Une fois prononcée et devenue définitive, c’est-à-dire après épuisement des voies de recours, la peine ne peut être effective que si elle reçoit exécution. C’est la tâche du parquet et du juge des enfants faisant fonction de juge de l’application des peines, assisté pour cela par le service public de la PJJ.
A. LES PRINCIPES GÉNÉRAUX
Comme pour la plupart des mesures éducatives, le prononcé d’une peine ne met pas fin à l’action de la justice.
1. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE EST CHARGÉ DE L’EXÉCUTION DES PEINES
Lorsqu’un mineur a été condamné à une peine par le tribunal pour enfants, par le tribunal correctionnel pour mineurs ou par la cour d’assises des mineurs, il appartient au procureur de la République une fois la décision devenue définitive, c’est-à-dire après expiration des délais d’appel, de faire exécuter celle-ci (C. proc. pén., art. 707-1) et de la transmettre au service du casier judiciaire. S’il s’agit d’une peine d’amende, le procureur fait procéder à son recouvrement – dans la mesure du possible – par le Trésor public.
Si le mineur a été condamné à une peine de travail d’intérêt général, à un sursis avec mise à l’épreuve ou à toute autre mesure de probation le procureur saisit le juge des enfants pour la mise en œuvre de celle-ci.
S’il s’agit d’une peine d’emprisonnement ferme, et que le tribunal pour enfants a ordonné le maintien en détention ou l’exécution provisoire de la décision, il délivre l’ordre d’écrou à l’administration pénitentiaire à l’issue de l’audience.
Si le mineur a été condamné à une peine d’emprisonnement ferme n’excédant pas deux ans, ou un an en cas de récidive légale, mais laissé en liberté, il communique le dossier au juge des enfants qui a en principe quatre mois pour prendre une décision concernant un éventuel aménagement de cette peine.
2. LE JUGE DES ENFANTS EST CHARGÉ DE L’APPLICATION DE CERTAINES PEINES
[Code de procédure pénale, articles D. 49-45 à D. 49-53]
Saisi par le procureur de la République, il joue le rôle du juge de l’application des peines pour les mineurs condamnés à une peine restrictive de liberté (sursis avec mise à l’épreuve, travail d’intérêt général, suivi socio-judiciaire) ou privative de liberté (emprisonnement ferme).
Conformément au principe de juridictionnalisation de l’application des peines, le juge des enfants statue par jugement après un débat contradictoire c’est-à-dire une audience en présence du mineur, avec réquisitions du procureur et plaidoirie de l’avocat. Seule particularité procédurale, outre l’assistance obligatoire de l’avocat lors de ce débat, les parents doivent être entendus par le juge des enfants avant qu’il statue. Cette disposition peut lui permettre de les entendre avant le débat contradictoire, particulièrement si celui-ci se tient en établissement pénitentiaire, ou au cours de l’audience. Ces jugements sont susceptibles d’appel dans un délai de dix jours devant la chambre des mineurs de la cour d’appel, qui exerce pour les mineurs les attributions dévolues à la chambre de l’application des peines.
Pour d’autres décisions, notamment pour les mineurs incarcérés il statue par ordonnance, prise sans débat contradictoire préalable après avis du parquet et dans certains cas de la commission de l’application des peines (cf. infra, E). Ces décisions sont également susceptibles d’appel mais dans un délai de cinq jours, et devant le président de la chambre des mineurs qui statue également sans débat.
La transposition des règles de compétence territoriale des juges de l’application des peines a introduit une singularité pour les juges des enfants, qui peuvent être plusieurs à prendre des décisions concernant le même mineur. En effet, en cas d’incarcération, le juge territorialement compétent après la condamnation est celui du lieu de détention, et peut donc être différent de celui qui connaît habituellement la situation du mineur.
Dans cette hypothèse, et pour préserver une continuité de la prise en charge, une procédure de demande d’avis préalable voire de dessaisissement a été aménagée entre les différents juges compétents (C. proc. pén., art. D. 49-47 et D. 49-48).
