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LA PARTICIPATION DES USAGERS

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Dans les structures qui accueillent des personnes en difficulté, sujettes à addictions ou d’origine étrangère, des outils mis en place pour favoriser la participation des usagers sont adoptés.


A. LE CONSEIL DE LA VIE SOCIALE

[Code de l’action sociale et des familles, articles L. 311-6, D. 311-3, D. 311-8, D. 311-10 et D. 311-32]
Le conseil de la vie sociale est, en principe, obligatoirement mis en place lorsque l’établissement ou le service assure un hébergement ou un accueil de jour continu ou une activité d’aide par le travail.
Toutefois, il est facultatif dans les établissements et services accueillant des personnes en difficulté ou des demandeurs d’asile lorsque les durées de la prise en charge sont inférieures à la durée minimale du mandat (soit un an) ou lorsqu’ils accueillent majoritairement des personnes étrangères pouvant recourir à un organisme d’aide à la traduction.
Dès lors, il peut être procédé à la mise en œuvre d’autres formes de participation (cf. supra, chapitre I).
Si les établissements et services accueillant des publics en difficulté décident de mettre en place un conseil de la vie sociale, des adaptations sont prévues. En effet, dans ces structures, les représentants des personnes accueillies peuvent être désignés avec leur accord sans qu’il y ait lieu de procéder à des élections. Les modalités de désignation sont alors précisées par le règlement de fonctionnement.
Une autre adaptation concerne le remplacement d’un membre avant la fin de son mandat. Selon la législation, les membres du conseil sont élus pour une durée de un an au moins et de trois ans au plus, renouvelable. Normalement, lorsqu’un membre cesse sa fonction en cours de mandat, notamment en raison de la fin de la prise en charge dont il était bénéficiaire, il est remplacé par son suppléant ou par un autre bénéficiaire élu ou désigné dans les mêmes formes qui devient titulaire du mandat. Il est ensuite procédé à la désignation d’un autre suppléant pour la durée restante du mandat. Dans les établissements et services accueillant des personnes en difficulté ou des demandeurs d’asile (CASF, art. L. 312-1, I, 8°, 9° et 13°), le remplacement pour la durée du mandat restante des membres représentant les personnes accueillies peut être assuré là encore par une procédure de désignation. L’accord des personnes désignées est requis. Les modalités de désignation sont précisées par l’instance compétente de l’organisme gestionnaire ou établies par la personne physique gestionnaire du lieu de vie et d’accueil.
Selon la recommandation de l’ANESM sur le secteur de l’inclusion sociale (1) (cf. infra B, 1), « même si la réglementation ne rend pas obligatoire le vote à bulletins secrets dans les CHRS/CHU/CADA, il est recommandé de tenir les élections à bulletins secrets, avec garantie d’autonomie des choix (isoloir...) et avec une aide éventuelle pour les personnes maîtrisant mal l’écriture ». L’agence va dans le même sens dans une seconde recommandation sur la participation dans le secteur de l’addictologie (2) (cf. infra, B, 2) puisqu’elle préconise la voie de l’élection plutôt que celle de la désignation. « Les avantages de la participation au travers de représentants élus sont importants », explique-t-elle : « il est plus facile de faire comprendre à un usager élu qu’il n’est pas là pour parler de sa situation personnelle ». En outre, « l’élection par ses pairs confère un caractère de légitimité démocratique, que la procédure de désignation ne permet pas d’introduire ».


B. LES RECOMMANDATIONS DE L’ANESM EN MATIÈRE DE PARTICIPATION

A deux reprises dans le secteur des personnes en difficulté, l’ANESM a émis des recommandations en matière de participation des usagers.


