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LE CONTRÔLE DE L’EFFECTIVITÉ DES DROITS ?

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Le contrôle de l’effectivité des droits est dévolu à des organes, dont il convient de rappeler les missions, qui, à cet effet, bénéficient d’un droit à l’information particulier ; un régime de sanctions a également été mis en place pour garantir le respect de certains droits fondamentaux.


A. LES ORGANES DE CONTRÔLE ?

Les deux principaux organes de contrôle sont la commission départementale des soins psychiatriques et la commission du suivi médical.


1. LA COMMISSION DÉPARTEMENTALE DES SOINS PSYCHIATRIQUES

C’est la loi du 27 juin 1990 qui a créé les commissions départementales des hospitalisations psychiatriques en leur confiant expressément la mission de s’assurer du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes hospitalisées sous contrainte.
Cet organe important, dont les faiblesses ont été relevées dans le rapport commun des inspections générales des services judiciaires et des affaires sociales, publié en mai 2005 (1), n’a cependant jamais été réellement à la hauteur des missions qui lui sont confiées pour des motifs tenant tant à sa composition qu’à ses moyens d’action.
La loi du 5 juillet 2011, au regard de la diversification des modalités de prise en charge, a modifié sa dénomination – elle a été rebaptisée « commission départementale des soins psychiatriques » – mais n’a cependant pas tiré les conséquences de ce constat.

a. Sa composition

[Code de la santé publique, article L. 3223-2]
La composition de la commission départementale des soins psychiatriques, telle que fixée par la loi du 4 mars 2002, est inchangée. En sont membres :
  • deux psychiatres, l’un désigné par le procureur général près la cour d’appel, l’autre par le représentant de l’Etat dans le département ;
  • un magistrat désigné par le premier président de la cour d’appel ;
  • deux représentants d’associations agréées (l’une de personnes malades, l’autre de familles de personnes malades) désignés par l’autorité préfectorale ;
  • un médecin généraliste désigné par le représentant de l’Etat dans le département.
L’indépendance de cette commission (dont la majorité des membres est désignée par le préfet) est censée être garantie par le fait que seul l’un des deux psychiatres peut exercer dans un des établissements « autorisés en psychiatrie » désigné par l’agence régionale de santé et par l’interdiction faite aux membres de la commission d’être membre du conseil de surveillance (ou d’une instance habilitée à cet effet) d’un établissement de santé accueillant des malades atteints de troubles mentaux dans le département du ressort de la commission. La représentation médicale y est toutefois toujours très forte (la moitié des membres), le législateur n’ayant pas retenu les propositions du rapport des inspections générales des affaires sociales et des services de la justice sur l’ouverture de cette commission à d’autres professionnels, comme les avocats.

A noter :

les membres ne peuvent, en dehors du cadre des attributions de la commission, faire état des informations qu’ils ont pu recueillir sur les personnes dont la situation leur a été présentée. Ils sont soumis au secret professionnel dans les conditions prévues par les articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

b. Ses missions

[Code de la santé publique, articles L. 3222-5, L. 3223-1 et R. 3223-8]
La commission a pour mission générale d’examiner la situation des personnes « admises en soins psychiatriques », quel que soit leur mode d’admission (sur décision du directeur d’établissement, du représentant de l’Etat ou sur décision judiciaire, que la personne soit ou non détenue et/ou ait bénéficié d’une décision d’irresponsabilité pénale). Son contrôle n’est donc plus limité aux seules personnes hospitalisées mais à toutes celles qui font l’objet d’une mesure de soins psychiatriques contraints.
A cette fin, elle doit visiter les établissements « autorisés en psychiatrie » et vérifier la tenue des registres ; elle doit par ailleurs examiner la situation des personnes lui ayant adressé une réclamation.
La loi du 5 juillet 2011 prévoit en outre que la commission doit examiner obligatoirement la situation des personnes dont les soins psychiatriques se prolongent au-delà de un an et celle des personnes dont l’admission a été prononcée par le directeur, en l’absence de tiers, dans l’hypothèse d’un péril imminent. Dans ce cas, la commission examine la situation de ces personnes « avant l’expiration d’un délai de trois mois à compter de cette admission, puis au moins une fois tous les six mois » (C. santé publ., art. R. 3223-8, II).
Elle est enfin compétente pour statuer sur les modalités d’accès au dossier médical de toute personne admise en soins psychiatriques.

