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UN RÉGIME DES AUTORISATIONS PROFONDEMENT RENOUVELÉ

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Une nouvelle procédure d’autorisation de création, de transformation et d’extension des établissements et services sociaux et médico-sociaux par appel à projet est applicable, depuis le 1er août 2010, aux structures ayant recours à des financements publics (cf. encadré).
Non seulement l’évolution observée avec la loi 2002-2 du 2 janvier 2002 (avec des autorisations désormais à durée déterminée, ramenée à 15 ans) se poursuit et le rapprochement avec les règles en vigueur dans le secteur des établissements de santé se confirme, mais le régime des autorisations connaît une évolution profonde inspirée fortement par le droit de la commande publique et par le droit européen de la concurrence.
LES ÉTABLISSEMENTS CONCERNÉS PAR LA PROCÉDURE D’APPEL À PROJET
Quelque 35 000 établissements et services bénéficiant de financements publics et qui sont soumis à l’obligation d’obtenir une autorisation administrative pour exercer leur activité relèvent, depuis le 1er août 2010, de la nouvelle procédure d’appel à projet, créée par la loi « HPST » du 21 juillet 2009 et le décret du 26 juillet 2010. Sont notamment concernés :
DANS LE SECTEUR SOCIAL
█ les établissements et services intervenant pour l’aide sociale à l’enfance ;
█ les établissements et services accompagnant les personnes en difficulté sociale tels que les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les centres d’hébergement d’urgence, etc. ;
█ les établissements et services mettant en œuvre des mesures de protection des majeurs ;
█ des établissements et services mettant en œuvre des mesures ordonnées par l’autorité judiciaire.
DANS LE SECTEUR MEDICO-SOCIAL
█ les établissements et services accueillant des enfants handicapés : les services d’éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad), les centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP), les centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP), les établissements spécialisés, comme les instituts médico-éducatifs, les instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques ;
█ les établissements et services accompagnant les adultes handicapés : les foyers de vie, les foyers d’accueil médicalisés, les maisons d’accueil spécialisées, les établissements et services d’aide par le travail, les foyers d’hébergement, les services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS), les services d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah) ;
█ les établissements et services accompagnant les personnes âgées : les services d’aide à domicile, les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), les accueils de jour, les hébergements temporaires, les centres locaux d’information et de coordination (CLIC) ;
█ les établissements et services spécialisés dans le traitement des addictions : les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction de risques pour usagers de drogues (Caarud), les centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA).
[D’après dossier de presse CNSA, 30 juillet 2010]
Les règles nouvelles figurent au très important article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles modifié par l’article 124 de la loi « HPST », constitutif à lui seul – il occupe quatre pleines pages du Journal officiel – de l’essentiel du chapitre III relatif aux établissements et services sociaux et médico-sociaux.
Aux termes de cet article, les projets – y compris expérimentaux – de création, de transformation et d’extension d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux relevant de l’article L. 312-1, ainsi que les projets de lieux de vie et d’accueil sont autorisés par les autorités compétentes chargées du financement.
Lorsque les projets font appel partiellement ou intégralement à des financements publics (1), ces autorités délivrent l’autorisation après avis d’une commission de sélection d’appel à projet social ou médico-social qui associe des représentants des usagers. L’avis de cette commission n’est toutefois pas requis en cas d’extension inférieure à un seuil. En outre, une partie des appels à projets doit être réservée à la présentation de projets expérimentaux ou innovants répondant à un cahier des charges allégé.
Concrètement, jusqu’à présent, pour obtenir une autorisation de créer, de transformer ou de procéder à l’extension d’un établissement ou d’un service, les personnes ou les organismes gestionnaires d’établissements et de services sociaux et médico-sociaux déposaient une demande auprès de l’autorité compétente. La décision d’autorisation était alors rendue après consultation du comité régional de l’organisation sociale et médico-sociale (Crosms). La loi « HPST » a supprimé le Crosms et a inversé le processus d’autorisation. Désormais, les projets de création, de transformation ou d’extension s’inscriront en réponse à des appels à projets lancés, seuls ou conjointement, par les financeurs (préfets de région, directeurs généraux d’ARS, présidents de conseils généraux) sur la base d’un cahier des charges. La décision d’autorisation sera ensuite rendue après classement des projets par une commission de sélection des appels à projets placée auprès de chaque autorité (2).
Les modalités de la nouvelle procédure d’appel à projet et d’autorisation ont été fixées par le décret du 26 juillet 2010. Celui-ci définit notamment les règles de publicité, les modalités de l’appel à projet et le contenu deson cahier des charges, ainsi que les modalités d’examen et de sélection des projets présen-tés, « afin de garantir une mise en concurrence sin-cère, loyale et équitableet la qualité de l’accueil et de l’accompagnement » (CASF, art. L. 313-1-1, I, al. 5). Une période de transition est toutefois ouverte entre la procédure d’autorisation antérieure et la procédure d’appel à projet. Jusqu’à l’adoption des projets régionaux de santé, prévus pour le deuxième semestre 2011, les appels à projets seront en effet définis sur la base des outils de planification existants (PRIAC, schémas d’organisation sociale et médico-sociale essentiellement).