LE BUREAU DE L’EXÉCUTION DES PEINES POUR LES MINEURS
Des bureaux d’exécution des peines (BEX) pour les mineurs, sur le modèle de ceux qui ont fait leurs preuves pour les majeurs, ont été créés à compter de 2007 afin de favoriser une meilleure exécution des décisions pénales prononcées par les tribunaux pour enfants. L’objectif est de permettre un accueil immédiat des intéressés après l’audience pour éviter toute perte de temps entre la décision et son exécution. Composé d’un personnel du greffe, et dans la mesure du possible d’un représentant de la protection judiciaire de la jeunesse et du service pénitentiaire d’insertion et de probation pour les condamnés majeurs au jour du jugement, ce bureau joue un rôle d’information et de convocation. Il informe ou rappelle au mineur et à ses civilement responsables les modalités d’exécution de la peine, par exemple les obligations ou modalités pratiques de la mise à l’épreuve, la possibilité de solliciter un aménagement de peine, le paiement de l’amende ou des dommages et intérêts. Il peut également informer la partie civile des modalités d’indemnisation, de ses voies de recours, ou l’orienter vers une association d’aide aux victimes.
Le BEX se charge en outre de remettre les convocations nécessaires au mineur et à ses civilement responsables soit devant le juge des enfants, soit devant le service compétent de la PJJ ou du SPIP si l’intéressé est majeur au jour de l’audience, pour que le suivi de la mesure de sursis avec mise à l’épreuve, de travail d’intérêt général ou de toute autre mesure supposant leur intervention s’exécute sans délai.
Préconisée par circulaire (1)et par un rapport parlementaire (2), l’extension de ces « BEX mineurs » à toutes les juridictions pour mineurs est toutefois limitée par la difficulté voire l’impossibilité matérielle d’y affecter du personnel, aux heures correspondant à celles des audiences, voire par des problèmes de locaux, sachant qu’il s’agit rarement d’une priorité pour les chefs de juridiction. Les informations restent donc largement communiquées par le tribunal, l’avocat et les éducateurs présents, et les convocations remises par le greffier d’audience.
B. AVANT ET APRÈS LA MAJORITÉ, QUEL JUGE ET QUEL SERVICE ÉDUCATIF COMPÉTENTS ?
[Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 modifiée, article 20-9]
A la différence des mesures éducatives qui, à l’exception de la mise sous protection judiciaire prennent fin le jour des 18 ans du condamné, certaines peines – notamment les sursis avec mise à l’épreuve, les peines d’emprisonnement, les mesures de suivi socio-judiciaire – peuvent perdurer au-delà, voire bien au-delà de la majorité.
En outre, il arrive fréquemment que ces peines soient prononcées par le tribunal pour enfants, par le tribunal correctionnel pour mineurs ou par la cour d’assises des mineurs alors que le prévenu ou l’accusé est déjà devenu majeur.
Pour permettre une transition relativement souple entre les intervenants spécialisés pour les mineurs d’une part (juge des enfants et services de la protection judiciaire de la jeunesse) et ceux qui sont chargés de l’application des peines pour les majeurs d’autre part (juge de l’application des peines et service pénitentiaire d’insertion et de probation), le législateur a prévu une compétence concurrente lors de la période qui se situe entre les 18 et les 21 ans du condamné. Le principe est celui d’une compétence du juge des enfants (JE) et de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) si la condamnation a été prononcée avant la majorité, et celle du juge de l’application des peines (JAP) et du service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) si elle a été prononcée après. De nombreuses exceptions permettent toutefois d’adapter le suivi aux caractéristiques de la situation.