1. LE SECTEUR DE L’INCLUSION SOCIALE

[Circulaire n° DGCS/1A/2010/271 du 16 juillet 2010, NOR : MTSA1019083C]
L’importance de la participation des usagers est d’abord soulignée dans le référentiel national « Accueil, Hébergement, Insertion » annexé à la circulaire du 16 juillet 2010 (volets 1 et 2). Dans ce cadre, il est ainsi indiqué que la « parole des usagers individuelle et collective » doit être « prise en compte par tout moyen approprié : conseils de la vie sociale, groupes de parole, groupes projet, enquêtes de satisfaction. La participation des usagers est un élément essentiel dans le cadre de l’évaluation interne et externe des structures ».
Pour favoriser l’expression et la prise de responsabilité, ce référentiel insiste sur la nécessité de faire vivre les instances de consultation et d’expression, d’associer les usagers à l’évaluation des prestations et établissements par les personnes accueillies, d’accompagner les usagers volontaires à participer à la vie de quartier (conseils de quartier...) ainsi que d’accompagner (inciter, former...) les usagers volontaires à participer au pilotage, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques publiques.
Pour ce faire, le référentiel propose de prévoir :
  • la mise à disposition des moyens matériels et techniques, de lieux, favorisant les capacités d’expression ;
  • l’implication de l’ensemble des salariés, bénévoles, administrateurs ;
  • la coformation des intervenants sociaux et des usagers à la démarche participative ;
    • la mise en place de temps de coconstruction (groupes de travail,...).
De son côté, l’ANESM a élaboré des recommandations concernant les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les centres d’accueil pour demandeurs d’asile et les centres d’hébergement d’urgence lorsqu’ils sont autorisés dans le cadre de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale (3). Consciente de la difficulté à proposer des « instances de participation à des personnes souvent déstructurées, dont le lien social avec les autres est abîmé, voire rompu », elle relève néanmoins qu’une telle démarche participe de leur insertion sociale. Elle souligne toutefois qu’une telle « participation n’est en aucun cas exigible de l’usager » car il s’agit de l’exercice d’un droit et non d’une obligation. L’ANESM reconnaît quatre formes organisationnelles d’expression et de participation des usagers qu’elle recommande aux structures de mettre en œuvre simultanément en raison de leur complémentarité :
  • le conseil de la vie sociale ;
  • les groupes d’expression ou groupes de parole, groupes de maison qui « visent l’apprentissage des débats, de la vie de groupe, de la prise de parole, etc., à travers le « collectif institutionnel » ;
  • les groupes projet ou groupes d’initiative, qui tout en « favorisant le pouvoir d’initiative, visent à renforcer la capacité d’agir et d’influer sur son propre environnement » ;
  • et les enquêtes de satisfaction qui cherchent à positionner les résidents comme des « usagers-clients » d’un service (4).
Pour l’agence, l’« expression et la participation font donc partie intégrante des « outils » à disposition des professionnels pour viser l’insertion des usagers dans la vie sociale ».
Pour mettre en place ces divers dispositifs participatifs, l’agence estime nécessaire la réunion de conditions préalables, tels :
  • l’organisation d’une formation et d’une réflexion générale de l’équipe sur les questions de participation ;
  • la formation, si nécessaire, des équipes à un nouveau positionnement ;
  • l’inscription de la participation des usagers dans la durée ; de fait « il peut arriver que ces instances, à certains moments, apparaissent purement formelles (manque d’investissement des résidents, ou des salariés, crises dans l’établissement, etc.). Il est alors nécessaire de resituer ces instances dans une stratégie à moyen terme, sans se décourager ou en tirer des conséquences définitives » ;
  • la mise en place des instances d’expression et de participation au niveau de l’établissement et non d’un groupe d’établissements, même si la réglementation permet un tel regroupement ;
  • des échanges entre établissements voisins ou semblables sur les modalités de participation des usagers.
L’agence fait également le point sur les modalités de fonctionnement des quatre dispositifs participatifs. En ce qui concerne, en particulier, le conseil de la vie sociale, elle met en exergue des « prérequis institutionnels » : la nécessité de s’assurer de la compréhension des écrits par les résidents, de formaliser le processus de désignation des délégués selon un mode similaire à celui des élections dans un cadre citoyen, de les former si nécessaire à la fonction représentative (aide à l’établissement de l’ordre du jour, à la conduite des débats, à la formulation d’une conclusion) ou encore de faciliter les modalités concrètes de fonctionnement du conseil grâce à la désignation d’une personne « ressource », chargée notamment d’apporter soutien et conseil aux usagers, d’assurer la médiation, de rester en contact avec les usagers dans l’intervalle entre les rencontres, etc.
L’agence met par ailleurs en garde contre certains écueils en rappelant que ce conseil « n’est ni un lieu de gestion des cas individuels ni un lieu où traiter uniquement des dysfonctionnements de la structure ni une tribune politique, ou un lieu de prosélytisme ».