c. Ses moyens d’action

[Code de la santé publique, articles L. 3223-1, R. 3223-9 et R. 3223-11]
Les pouvoirs de la commission restent limités et vont dépendre de l’engagement et de la disponibilité de ses membres.
Il est reconnu à la commission départementale des soins psychiatriques un pouvoir d’investigation, le personnel des établissements de santé visités étant tenu de répondre à ses demandes d’information et les médecins, membres de la commission, ayant accès à toutes les données médicales relatives aux personnes dont la situation est examinée.
La commission dispose par ailleurs d’un pouvoir général d’alerte par le rapport d’activité qu’elle doit élaborer chaque année et adresser à diverses autorités, à savoir le juge des libertés et de la détention compétent dans son ressort, le représentant de l’Etat dans le département, le directeur général de l’agence régionale de santé, le procureur de la République et le contrôleur général des lieux de privation de liberté (2).
Elle est également habilitée à intervenir sur les situations individuelles en saisissant à cette fin tant le représentant de l’Etat dans le département que le procureur de la République. Elle peut même proposer au juge des libertés et de la détention – qui pourra se saisir d’office – d’ordonner la levée de la mesure de soins psychiatriques (3).
Enfin, dans l’hypothèse d’une mesure de soins psychiatriques sur décision du directeur d’établissement, la commission départementale peut requérir auprès de ce dernier la levée de la mesure de soins (C. santé publ., art. R. 3223-9). Mais, là encore, il semble que les commissions ne fassent pas, ou peu, usage de ce droit.


2. LA COMMISSION DU SUIVI MÉDICAL

[Code de la santé publique, articles R. 3222-5 à R. 3222-9]
Créée dans chaque département d’implantation d’une unité pour malades difficiles, la commission du suivi médical est investie, quant à elle, d’un véritable pouvoir décisionnaire en matière d’admission ou de sortie de l’unité pour malades difficiles.
Elle est composée de quatre membres désignés par le directeur de l’agence régionale de santé, à savoir :
  • un médecin inspecteur de santé ;
  • trois psychiatres hospitaliers n’exerçant pas leur activité dans l’unité pour malades difficiles. Ceux-ci sont désignés pour un mandat de trois ans renouvelable.
La commission du suivi médical est appelée à se prononcer sur l’admission d’une personne dans l’unité pour malades difficiles en cas de désaccord du psychiatre responsable de cette unité. Sa décision s’impose alors au préfet.
De la même manière, si elle constate que les conditions d’admission en unité pour malades difficiles ne sont plus remplies, elle saisit le préfet qui doit prononcer la sortie du patient de cette unité. Dans cette hypothèse, le préfet peut toutefois décider, soit une mainlevée de la mesure de soins ou une prise en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète, soit un transfert dans un autre établissement de santé ou un retour dans l’établissement de santé d’origine. Dans ce dernier cas, si l’établissement de santé d’origine manifeste son désaccord, c’est la commission de suivi médical qui tranchera.
Pour assurer un exercice effectif de ces prérogatives, la commission dispose du pouvoir :
  • de visiter l’unité pour malades difficiles à tout moment qu’elle juge utile et au moins une fois par semestre. Elle adresse un compte rendu de cette visite au procureur de la République, à l’autorité préfectorale et à la commission départementale des soins psychiatriques ;
  • de se saisir d’office à tout moment de la situation d’un patient de l’unité pour malades difficiles. Elle peut être également saisie par la personne hospitalisée dans l’unité ou par toute autre personne susceptible de solliciter la mainlevée de la mesure ainsi que par les autorités administratives ou judiciaires et les médecins énumérés à l’article R. 3222-7 du code de la santé publique (4). Elle doit, en tout état de cause, examiner au moins tous les six mois la situation de chaque personne hospitalisée dans une telle unité.