Une fois saisi par le procureur de la République, le juge des enfants organise et contrôle la mise en œuvre des peines de travail d’intérêt général (TIG), de sursis-TIG, de sursis avec mise à l’épreuve, d’ajournement avec mise à l’épreuve, de suivi socio-judiciaire. L’exécution de ces mesures est confiée au secteur public de la PJJ. Le juge des enfants en sa qualité de juge de l’application des peines reçoit le mineur avec ses parents et lui notifie les obligations résultant de la condamnation prononcée, si cette formalité n’a pas été préalablement accomplie par le président de la juridiction de jugement.
[Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 modifiée, article 20-5 ; code pénal, articles R. 131-22 et suivants, R. 131-29 à R. 131-34]
a. Ses modalités d’exécution
Sur proposition de la protection judiciaire de la jeunesse, le juge des enfants fixe les modalités d’exécution du TIG (lieu, durée, horaires de travail) et les notifie au mineur de plus de 16 ans, en présence de ses parents. Préalablement à la mise en œuvre du travail d’intérêt général, le jeune doit se soumettre à un examen médical.
Le juge des enfants informe également le mineur des conséquences possibles de l’inexécution du TIG.
Le juge des enfants désigne le service de la PJJ pour mettre en œuvre le TIG et en suivre l’exécution, en lien avec le responsable technique de l’organisme au sein duquel la mesure s’exécute.
Dans le cas où le travail d’intérêt général a été prononcé en tant que peine principale, la violation par le condamné des obligations résultant de la peine de TIG est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende, avant application de l’excuse de minorité (C. pén., art. 434-42). Dans cette hypothèse, le parquet doit engager de nouvelles poursuites devant le tribunal pour enfants ou le tribunal correctionnel si l’intéressé est devenu majeur lors de la commission de cette nouvelle infraction.
Pour éviter ce processus relativement lourd, les articles 131-9 et 131-11 du code pénal prévoient la possibilité pour la juridiction qui condamne un prévenu à une peine de TIG de fixer également la peine maximale encourue en cas d’inexécution. Dans ce cas, le juge des enfants, ou le juge de l’application des peines après majorité, pourra mettre lui-même à exécution la peine prévue par la juridiction (après débat contradictoire). Lorsque le TIG est prononcé dans le cadre d’une peine d’emprisonnement avec sursis (« sursis-TIG »), les dispositions applicables en cas de non-respect des obligations sont les mêmes qu’en matière de sursis avec mise à l’épreuve.
2. LE SURSIS AVEC MISE À L’ÉPREUVE
[Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 modifiée, article 20-10 ; code pénal, article 132-40 ; code de procédure pénale, articles 474, 712-6, 712-8]
a. Les convocations et la désignation du service éducatif
[Code de procédure pénale, articles 474 et 741-1]
Afin de réduire le délai entre le prononcé de la mesure et l’effectivité du suivi, des réformes procédurales successives ont accéléré les modalités de notification et de convocation du mineur condamné à une mesure de sursis avec mise à l’épreuve.
Si le mineur comparaît, le président de la juridiction de jugement doit notifier dès l’audience les obligations résultant de la mise à l’épreuve ou du sursis-TIG. Une convocation lui est remise par le président d’audience ou par le bureau d’exécution pour qu’il se présente directement devant la PJJ, ou le SPIP s’il est devenu majeur, dans un délai maximal de 45 jours.
En cas d’absence de l’intéressé lors de l’audience, il appartient au juge des enfants de notifier les obligations de la mise à l’épreuve, en utilisant au besoin la force publique (remise de convocation par les services de police ou de gendarmerie, inscription au fichier des personnes recherchées, mandats d’amener ou mandat d’arrêt).
Il confie au service public de la PJJ le suivi de l’exécution de la mesure et le contrôle du respect des obligations. Toutefois, si le mineur est astreint à l’obligation de respecter les conditions d’un placement en centre fermé, et qu’il s’agit d’un établissement associatif habilité, le contrôle du respect de cette obligation peut être confié au directeur de l’établissement. La décision peut aussi être communiquée à un service de police ou de gendarmerie pour contrôle de certaines interdictions, comme l’interdiction d’entrer en relation avec la victime.