2. LES ÉTABLISSEMENTS MÉDICO-SOCIAUX RELEVANT DE L’ADDICTOLOGIE

Dans une autre recommandation (5), l’ANESM s’est penchée sur la question de la participation dans les établissements médico-sociaux (EMS) spécialisés en addictologie, c’est-à-dire les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie, les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (Caarud) ainsi que les communautés thérapeutiques. Pour l’agence, l’enjeu de la participation est au moins double. En premier lieu, elle relève que les usagers de ces structures « connaissent inégalement leurs droits et rencontrent des obstacles importants pour les faire valoir. Exercer concrètement un droit d’expression et avoir un lieu pour faire des propositions, constituent une expérience positive à travers laquelle les personnes sont considérées comme sujets de droits ». Parallèlement, « l’avis des usagers sur les modalités de l’accueil et des prestations, sur la pertinence des actions et de l’organisation matérielle, est une source d’informations importante qui permet aux professionnels d’améliorer la qualité de service. »
Ce constat posé, elle conseille aux structures de permettre aux usagers de « s’exprimer et participer [...] sur l’ensemble des activités de l’établissement, y compris thérapeutiques et de réduction des risques ». Elle rappelle, comme dans la recommandation relative au secteur de l’inclusion sociale, que la participation des usagers est un droit mais non une obligation et recommande que les différents outils élaborés à leur intention – livret d’accueil, règlement de fonctionnement – insistent « sur la double dimension de ce droit à la participation » : « une participation facultative » mais également « une occasion d’influer sur le fonctionnement de l’établissement et la qualité des prestations ».
Pour faciliter leur participation, elle préconise de « bien différencier le statut et les objectifs des différents groupes mis en place au sein de la structure, de manière à ce que professionnels et usagers repèrent facilement le groupe participatif dédié au fonctionnement de l’établissement ».
Autre principe devant guider la mise en place de cette participation : le pragmatisme. « Il convient de ne pas avoir une vision trop idéalisée de la participation, qui est le plus sûr moyen de ne rien mettre en place » mais « de prendre en compte la conjoncture » (turn-over des personnels, situations particulièrement délicates...). Si un groupe participatif ou une autre forme de participation ne fonctionne pas à un moment donné, il est recommandé de puiser dans d’autres formes de participation pour relancer la dynamique, puis de le mettre en place à nouveau à un moment plus opportun.
Il est clair, reconnaît-elle que « tous les usagers ne vont pas participer au moment voulu et selon les modalités proposées. Ils n’en sont pas tous à la même étape de leur accompagnement. Le groupe ne sera évidemment pas représentatif de la variété des usagers... ». L’idée est donc de s’appuyer sur les usagers les plus disponibles.
La recommandation s’attarde également sur les modalités de mise en œuvre concrète de la participation. Pour la favoriser, il lui semble nécessaire « d’instaurer une réflexion générale de l’équipe sur les questions de participation préalablement au choix et/ou à la mise en place des formes de participation au fonctionnement de l’établissement et de prévoir une durée estimative de cette phase préparatoire, et de tenir les échéances au mieux, afin de ne pas laisser la démarche s’enliser ».
Cette réflexion doit aboutir à :
  • repérer le type d’usagers concernés par la participation : personnes consultant pour leurs propres conduites addictives, représentants légaux (parents des mineurs, mandataire judiciaire), entourage mobilisé auprès des usagers majeurs, ainsi que les situations particulières (public éloigné ou logé en hébergement diffus, personnes mises sous écrou [incarcérées ou bénéficiant d’un aménagement de peine]...) ;
  • repérer les différents lieux existants, activités et occasions pour les usagers d’exprimer leur opinion et leurs propositions au sein de l’établissement ;
  • différencier ces lieux d’expression, afin d’en spécifier les objectifs ;