A. LES AUTORITÉS COMPÉTENTES

[Code de l’action sociale et des familles, article L. 313-3]
La loi « HPST » a redistribué les compétences en matière d’autorisation pour tenir compte de la création des agences régionales de santé. « Cette redistribution se traduit par un vaste transfert de compétences du préfet de département vers le directeur général de l’ARS qui, en matière médico-sociale mais également en matière sanitaire, devient le véritable représentant de l’Etat dans les régions et les départements, sauf dans les domaines sociaux relevant d’un pouvoir régalien (gestion des personnes sous tutelle de l’Etat, gestion des ressortissants étrangers, gestion des personnes délinquantes, gestion des personnes relevant de décision de justice) » (Rap. AN n° 1441, tome II, février 2009, Rolland, p. 263).


1. LA COMPÉTENCE NOUVELLE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’ARS

Depuis le 1er juillet 2010, l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation n’est plus le préfet de département mais le directeur général de l’agence régionale de santé pour :
  • les établissements ou services d’enseignement qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou aux jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation ;
  • les centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP);
  • les établissements ou services de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle ;
  • les établissements et les services pour personnes âgées ;
  • les établissements et les services pour personnes adultes handicapées ;
  • les établissements ou services qui assurent l’accueil et l’accompagnement de personnes confrontées à des difficultés spécifiques en vue de favoriser l’adaptation à la vie active et l’aide à l’insertion sociale et professionnelle ou d’assurer des prestations de soins et de suivi médical. Sont notamment visés les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud), les lits halte soins santé (LHSS) et les appartements de coordination thérapeutique (ACT) ;
  • les centres de ressources ;
  • les structures expérimentales ;
  • les lieux de vie et d’accueil ;
  • les établissements ou services d’aide par le travail (ESAT).
Hormis ce dernier cas (les ESAT sont financés par l’Etat), la compétence du directeur général de l’ARS est liée à la prise en charge par l’assurance maladie des prestations dispensées.
Cette compétence est conjointe avec le président du conseil général lorsque les prestations dispensées relèvent simultanément d’une prise en charge au titre de l’aide sociale départementale et de l’assurance maladie (c’est le cas notamment des CAMSP) (cf. supra, 4).
Le processus de substitution du directeur général de l’agence régionale de santé au préfet est en définitive sans grande surprise ; le plus surprenant, peut-être, concerne l’inclusion du secteur de l’aide par le travail dans le champ de compétences de l’ARS, dans une logique de blocs de compétences.


2. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL

Comme précédemment, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par l’aide sociale départementale ou lorsque leurs interventions relèvent d’une compétence dévolue par la loi au département, l’autorisation est délivrée par le président du conseil général pour :
  • les établissements et services de l’aide sociale à l’enfance ;
  • les établissements et les services pour personnes âgées ;
  • les établissements et les services pour personnes adultes handicapées ;
  • les établissements ou services comportant ou non un hébergement, assurant l’accueil, notamment dans les situations d’urgence, le soutien ou l’accompagnement social, l’adaptation à la vie active ou l’insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse (CHRS) ;
  • les centres de ressources ;
  • les structures expérimentales ;
  • les lieux de vie et d’accueil.


3. LE PRÉFET DE DÉPARTEMENT

L’autorisation est délivrée par l’autorité compétente de l’Etat, c’est-à-dire le préfet de département, pour les structures financées par l’Etat, à savoir :
  • les établissements et les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ;
  • les CHRS ;
  • les centres de ressources et assimilés ;
  • les structures expérimentales ;
  • les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) ;
  • après avis conforme du procureur de la République, les services mandataires judiciaires à la protection des majeurs et les services délégués aux prestations familiales.


A noter :

le législateur a supprimé la compétence du préfet de département prévue par le code de l’action sociale et des familles en matière d’autorisation des foyers de jeunes travailleurs, procédure qui était largement tombée en désuétude.


4. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL ET LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’ARS

L’autorisation est délivrée conjointement par le président du conseil général et le directeur général de l’ARS pour les établissements et les services qui dispensent des prestations susceptibles d’être prises en charge pour partie par le département et pour partie par les organismes d’assurance maladie, à savoir :
  • les établissements et les services pour personnes âgées ;
  • les établissements et les services pour personnes adultes handicapées ;
  • les centres de ressources et assimilés ;
  • les structures expérimentales ;
  • les CAMSP ;
  • les lieux de vie et d’accueil.


5. LE PRÉFET DE DÉPARTEMENT ET LE PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL

L’autorisation est délivrée conjointement par le préfet de département et par le PCG pour les établissements et les services qui dispensent des prestations susceptibles d’être prises en charge pour partie par l’Etat et pour partie par le département :
  • les CHRS ;
  • les centres de ressources et assimilés ;
  • les établissements expérimentaux ;
  • les établissements et services de la PJJ ;
  • les lieux de vie et d’accueil.


B. DE NOUVELLES PROCÉDURES D’AUTORISATION

Globalement, les procédures en vigueur jusqu’à présent ne donnaient satisfaction ni aux autorités compétentes, ni aux pétitionnaires et candidats gestionnaires. Tous souhaitaient des procédures plus efficaces et plus courtes, plus économes des moyens administratifs et, surtout, permettant d’assurer un examen comparatif transparent et loyal des projets et de garantir l’existence d’un financement disponible pour les projets qui seront retenus (3).
Il n’est pas sûr que tous ces objectifs auront été atteints au même degré.


1. UNE INSTANCE D’AVIS : LA COMMISSION DE SÉLECTION D’APPEL À PROJET SOCIAL OU MÉDICO-SOCIAL

Pour les demandes de création, de transformation et d’extension d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux déposées après le 1er août 2010, l’autorité ou les autorités compétentes délivreront l’autorisation après avis d’une « commission de sélection d’appel à projet social ou médico-social » instituée auprès d’eux, qui associe des représentants des usagers. Cette procédure est applicable lorsque les projets font appel partiellement ou intégralement à des financements publics mais aussi pour les établissements et les services créés sans recours à des financements publics lorsqu’ils présentent des projets de transformation ou d’extension faisant appel à de tels financements. L’avis de la commission n’est toutefois pas requis en cas d’extension inférieure à un certain seuil (cf. infra) (CASF, art. L. 313-1-1, al. 2, et R. 313-1).
Cette commission a sans doute été instituée pour contribuer à cette garantie d’une « mise en concurrence sincère, loyale et équitable » qui n’était pas toujours assurée par les Crosms et, avant elles, par les commis– sions régionales des institutions sociales et médico-sociales (Crisms). Toujours est-il que le décret du 26 juillet 2010 crée un dispositif original et complexe reposant sur une commission caractérisée par une double parité et un souci d’adapter sa composition à la diversité des dossiers qu’elle aura à connaître.