Si le mineur est incarcéré en application d’une peine mixte comportant pour partie un sursis avec mise à l’épreuve, il doit lui être remis avant sa libération une convocation devant la PJJ ou le SPIP dans un délai maximal de un mois à compter de son élargissement, voire de huit jours pour certaines infractions (C. proc. pén., art. 741-1).
b. Les modifications des obligations
[Code de procédure pénale, articles 739 à 747]
Tout au long du délai d’épreuve, le juge des enfants peut, par application de l’article 739 du code de procédure pénale, modifier les obligations particulières de la mise à l’épreuve. Il peut en supprimer ou en rajouter, qu’il s’agisse des obligations prévues pour les majeurs ou du respect de certaines mesures éducatives. Ces décisions modificatives sont prises par ordonnance motivée, sauf si le procureur de la République demande qu’elles fassent l’objet d’un jugement pris après un débat contradictoire. Qu’une audience se tienne ou non, les parents ou représentants légaux doivent être informés « par tout moyen » des modifications concernant les obligations de cette mise à l’épreuve par application de l’article 6-1 de l’ordonnance du 2 février 1945 issu de la loi du 10 août 2011.
Toute mesure de placement décidée par le juge des enfants au cours du délai d’épreuve doit faire l’objet d’une ordonnance distincte (C. proc. pén., art. D. 49-52) qui seule vaudra titre de placement pour l’établissement. Depuis la loi du 10 août 2011, le juge des enfants peut décider d’un placement en centre éducatif fermé qui n’aurait pas été prévu par la décision initiale de condamnation à un sursis avec mise à l’épreuve. En revanche, l’obligation de respecter un contrat d’admission en centre EPIDE ne peut pas être fixée par le juge postérieurement au jugement de condamnation (cf. supra, chapitre III, section 3).
Les mesures éducatives, et notamment le placement, qui sont associées à la mise à l’épreuve, ne peuvent perdurer au-delà du délai d’épreuve. Si un placement doit être poursuivi au-delà de l’expiration de ce délai, son maintien ne peut être décidé que sur le fondement d’une autre procédure pénale ou au titre de l’assistance éducative.
c. En cas de non-respect des obligations
[Code pénal, articles 132-47 à 132-51 ; code de procédure pénale, articles 745 à 747]
Le juge des enfants peut toujours convoquer le mineur pour un « recadrage », délivrer mandat d’amener si le mineur est localisé mais ne se présente pas aux convocations ou mandat d’arrêt s’il est en fuite. Il partage également avec le juge de l’application des peines un pouvoir redoutable, celui de délivrer un « ordre d’incarcération provisoire », prévu par l’article 712-19 du code de procédure pénale. Cette disposition permet de faire incarcérer immédiatement le mineur suivi au titre de la mise à l’épreuve pendant une durée pouvant aller jusqu’à 15 jours, avant même que soit tenu le débat contradictoire au cours duquel il sera statué sur une éventuelle révocation.
En cas de non-respect des conditions de la mesure éducative, le service chargé de la mesure doit en informer le juge des enfants et le procureur, aux fins de révocation éventuelle du sursis par le juge des enfants. Celui-ci doit être saisi de réquisitions de révocation au plus tard un mois après la fin du délai d’épreuve, faute de quoi la peine est dite « non-avenue » et le juge des enfants ne peut plus sanctionner le non-respect des obligations. Le juge des enfants est seul compétent pour révoquer, d’office ou sur réquisitions du parquet, le sursis avec mise à l’épreuve en cas de non-respect des obligations. La décision est prise à l’issue d’un débat contradictoire, au cours duquel sont entendus le procureur de la République en ses réquisitions, le mineur, son avocat et les parents, si ceux-ci n’ont pas été entendus préalablement. La révocation peut être totale ou partielle, et elle est exécutoire par provision, ce qui signifie qu’elle peut entraîner l’incarcération du mineur même si celui-ci fait appel.
