5 mars 2003, JO du 6-03-03; circulaire CRIM 2002-05 D du 26 février 2002, NOR : JUS D0230049C, BOMJ n° 86]
Les personnes physiques, les établissements, services ou organismes publics ou privés auxquels l’autorité judiciaire confie habituellement des mineurs doivent être habilités. Cette habilitation est délivrée, soit au titre de la législation relative à l’enfance délinquante (ordonnance du 2 février 1945), soit au titre de celle qui est relative à l’assistance éducative (C. civ., art. 375 à 375-9). Les autorisations sont spécifiques à chaque secteur et ne valent exclusivement que pour ce dernier. Cependant en pratique, la plupart des associations gérant les maisons d’enfants à caractère social ont une double habilitation, les deux habilitations étant délivrées simultanément par une même décision. Elles peuvent donc intervenir aussi bien auprès de mineurs délinquants que de mineurs en danger.
A noter :
seuls les centres éducatifs fermés, du fait de leur mission exclusivement pénale, ne peuvent être habilités qu’au titre de l’ordonnance de 1945.
1. LA PROCÉDURE
L’habilitation est demandée par l’association gestionnaire. Elle concerne un établissement ou un service qui a fait l’objet, au préalable, d’une autorisation de création par arrêté préfectoral ou par arrêté conjoint du préfet et du président du conseil général.
a. La demande...
[Décret n° 88-949 du 6 octobre 1988 modifié, article 2]
La demande doit être adressée au préfet du département par lettre recommandée avec avis de réception. Certaines mentions doivent obligatoirement y figurer, et notamment :
- la liste des différentes catégories de personnel, ainsi que le curriculum vitae et la copie des titres universitaires et diplômes scolaires et professionnels de chacun de ses membres ;
- la description des conditions de fonctionnement pédagogique, administratif et financier de l’établissement et l’indication de l’effectif maximal des mineurs et des jeunes majeurs pouvant être pris en charge ;
- dans le cas où la structure dispense sur place un enseignement général ou professionnel et reçoit des mineurs d’âge scolaire, la description de l’organisation de l’enseignement dispensé ou des conditions dans lesquelles les mineurs sont scolarisés.
b. ... et son instruction
[Décret n° 88-949 du 6 octobre 1988 modifié, articles 3 à 5]
Le préfet informe le président du conseil général de la demande et fait procéder à l’instruction du dossier par le directeur interrégional de la PJJ (DIR). Celui-ci doit obligatoirement prendre l’avis du juge des enfants et du procureur de la République (1)ainsi que celui de l’inspecteur d’académie de l’Education nationale, lorsque la structure dispense un enseignement général ou professionnel et dans tous les cas où elle reçoit des mineurs en âge d’être scolarisés. Les autorités consultées disposent d’un délai de deux mois pour donner leur avis. A l’expiration de ce délai, le DIR remet le dossier, en l’état, au préfet. Y est joint un projet de décision. Le préfet doit alors recueillir l’avis du président du conseil général. Il lui revient ensuite d’accorder l’habilitation par arrêté.
S’il n’a pas été statué par le préfet dans un délai de quatre mois à compter du dépôt de la demande d’habilitation, celle-ci est considérée comme rejetée.
A noter :
lorsque la demande vise à l’habilitation d’un centre éducatif fermé, le DIR prend en compte les conditions d’éducation et de sécurité et les modalités permettant d’assurer la continuité du service.
2. LE CONTENU
[Décret n° 88-949 du 6 octobre 1988 modifié, article 5]
L’arrêté du préfet précise les conditions de l’habilitation, à savoir, notamment :
- le nombre et la catégorie juridique des jeunes reçus ;
- leur âge et leur sexe ;
- les conditions d’éducation et de séjour.
L’habilitation vaut aussi pour l’application des dispositions du décret du 18 février 1975 qui permet aux majeurs de moins de 21 ans éprouvant de graves difficultés d’insertion sociale de bénéficier de la prolongation ou de l’organisation d’une action de protection judiciaire. Elle vaut également pour l’exercice du contrôle des obligations mises à la charge du jeune dans le cadre d’un contrôle judiciaire (cf. infra, chapitre IV, section 2, § 1, C, 4) ou dans le cadre d’un emprisonnement avec sursis (cf. infra, chapitre III, section 3, § 2, C et D).
3. LE RENOUVELLEMENT ET LE RETRAIT
[Décret n° 88-949 du 6 octobre 1988 modifié, articles 5 à 12]
L’habilitation vaut pour une durée de cinq ans, elle prend effet à la date de notification de l’arrêté du préfet. Tout projet pouvant avoir une incidence sur la nature ou sur le champ d’application de l’habilitation (modifiant la capacité, le régime de fonctionnement de la structure, les lieux où elle est implantée, les conditions de séjour et d’éducation des mineurs confiés) doit être signifié au directeur interrégional de la PJJ (2). Celui-ci en informe le préfet qui peut prendre soit un arrêté modificatif de l’habilitation, soit un arrêté mettant fin à celle-ci, après avis du juge des enfants, du procureur de la République ou du président du conseil général.
a. Le renouvellement
L’habilitation est renouvelable pour des périodes d’égale durée : la demande de renouvellement doit alors être adressée au préfet, au plus tard six mois avant la date d’expiration de l’habilitation. Elle est présentée et instruite dans les mêmes formes que la demande initiale (cf. supra, 1, a et b).
b. Le retrait
Lorsque des faits de nature à compromettre la mise en œuvre des mesures éducatives ou à porter atteinte aux intérêts des mineurs sont constatés, le préfet peut, à tout moment, retirer l’habilitation. Il doit alors procéder de la même manière que pour une demande d’habilitation, c’est-à-dire, notamment, confier l’instruction au DIR.
4. LE CONTRÔLE DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
Une fois acquise l’habilitation au titre de l’ordonnance de 1945, la PJJ conserve un droit de regard étroit sur le fonctionnement de l’association par le biais des procédures de tarification et de contrôle.
B. SON CHAMP D’INTERVENTION
Les associations habilitées par la protection judiciaire de la jeunesse, qui ont pour la plupart une seconde habilitation au titre de l’assistance éducative, prennent en charge beaucoup plus de mineurs à ce dernier titre. S’agissant des mineurs pris en charge au titre de l’enfance délinquante, alors que le secteur public de la PJJ assurait, en 2010, 149 685 mesures (investigation, milieu ouvert et placement), le secteur associatif n’en réalisait que 20 310, soit 13,5 %. Mais ce volume global est essentiellement constitué de mesures d’investigation et de milieu ouvert.
S’agissant plus spécifiquement des placements au titre de l’ordonnance de 1945, le secteur associatif habilité prend en charge plus de mineurs délinquants que le secteur public (respectivement 5 834 et 5 323), confirmant ainsi que la justice doit compter de plus en plus sur les centres éducatifs renforcés, les centres éducatifs fermés et autres structures associatives pour assurer les prises en charge les plus lourdes (cf. infra, chapitre III).
(1)
Ces avis sont notamment émis au vu du bulletin n° 2 du casier judiciaire de la personne ou des membres des organes de direction de l’organisme qui sollicite l’habilitation ainsi que de celui des personnels employés par la structure (ce bulletin n’est pas joint au dossier).
(2)
Il en est de même pour toute modification dans la composition des organes de direction et pour tout recrutement de personnel.