a. Une composition originale

La composition de la commission de sélection d’appel à projet social ou médico-social est calquée sur le découpage retenu par le législateur en matière d’autorité(s) compétentes(s) pour délivrer l’autorisation (cf. supra, A).
Cette commission, qui pourra comprendre de 14 à 22 membres, n’aura pas moins en effet de six formations internes compétentes pour les projets autorisés :
  • par le président du conseil général ;
  • par le directeur général de l’agence régionale de santé ;
  • par l’Etat (préfet de département) ;
  • conjointement par le directeur général de l’agence régionale de santé et par le président du conseil général ;
  • conjointement par l’Etat et par le président du conseil général ;
  • conjointement par l’Etat et par le directeur général de l’agence régionale de santé.
Ces formations, dont les membres ont voix délibérative, se caractérisent par une double parité :
  • entre l’autorité compétente pour la prise de décision et ses représentants d’une part, et les représentants des usagers d’autre part ;
  • en cas d’autorisation conjointe, et donc de présidence conjointe, entre les représentants des deux autorités compétentes.
Par exemple, pour les projets relevant d’une décision du seul président du conseil général, la commission est composée de huit membres ayant pouvoir délibérant :
  • le président du conseil général ou son représentant, et trois représentants du département qu’il désigne ;
  • quatre représentants des usagers désignés par le président du conseil général sur proposition respectivement :
    • du comité départemental des retraités et personnes âgées (Coderpa),
    • du conseil départemental consultatif des personnes handicapées (CDCPH),
    • des associations œuvrant dans le secteur de la protection de l’enfance,
    • des associations représentant les personnes ou familles en difficulté sociale (pour la représentation de ces deux dernières catégories le président du conseil général organise un appel à candidatures).
De même, pour les projets autorisés conjointement par le directeur général de l’agence régionale de santé et le président du conseil général, la commission, composée de 12 membres, coprésidée par ces deux autorités, comprendra :
  • deux représentants du département désignés par le président du conseil général ;
  • deux représentants de l’agence régionale de santé désignés par son directeur général ;
  • six représentants des usagers « désignés conjointement et à parts égales » par le président du conseil général et par le directeur général de l’agence régionale de santé sur proposition, pour trois d’entre deux, du Coderpa et pour les trois autres du CDCPH.
Le décret ne dit pas, au demeurant, comment seront réglées les situations où il y aurait divergence entre le président du conseil général et le directeur général de l’agence régionale de santé pour la désignation de ces représentants. Dans les cas de compétences conjointes, on peut craindre en effet que la constitution même de la commission puisse être un premier point de blocage durable du processus de décision.
Il est à noter que l’intervention d’organismes comme le Coderpa et la CDCPH dans le processus de désignation de membres de cette commission donne à ces instances une importance nouvelle.
En outre, participent à cette commission de sélection, avec voix consultative :
  • deux représentants des personnes morales gestionnaires des ESMS et des lieux de vie et d’accueil, désignés par le président ou conjointement par les coprésidents de la commission ;
  • deux personnalités qualifiées désignées dans les mêmes conditions en raison de leurs compétences dans le domaine de l’appel à projet correspondant ;
  • deux experts associatifs (« représentants d’usagers spécialement concernés par l’appel à projet correspondant, désignés par le président ou les deux coprésidents de la commission ») ;
  • quatre personnels des services techniques, comptables ou financiers de l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation.
En conclusion, on ne peut que constater la lourdeur du dispositif – que l’on retrouve dans l’ensemble des montages issus de la loi « HPST ». Et signaler les possibilités de blocage juridique ainsi offertes à tel ou tel partenaire en cas de différend. Sans compter que la composition d’une commission pouvant comprendre jusqu’à 22 membres est peu compatible avec l’exigence de confidentialité posée dans le décret (CASF, art. R. 313-6-3) (4).