Le juge des enfants peut également décider de prolonger le délai d’épreuve, le total ne pouvant excéder le maximum légal.
Le sursis avec mise à l’épreuve peut enfin être révoqué par le tribunal pour enfants, le tribunal correctionnel pour mineurs ou le tribunal correctionnel qui condamne le mineur pour une nouvelle infraction commise pendant le délai d’épreuve. Au préalable, le juge des enfants doit alors formuler un avis au vu d’un rapport de la PJJ sur le déroulement de la mesure.
Une fois révoquée, la peine d’emprisonnement est exécutoire par provision, c’est-à-dire qu’elle est mise à exécution, même en cas d’appel. Elle peut toutefois, si le juge des enfants et le parquet en sont d’accord, faire encore l’objet d’un aménagement si elle n’excède pas la durée de deux ans ou de un an en cas de récidive, selon les modalités prévues ci-après.
D. LA PROCÉDURE APPLICABLE AUX AMÉNAGEMENTS DE PEINE
1. POUR LES CONDAMNÉS LIBRES
[Code pénal, articles 723-15 à 723-18]
Lorsque la peine d’emprisonnement prononcée est aménageable et que l’intéressé est laissé libre à l’issue de l’audience, une convocation lui est remise pour se présenter devant le juge des enfants dans un délai fixé entre 10 et 30 jours. En cas d’absence du mineur, il appartient au parquet de lui faire notifier cette peine, pour être certain qu’il en ait connaissance, et passé le délai d’appel, de transmettre le dossier au juge des enfants pour appréciation d’un éventuel aménagement.
Le juge des enfants a quatre mois à compter de la communication du dossier par le procureur de la République ou du dépôt de la requête pour rendre une décision, faute de quoi la peine peut être mise à exécution, ou l’intéressé peut saisir directement la cour d’appel de sa demande (C. proc. pén., art. 723-15-2 et D. 49-33). Le parquet peut toutefois décider de mettre à exécution la peine d’emprisonnement sans attendre la décision du juge des enfants, mais uniquement en cas de nouvelle infraction contre les personnes ou les biens, en cas d’incarcération ou en cas de risque avéré de fuite du condamné (C. proc. pén., art. 723-16).
En cas d’absence de l’intéressé à cette convocation, le juge des enfants peut retourner immédiatement le dossier au procureur de la République pour mise à exécution de l’emprisonnement. Il peut faire de même si le mineur se présente mais que le juge estime qu’en raison de son profil aucun aménagement n’est envisageable. Toutefois, si une requête en aménagement est formalisée par le mineur ou son avocat (3), le juge des enfants est tenu d’audiencer la demande et de statuer lors d’un débat contradictoire.
Le service public de la PJJ, sous l’autorité du directeur territorial compétent, a pour les mineurs toutes les compétences attribuées au SPIP pour les majeurs en matière d’enquête préalable à l’aménagement de peine. Il est mandaté par le juge des enfants pour « rechercher les moyens propres à l’élaboration d’un projet d’aménagement de peine permettant l’individualisation de l’exécution de celle-ci » (C. proc. pén., art. D. 49-55). Dans ce cadre, l’éducateur chargé de la mesure rencontre le mineur et ses civilement responsables, évalue les possibilités d’un aménagement de peine adapté à sa personnalité, l’aide à formaliser sa demande. Il peut être amené à effectuer à domicile une enquête de faisabilité d’un placement sous surveillance électronique, qui tient compte des possibilités matérielles mais surtout de l’aptitude du mineur et de son entourage à respecter les contraintes de la mesure. Il donne son avis quant à l’opportunité de la mesure envisagée. Le juge des enfants peut lui demander de développer oralement son rapport écrit lors du débat contradictoire (C. proc. pén., art. D. 49-61).
