La prison, autre lieu d’enfermement, est régulièrement décriée pour ses conditions de détention et ses évasions. Aussi, à en croire les médias, plus de la moitié des détenus sont des malades mentaux, les prisons sont devenues les nouveaux asiles, et les experts psychiatres manquent de discernement ou sont incompétents (1). L’étude qui a mis le feu aux poudres en son temps est celle de la DREES publiée en 2002 (2) qui rapporte que les psychiatres des prisons « ont repéré au moins un trouble psychiatrique pour plus de la moitié » des 2 300 entrants en détention et accueillis dans un service médico-psychologique régional (SMPR) en juin 2001. En 2004, une autre étude (3) portant sur un échantillon moins important (800 personnes) et utilisant une méthode d’évaluation différente et originale, trouve des chiffres nettement supérieurs.
En réalité, la première étude indique clairement une nette différence entre les troubles présentés par les détenus et ceux qui le sont par les patients pris en charge dans les secteurs de psychiatrie. Les détenus présentent majoritairement des troubles de la personnalité (34 %) et des troubles liés aux toxiques (25 %) tandis que les patients psychiatriques traditionnels présentent surtout des pathologies psychotiques et des troubles de l’humeur.
La seconde étude n’a malheureusement pas évalué les troubles de la personnalité, pourtant premier diagnostic selon la DREES. Elle relève, en fonction de la méthode d’évaluation, un trouble psychotique chez 12,1 à 19,2 % des détenus, taux nettement supérieurs à celui de la population générale même si les auteurs reconnaissent eux-mêmes que l’on dispose de peu de données épidémiologiques rigoureuses pour les comparer.
La distribution des diagnostics est donc très différente dans la population des détenus et dans celle des patients psychiatriques hospitalisés ou non, ce qui permet de relativiser la notion du terme « trouble mental ».
(1)
Cf. l’interview de Daniel Zagury dans Le quotidien du médecin, n° 9059 du 15-12-11, p. 12.
(2)
« La santé mentale et le suivi psychiatrique des détenus accueillis par les services médico-psychologiques régionaux », DREES, « Etudes et résultats », n° 181, juillet 2002.
(3)
Falissard B., Loze J.-Y., Gasquet I., Duburc A., de Beaurepaire C., Fagnani F., and Rouillon F., « Prevalence of mental disorders in French prisons for men », BMC Psychiatry, 2006.