b. Le fonctionnement de la commission

La commission de sélection est réunie à l’initiative de l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation. En cas d’autorisation conjointe, une des autorités compétentes saisit l’autre autorité qui doit exprimer son accord dans un délai de un mois. A défaut d’accord à l’expiration de ce délai, la procédure d’appel à projet ne peut pas être engagée.
Les membres de la commission reçoivent 15 jours au moins avant la date de la réunion, une convocation du président ou des coprésidents comportant l’ordre du jour et les conditions dans lesquelles l’ensemble des documents nécessaires à l’examen des projets, notamment les projets présentés, leur sont rendus accessibles.
Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres avec voix délibérative sont présents ou ont donné mandat (CASF, art. R. 313-2-2).


2. LE DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE D’APPEL À PROJET

a. Des règles de procédure très précises

On ne peut manquer d’être frappé par la minutie, somme toute logique, avec laquelle le décret du 26 juillet 2010 décrit la procédure à mettre en œuvre et par un souci poussé à l’extrême de transparence, en particulier par la publicité donnée aux actes de procédure.
Si certaines dispositions restent relativement classiques, sur les délais de convocation ou les procès verbaux de réunion, d’autres sont plus nouvelles dans le secteur concerné, comme le classement des projets et la déclaration d’absence de conflit d’intérêt demandée aux membres de la commission sur les points inscrits à l’ordre du jour d’une réunion de la commission.
Le luxe de précision réside en particulier dans la gestion des délais :
  • les candidats sont informés de leur audition par la commission 15 jours francs avant la réunion de celle-ci : ils peuvent être entendus sur leur demande ;
  • les rapports du ou des instructeurs sont disponibles 15 jours avant la tenue de la commission ;
  • la commission peut demander à un ou plusieurs candidats de préciser le contenu de leurs projets, et ceux-ci disposent de 15 jours francs suivant la notification de la demande. L’ensemble des candidats dont les projets n’ont pas été refusés au préalable en est informé dans un délai de huit jours suivant la réunion de la commission ;
  • les projets « hors sujet » sont rejetés par le président sans examen par la commission, mais celle-ci en est informée en même temps que la convocation à la réunion.
On notera aussi qu’un calendrier annuel, voire pluriannuel des appels à projets, certes indicatif, est publié au recueil des actes administratifs de chaque autorité compétente et le cas échéant au bulletin officiel du ministère chargé de l’action sociale pour les projets relevant de la compétence du ministre. Ce calendrier peut être révisé mais cette modification est rendue publique par les mêmes moyens. Il recense les besoins par catégories d’établissements pour la couverture desquels l’autorité ou conjointement les autorités compétentes envisagent de procéder à un appel à projet durant la période considérée.
Conformément à l’article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles, le calendrier réserve l’une au moins des procédures d’appel à projet partiellement ou en totalité aux projets innovants ou aux projets expérimentaux : il y a fort à penser que cette disposition, d’une importance toute particulière à l’évidence, donnera lieu à de nombreuses discussions.