Si le juge des enfants et le procureur de la République sont d’accord avec la demande d’aménagement formulée par le mineur, la mesure sollicitée peut être octroyée sans procéder à débat contradictoire. L’audience de jugement se tient dans les mêmes formes mais « sans débat », c’est-à-dire en l’absence du ministère public. En pratique, l’intérêt pédagogique de ce débat justifie généralement qu’il ait bien lieu.
QUELLE PLACE POUR LA PROCÉDURE SIMPLIFIÉE D’AMÉNAGEMENT DE PEINE (PSAP) ?
Afin de favoriser les aménagements de peine sans être tenu à la contrainte d’une audience, la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 (4)a prévu, pour les condamnés incarcérés uniquement, un examen systématique des situations ouvrant droit à un aménagement de peine. Elle a donné pour cela un pouvoir d’initiative important à la PJJ comme au SPIP.
Pour tout condamné à une peine allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement qui est dans les délais d’un aménagement, celui-ci doit être proposé « en temps utile » par le directeur interrégional de la PJJ ou le fonctionnaire délégué par lui, sauf en cas d’absence de projet sérieux d’insertion ou de réinsertion ou d’impossibilité matérielle de mettre en place une mesure d’aménagement. Dans ce cas une « non-proposition PSAP » doit être formalisée.
Après avoir recueilli l’accord de l’intéressé et l’avis écrit de ses civilement responsables, l’avis du juge des enfants qui connaît habituellement la situation du mineur et celui du chef d’établissement pénitentiaire, le directeur interrégional transmet la proposition d’aménagement de peine au procureur de la République. Si celui-ci estime que la proposition est justifiée, il la transmet au juge des enfants pour une simple homologation, ce magistrat a trois semaines pour accepter ou refuser, avec au besoin possibilité de modification des modalités d’exécution. A défaut de réponse dans ce délai de trois semaines, l’aménagement est accordé selon les modalités fixées par la PJJ et le parquet (C. proc. pén., art. D. 147-30-7).
Une telle procédure qui supprime l’audience et réduit considérablement le rôle du juge a eu peu de succès pour les majeurs, malgré le gros travail effectué par les SPIP pour transmettre les propositions ou non-propositions PSAP, du fait des réticences des magistrats du parquet comme du siège. Comme pour la surveillance électronique de fin de peine, il s’agit essentiellement d’une procédure conçue avant tout pour désengorger les établissements pénitentiaires, mais tenant peu compte des réalités pratiques, particulièrement pour les mineurs. Bien que ces dispositions leur soient applicables, elles ont très peu mobilisé la PJJ et les aménagements de peine qui restent prononcés pour les mineurs le sont, sauf exception, après la tenue d’une audience avec débat contradictoire, ou à tout le moins d’une audience sans débat.
A noter : il ne faut pas confondre la procédure simplifiée d’aménagement de peine avec la surveillance électronique de fin de peine (SEFIP), prévue comme modalités d’exécution des quatre derniers mois d’incarcération, qui n’est pas un aménagement de peine, (cf. supra, chapitre III, section 4, § 2).
2. POUR LES CONDAMNÉS DÉTENUS
[Code de procédure pénale, articles 723-19 à 723-27]
La procédure préalable à l’audience est la même que celle qui est prévue pour les condamnés libres. Il appartient à l’intéressé de faire une requête en aménagement de peine, soit par déclaration auprès du chef de l’établissement pénitentiaire, qui en pratique est transmise au greffe du juge des enfants par le greffe de l’établissement pénitentiaire, soit par l’intermédiaire de son avocat.
Le délai de quatre mois pour statuer sur la requête est également applicable. L’audience se tient en principe dans l’établissement pénitentiaire où est incarcéré le mineur, avec recours possible à la visioconférence. L’administration pénitentiaire y est alors représentée et donne également son avis.
AUDIENCE OU PAS ?
