L’étiologie est le raisonnement qui, à partir de symptômes, aboutit à diagnostiquer la maladie causale tandis que la physiopathologie (ou psychopathologie en psychiatrie) étudie les mécanismes qui conduisent à la maladie.
A. UN DIAGNOSTIC D’ÉLIMINATION...
Les maladies psychiatriques n’étant pas dues à des lésions physiques identifiables, leur diagnostic ne se fait qu’après avoir éliminé une maladie organique (on dit alors qu’il s’agit de diagnostics d’élimination). Lorsque les progrès de la recherche scientifique permettent de découvrir que telle maladie psychiatrique est en fait due à telle lésion organique, la maladie en question quitte le champ de la psychiatrie pour intégrer une autre discipline médicale. C’est le cas de la maladie d’Alzheimer qui est traitée par les neurologues. Cela dit, lésion organique ou pas, de trop grandes perturbations psychiques ou comportementales conduisent en général le patient à l’hôpital psychiatrique. Lequel va avoir le plus grand mal, une fois les troubles aigus traités, à trouver une solution d’accueil en aval pour cette personne. Cette situation est loin d’être rare et explique en partie le phénomène décrié des longues hospitalisations en psychiatrie.
En pratique, un état psychiatrique comme l’agitation, le délire (cf. supra, section 1, § 4, C, 1) nécessite d’éliminer avant tout un trouble organique, et ce afin de ne pas prendre pour psychiatriques les manifestations psychiques et comportementales d’une pathologie somatique (confusion au cours d’un diabète déséquilibré, agitation chez une personne âgée en raison d’une rétention urinaire, d’une douleur abdominale aiguë, etc.).
La loi du 5 juillet 2011 rend obligatoire un examen somatique dans les 24 heures pour les personnes admises en soins psychiatriques sans consentement. Cette nouvelle disposition confirme l’obligation de moyen dévolue à la santé et devrait réduire la « perte de chance » des patients, c’est-à-dire le retard diagnostic ou la survenue de complications, dans les situations où le tableau clinique est psychiatrique mais où l’urgence est en réalité physique. Elle pourrait réduire aussi la surmortalité des patients atteints de trouble psychiatrique, en partie du moins puisque les patients admis sur un mode libre, les plus nombreux, ne bénéficient pas forcément d’un examen physique à leur admission. Cette disposition est un progrès indiscutable mais elle est aussi un nouveau challenge pour l’organisation des soins dans les services d’accueil en urgence.
B. ... AUX ORIGINES INDÉTERMINÉES
L’origine des maladies mentales est inconnue en l’état actuel des connaissances. De récents espoirs naissent par exemple du développement du réseau FondaMental (1) ou de l’annonce d’un volet recherche dans le second plan Santé mentale (2). Il y est prévu de décloisonner les domaines de connaissances (sciences humaines et sociales, épidémiologie, recherche clinique...) et d’obtenir des données fines sur la prévalence des troubles mentaux.
En attendant, une fois les causes organiques écartées (cf. supra, A), la compréhension de l’état du patient atteint d’un trouble mental se fait en fonction de la référence théorique du psychiatre. Les causes exactes n’étant pas connues les théories et hypothèses foisonnent, qu’elles soient psychologiques, génétiques, environnementales, neurobiologiques, sociales, etc. Elles peuvent porter sur des prédispositions personnelles, familiales ou sociales, ou encore sur la part d’un traumatisme extérieur dans la genèse d’un trouble. Par exemple, le lien fort entre consommation de cannabis et psychose bute sur les questions de savoir si le cannabis est un facteur déclenchant ou déterminant, ou encore s’il ne s’agit pas plus d’une conséquence, et non d’une cause, de la psychose.
Les progrès en imagerie cérébrale permettent de mieux comprendre le fonctionnement psychique mais on ne peut pas pour autant réduire la vie psychique à une activité cérébrale. Les causes d’un trouble psychiatrique sont vraisemblablement multifactorielles.
(1)
Réseau de coopération scientifique en santé mis en place par la fondation FondaMental. Dédiée à la coopération scientifique en matière de maladie mentale, cette fondation fut créée en 2007 par décret du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, dans le cadre de la mise en place des réseaux thématiques de recherche et de soins (RTRS).
(2)
Selon le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, le document de travail soumis par le ministre de la Santé au comité d’orientation du plan Santé mentale 2011-2015 fixe quatre grands axes stratégiques destinés à « prévenir et réduire les ruptures ».