b. Les différentes étapes de la procédure

1]. L’avis d’appel à projet
[Code de l’action sociale et des familles, article R. 313-4-1]
L’appel à projet est lancé par l’autorité compétente selon le calendrier qu’elle a choisi (cf. supra, a).
L’avis d’appel à projet est constitué de l’ensemble des documents préparés par l’autorité ou, conjointement, par les autorités compétentes pour définir les besoins sociaux et médico-sociaux à satisfaire, notamment en termes d’accueil et d’accompagnement des personnes ainsi que les modalités de financement du projet. L’avis précise notamment la qualité et l’adresse de l’au– torité compétente pour délivrer l’autorisation, l’objet de l’appel à projet, les critères de sélection et les modalités de notation ou d’évaluation des projets qui seront appliqués, le délai de réception des réponses des candidats (compris entre 60 et 90 jours) à compter de la date de publication de l’avis, les modalités de dépôt des réponses ainsi que les pièces justificatives exigibles et les modalités de consultation des documents constitutifs de l’appel à projet. Le cahier des charges (cf. infra, 3) est soit annexé à l’avis, soit mentionné dedans avec indication de ses modalités de consultation et de diffusion.
L’avis d’appel à projet est publié au recueil des actes administratifs de chaque autorité compétente et le cas échéant au bulletin officiel du ministère chargé de l’action sociale pour les projets relevant de la compétence du ministre.
Le directeur de la CNSA, Laurent Vachey, a indiqué au cours d’une conférence de presse, le 3 septembre 2010, que « la moitié des agences régionales de santé, à travers l’actualisation annuelle des PRIAC, ont annoncé leur intention de lancer des appels à projet d’ici à la fin 2010 ».
2]. Les documents à fournir par les candidats
[Code de l’action sociale et des familles, article R. 313-4-3 ; arrêté du 30 août 2010, JO du 8-09-10]
Chaque candidat doit adresser certains documents en réponse à un appel à projet.
Concernant sa candidature, outre les documents permettant de l’identifier :
  • une déclaration sur l’honneur certifiant que le candidat n’est pas l’objet de l’une des condamnations devenues définitives mentionnées au Livre III du code de l’action sociale et des familles ;
  • une déclaration sur l’honneur certifiant que le candidat n’est l’objet d’aucune des procédures mentionnées aux articles L. 313-16, L. 331-5, L. 471-3, L. 472-10, L. 474-2 ou L. 474-5 et suivants du code de l’action sociale et des familles (fermeture d’établissement ou de service, retrait d’autorisation ou d’agrément...) ;
  • une copie de la dernière certification aux comptes s’il y est tenu en vertu des dispositions du code du commerce ;
  • des éléments descriptifs de l’activité du candidat gestionnaire dans le domaine social ou médico-social et de la situation financière de cette activité (ou de son but social ou médico-social tel que résultant de ses statuts lorsqu’il ne dispose pas encore d’une telle activité).
Concernant son projet :
  • tout document permettant de décrire de manière complète le projet de réponse aux besoins décrits par le cahier des charges ;
  • un état descriptif des principales caractéristiques auxquelles le projet doit satisfaire, dont le contenu minimal vient d’être défini par arrêté, comportant notamment l’énoncé des dispositions propres à garantir les droits des usagers ainsi que, le cas échéant, les solutions envisagées pour garantir le droit à une vie familiale des personnes accueillies ou accompagnées, un bilan financier, un plan de financement et un budget prévisionnel ;
  • le cas échéant, l’exposé précis des variantes proposées et les conditions de respect des exigences minimales que ces dernières doivent respecter ;
  • un état descriptif des modalités de coopération envisagées dans les cas où plusieurs personnes physiques ou morales gestionnaires s’associent pour proposer un projet.
Il a paru utile de citer l’article R. 314-4-3, non pour sa nouveauté très relative mais parce qu’il est illustratif d’un changement de culture. Les exigences qu’il porte risquent d’éliminer la plupart des petites associations qui ne seront pas capables d’apporter une réponse complète : en leur absence, il n’est pas sûr qu’il y ait toujours d’autres candidats, surtout pour répondre aux besoins de publics difficiles.
3]. L’instruction des candidatures
[Code de l’action sociale et des familles, articles R. 313-5 et R. 313-5-1]