Les décisions les plus importantes en matière d’application des peines, rendues par jugement, exigent que, au préalable, se tienne une audience avec débat contradictoire, c’est-à-dire avec comparution du mineur, en présence de son avocat, du parquet et d’un greffier. D’autres décisions, prises par simple ordonnance, ne nécessitent pas d’audience, ce qui n’empêche évidemment pas le juge des enfants de convoquer pour audition le mineur et ses représentants légaux.
Audience avec débat contradictoire : aménagement de peine (possibilité d’une audience sans débat si accord du parquet) ; retrait de l’aménagement de peine ; révocation du sursis avec mise à l’épreuve ou du sursis assorti de l’obligation d’effectuer un travail d’intérêt général, mise à exécution de la peine encourue en cas de non-exécution du travail d’intérêt général ou du non-respect du suivi socio-judiciaire ; modification d’une de ces mesures si désaccord du parquet.
Ordonnance : mesure provisoire de suspension (pour un aménagement de peine) ou d’incarcération provisoire (pour non-respect d’une mesure restrictive de liberté) en attente du débat contradictoire ; modification d’une de ces mesures si accord du parquet.
Ordonnance après avis de la commission des peines : permission de sortir, autorisation de sortie sous escorte, réduction de peine supplémentaire, retrait de crédit de réduction de peine.
E. LES DÉCISIONS RELEVANT D’UN AVIS DE LA COMMISSION DE L’APPLICATION DES PEINES
Pour les mineurs condamnés écroués, des décisions importantes relèvent du juge des enfants sans pour autant faire l’objet d’audience avec ou sans débat contradictoire, mais soumises en principe à l’avis préalable d’une commission. Il s’agit des décisions de retrait de crédit de réduction de peine, infligées en cas de mauvaise conduite du condamné en détention, ou au contraire octroyant des réductions supplémentaires de peine, accordées au condamné qui manifeste « des efforts sérieux de réadaptation sociale » (cf. supra, chapitre III, section 4, § 1). De la même façon peuvent être accordées des permissions de sortir ou d’autorisation de sortie sous escorte.
Le juge des enfants statue par ordonnance, susceptible d’appel. Sauf cas d’urgence, il rend sa décision après avoir recueilli l’avis de la commission d’application des peines, qui se réunit dans l’établissement pénitentiaire, mais qui peut aussi transmettre les avis de ses membres au juge par écrit.
Lorsqu’elle examine la situation d’un mineur, la commission est présidée par le juge des enfants. La protection judiciaire de la jeunesse doit y être représentée par un de ses personnels éducatifs (C. proc. pén., art. D. 49-60). Comme pour les majeurs, en sont membres de droit le procureur de la République et le chef d’établissement. Elle est complétée par différents représentants de l’administration pénitentiaire, notamment un représentant de la direction de l’établissement et un représentant du personnel de surveillance, et éventuellement d’autres intervenants de la maison d’arrêt ou de l’établissement pénitentiaire pour mineurs, par exemple l’enseignant de l’Education nationale. Chaque membre de la commission d’application des peines donne son avis au juge, sans formalisme particulier.
Il y a lieu de souligner que la comparution du détenu est possible devant la commission, mais n’est pas dans les pratiques habituelles. Pour les mineurs, ni l’assistance d’un avocat ni l’audition préalable des civilement responsables n’est prévue par les textes en cette matière.
(1)
Circulaire NOR : JUSA0700089C du 30 mars 2007.
(2)
« Sur l’exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes mineures », Rap. AN n° 911, 28 mai 2008, p. 37 et s.
(3)
Par lettre recommandée avec accusé de réception ou dépôt d’une requête écrite au greffe contre récépissé (C. proc. pén., art. D. 49-11).
(4)
Loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, version en vigueur consultable sur legifrance.gouv.fr
[Décret n° 2010-1276 du 27 octobre 2010, JO du 28-10-10 ; circulaire CRIM/2010-22/E3 du 10 novembre 2010, NOR : JUSD1028753C, BOMJL n° 2010-09]