  • identifier les éléments qui peuvent constituer des points d’appui pour organiser le futur groupe participatif.
Parallèlement, l’agence conseille de consulter les usagers dès cette phase de réflexion pour qu’ils puissent dire eux-mêmes quel type de groupe participatif ou de forme de participation leur paraît favorable. Cette consultation visera également l’entourage des usagers : les parents si l’établissement accueille des mineurs, les représentants légaux des personnes sous protection juridique, les proches avec l’accord des usagers concernés...
Par la suite, il est primordial de donner des explications claires aux usagers sur les objectifs et le mode de fonctionnement du groupe participatif. Autre préconisation : mettre à leur disposition un espace dédié à leur participation, où ils trouveront ordre du jour, dates, comptes rendus, noms de leurs représentants éventuels et toutes informations liées aux groupes participatifs et supports de participation (questionnaires, enquêtes en cours...).
L’agence donne ensuite un certain nombre de conseils pour la mise place de ces instances ou formules de participation (faire appel à des formateurs extérieurs, organiser une « campagne électorale », garantir l’anonymat du vote (isoloir ou espace où s’isoler) avec une aide éventuelle pour les personnes maîtrisant mal l’écriture, prévoir une procédure pour gérer l’absentéisme et la sortie de la structure des représentants élus, afin d’assurer la poursuite du conseil de la vie sociale ou assimilé, choisir une périodicité réaliste compte tenu de la disponibilité des participants et suffisante pour assurer la continuité de la réflexion, solliciter l’ensemble des usagers pour recueillir leurs propositions de thèmes, en utilisant les supports de la participation : questionnaire, boîte à idées, cahiers d’expression, tableau, feuille à disposition en salle d’attente, retours de ce qu’entendent les professionnels dans les espaces d’expression informels et les usagers relais dans leurs contacts avec les pairs...).
Par ailleurs, l’instance fait un point sur le droit à la confidentialité et à l’anonymat de tout usager des établissements médico-sociaux relevant de l’addictologie (CASF, art. L. 311-3, 4° ; C. santé publ., art. L. 1110-4). Elle rappelle que « dans le cadre des groupes participatifs, il y aurait violation de ce droit en cas de partage d’informations qui ne serait pas nécessaire au déroulement des échanges et qui se révélerait contraire à l’intérêt de l’usager ». En outre, elle souligne que les personnes toxicomanes qui se présentent spontanément dans un centre de soins spécialisés, et qui en font la demande, ont le droit à l’anonymat (C. santé publ., art. L. 3414-1 et art. R. 1112-38). « Dans le cadre des groupes participatifs, il s’agit donc de veiller à ne pas diffuser l’identité d’un usager qui en a fait la demande ».


(1)
ANESM, « Expression et participation des usagers dans les établissements relevant du secteur de l’inclusion sociale », recommandations de bonnes pratiques professionnelles, avril 2008, disponible sur www.anesm.sante.gouv.fr


(2)
ANESM, « La participation des usagers dans les établissements médico-sociaux relevant de l’addictologie », recommandations de bonnes pratiques professionnelles, avril 2010, disponible sur www.anesm.sante.gouv.fr


(3)
ANESM, « Expression et participation des usagers dans les établissements relevant du secteur de l’inclusion sociale », préc.


(4)
Relevons que le référentiel CHRS précité reprend ces principes à son compte : « Inscrire la démarche dans la durée par-delà les aléas qui peuvent à un moment ou un autre affecter le bon fonctionnement du dispositif », « mettre en place les quatre formes organisationnelles d’expression et de participation : CVS, groupes de participation, groupes projet et enquêtes de satisfaction » ; « rappeler le droit pour l’usager de ne pas participer, l’expression et la participation ne relevant en aucun cas d’une injonction »...


(5)
ANESM, « La participation des usagers dans les établissements médico-sociaux relevant de l’addictologie », préc.

SECTION 1 - LES DROITS GARANTIS

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