3. LES AUTRES ORGANES DE CONTRÔLE

[Code de la santé publique, article L. 3222-4]
Diverses autorités administratives ou judiciaires ont également pour mission de visiter sans publicité préalable au moins une fois par an les établissements « autorisés en psychiatrie », à savoir :
  • le représentant de l’Etat dans le département ou son représentant ;
  • le président du tribunal de grande instance ou son délégué ;
  • le procureur de la République dans le ressort duquel est situé l’établissement ;
  • le maire de la commune ou son représentant.
A l’occasion de cette visite, ces autorités reçoivent les réclamations des personnes admises en soins psychiatriques sans consentement ou de leur conseil, s’assurent du respect de leurs droits, contrôlent et signent le registre de l’établissement (cf. infra, B, 2).
Toutefois, en 1997, le rapport Strohl relevait déjà que « la plupart des évaluations déplorent que les visites des autorités dans les établissements habilités à recevoir des personnes hospitalisées sans leur consentement [...] ne soient pas réellement effectuées » (5). Ce constat était également fait dans le rapport d’activité des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques pour l’année 1998 (6). La multiplication des missions, la paupérisation de l’institution judiciaire et l’absence de sanction attachée au non-respect de cette mission font que ce contrôle, dans la plupart des cas, lorsqu’il est exercé, n’est toujours que de pure forme.


B. L’OBLIGATION D’INFORMATION À L’ÉGARD DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE ?

Les organes qui sont chargés d’exercer le contrôle doivent être destinataires des informations sur le déroulement des mesures de soins ou en mesure de les consulter.


1. L’OBLIGATION PARTICULIÈRE D’INFORMATION EN MATIÈRE DE SOINS PSYCHIATRIQUES SUR DÉCISION DU DIRECTEUR D’ÉTABLISSEMENT

[Code de la santé publique, article L. 3212-5]
Le directeur d’établissement auteur de la décision d’admission en soins psychiatriques :
  • doit informer sans délai le représentant de l’Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police et la commission départementale des soins psychiatriques de toute décision d’admission d’une personne en soins psychiatriques et leur transmettre une copie des certificats d’admission et du bulletin d’entrée ainsi que, sans délai, une copie des certificats des 24 heures et 72 heures. Ces mêmes autorités devront être également rendues destinataires des certificats, avis médicaux et attestations prévus en cas de modification des modalités de prise en charge ou de renouvellement de la mesure (C. santé publ., art. L. 3211-11 et L. 3212-7) ;
  • doit notifier sans délai les coordonnées (nom, prénoms, profession et résidence habituelle ou lieu de séjour) de la personne faisant l’objet de soins et, s’il y en a un, du tiers demandeur aux procureurs de la République du lieu de résidence du malade et du lieu de situation de l’établissement ;
  • dans l’hypothèse d’une prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète, une copie du certificat de huitaine doit être adressée sans délai au juge des libertés et de la détention compétent dans le ressort duquel se situe l’établissement d’accueil (C. santé publ., art. L. 3212-7, in fine). Cette formalité est destinée à informer le juge des libertés et de la détention d’une probable saisine aux fins de contrôle systématique.


2. LA TENUE DU REGISTRE

[Code de la santé publique, article L. 3212-11]
Dans chaque établissement « autorisé en psychiatrie » doit être tenu un registre sur lequel sont retranscrites ou reproduites toutes les informations concernant les mesures de soins psychiatriques mises en œuvre dans l’établissement. Ainsi, outre les renseignements concernant l’identité des personnes faisant l’objet de mesures de soins, doivent figurer au registre :
  • la date de la décision d’admission ;
  • les avis et les certificats médicaux ;
  • les coordonnées éventuelles du tiers demandeur ou une copie de l’arrêté préfectoral d’admission ou une mention de la décision d’admission pour péril imminent ;
  • les dates de délivrance de l’information due au patient ;
  • la date et le dispositif des décisions rendues par le juge des libertés et de la détention ;
  • la mention des décisions de mainlevée autres que judiciaires.
Toutes les autorités administratives ou judiciaires qui ont pour obligation de visiter ces établissements doivent viser ce registre à l’issue de chacune de leurs visites et peuvent y porter leurs observations.


C. LES SANCTIONS ?

[Code de la santé publique, articles L. 3215-1 à L. 3215-3]
La liberté de soins du patient est un droit fondamental auquel il ne peut être porté atteinte que par une mesure de soins psychiatriques contraints valide. Le directeur d’établissement est ainsi passible de un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende s’il maintient la mesure de soins psychiatriques, quelle qu’en soit la forme, alors que sa mainlevée a été ordonnée par le représentant de l’Etat dans le département ou par le juge des libertés et de la détention, ou alors qu’il y est tenu au terme des dispositions légales, voire lorsque cette mainlevée est acquise de plein droit en raison du non-respect d’une formalité prévue par la loi.
Le droit d’exercer un recours est également un droit fondamental reconnu par l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Le fait pour le directeur d’établissement ou pour tout médecin de porter atteinte à ce droit, en supprimant ou en retenant une requête ou une réclamation adressée par une personne faisant l’objet de soins psychiatriques à l’autorité judiciaire ou administrative, est dès lors sanctionné de la même manière.
Enfin, la procédure est garante du respect des droits. C’est la raison pour laquelle la violation de certaines règles de procédure essentielles est, elle aussi, passible de sanctions pénales tant à l’égard du directeur de l’établissement que, dans certaines conditions, à l’égard du médecin.
Est ainsi passible de six mois d’emprisonnement etde 7 500 € d’amende le non-respect par le directeur d’établissement de certaines règles en matière d’admission, et plus particulièrement une admission alors qu’il ne serait pas en possession de toutes les pièces requises (demande du tiers et certificats médicaux). Sont punissables selon les mêmes termes le non-respect de l’obligation d’information du représentant de l’Etat dans les délais prescrits et la non-communication à celui-ci des décisions d’admission et/ou certificats médicaux régulièrement établis ; il en va de même de l’absence de tenue ou de présentation du registre.
Le médecin d’un établissement peut, quant à lui, être sanctionné s’il refuse ou omet d’établir dans les délais prescrits les certificats médicaux exigés par la loi relevant de sa responsabilité. Il encourt également six mois d’emprisonnement et 7 500 € d’amende. Cette sévérité s’explique vraisemblablement par des considérations plus sécuritaires que libérales, le défaut d’établissement d’un de ces certificats étant de nature à entraîner la mainlevée de la mesure.


(1)
Lopez A., Yeni I., Valdes-Boulouque M., Castoldi F., « Propositions de réforme de la loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation », rapport IGAS 2005-064-IGSJ n° 11/05, La documentation française, mai 2005.


(2)
Le rapport d’activité comporte : les statistiques d’activité de la commission, le bilan de l’utilisation de la procédure applicable en cas de péril imminent pour la santé de la personne et de la procédure applicable en cas d’urgence et de risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ; une synthèse des conclusions de la commission sur les réclamations qu’elle a reçues et sur les constatations qu’elle a opérées lors de la visite d’établissements, notamment en ce qui concerne la tenue des registres et le respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes ; le nombre des malades entendus (C. santé publ., art. R. 3223-11).


(3)
Il n’est toutefois quasiment pas fait usage de cette possibilité par les commissions départementales, dont le contrôle reste en général très formel et se limite à la consultation des registres et à quelques entretiens avec les malades qui les ont sollicités.


(4)
Aux termes de l’article R. 3222-7 du code de la santé publique, sont habilités à saisir la commission du suivi médical, la personne hospitalisée, sa famille, son représentant légal, ses proches, le procureur de la République du département d’origine, celui du département d’accueil, le préfet du département d’origine, celui du département d’accueil, le psychiatre responsable de l’unité, le médecin généraliste ou le psychiatre privé traitant du patient, le psychiatre hospitalier responsable du secteur psychiatrique d’origine, le directeur de l’établissement où est implantée l’unité pour malades difficiles ainsi que le directeur de l’établissement d’origine.


(5)
Strohl H., Clemente M., « Rapport du groupe national d’évaluation de la loi du 27 juin 1990 », n° 97081, septembre 1997.


(6)
Transmis par la circulaire DGS/SP3 n° 99-300 du 25 mai 1999, NOR : MESP9930209C, BOMES n° 99/22.

SECTION 1 - LA RÉAFFIRMATION DES DROITS DU PATIENT

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