L’autorité compétente pour délivrer l’autorisation désigne au sein de ses services un ou plusieurs instructeurs. En cas d’autorisation conjointe, chaque autorité compétente désigne à parité un ou plusieurs instructeurs. Lorsque l’appel à projet concerne des établissements ou services de la protection judiciaire de la jeunesse, les instructeurs des services de l’Etat sont désignés parmi les personnels des services déconcentrés de la PJJ.
Les instructeurs s’assurent de la régularité administrative des candidatures, le cas échéant en demandant aux candidats de compléter les informations fournies. Ils vérifient le caractère complet des projets et l’adéquation avec les besoins décrits par le cahier des charges. Ils établissent un compte rendu d’instruction motivé sur chacun des projets et peuvent en proposer le classement selon les critères prévus par l’avis d’appel à projet sur demande du président ou des coprésidents de la commission.
4]. Le classement des projets
[Code de l’action sociale et des familles, article R. 313-6-2]
Les projets sont classés par la commission de sélection puis inscrits « par ordre de classement » sur une liste qui vaut avis de la commission.
Le président ou conjointement les coprésidents de la commission établissent un rapport de présentation du déroulement de la procédure d’appel à projet, auquel est annexé ladite liste.
A noter :
si la commission de sélection ne classe pas les projets, les autorités ne peuvent continuer la procédure. Il leur faut alors relancer une procédure d’appels à projet.
5]. La délivrance de l’autorisation
Si la ou les autorités compétentes ne donnent pas suite à l’avis de la commission, elles informent sans délai les membres de la commission des motifs de leur décision.
L’autorisation du projet par la ou les autorités compétentes est délivrée dans un délai maximal de six mois à compter de la date limite de dépôt des projets mentionnée dans l’avis d’appel à projet. L’absence de notification d’une décision dans ce délai vaut rejet du projet.
La décision d’autorisation est publiée selon les mêmes modalités que l’avis d’appel à projet. Elle est notifiée au candidat retenu par lettre recommandée avec avis de réception. Elle est également notifiée aux autres candidats.
Le délai de recours court à leur égard à compter de cette notification (CASF, art. R. 313-7).
L’étude des dossiers appellera, avec le respect des délais évoqués plus haut, des instructeurs solidement outillés et disponibles pour se consacrer totalement à cette tâche.
Les autorités compétentes pour la décision devront parallèlement être dotées de services contentieux solides car ces textes, si l’on admettra qu’ils ne sont pas conçus forcément dans le but de générer du contentieux, ne manqueront pas, à coup sûr, d’en produire de la part des candidats non retenus.
D’une manière générale, on voit bien qu’une culture du contentieux risque de remplacer la culture de l’accompagnement qui existait dans un secteur social et médico-social reposant sur un fond d’associations petites et moyennes, lesquelles travaillaient généralement en bonne intelligence avec des administrations de tutelle dont la présence et l’ouverture compensaient la faiblesse des moyens.
On peut sérieusement se demander au demeurant comment les services actuels, qu’ils relèvent des conseils généraux, des agences régionales de santé, pour ne pas parler des DDCS (PP) arriveront à mettre en œuvre des procédures nouvelles pour eux.
En définitive, on peut se demander si la contrainte de la lettre et de l’esprit du droit communautaire auquel les rédacteurs du projet de texte devaient se conformer, déjà traduite à l’article L 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles, ne conduira pas, d’une part, à ralentir la croissance de ce secteur par limitation de facto du nombre de projets, d’autre part, à la réserver de facto à de grands groupes associatifs ou commerciaux.


3. UN DOCUMENT POLITIQUE : LE CAHIER DES CHARGES

[Code de l’action sociale et des familles, articles R. 313-3 et R. 313-3-1]
Ce document nouveau, dont la préparation ne manquera pas de donner aux autorités compétentes pour délivrer les autorisations, et à leurs services, un travail certainement important et délicat (en particulier en cas de procédure conjointe), devrait présenter un réel intérêt dans la mesure notamment où il obligera la ou les autorités compétentes pour donner l’autorisation à formaliser leur politique, et à rattacher ce cahier des charges à leurs schémas d’organisation de l’offre ainsi qu’au PRIAC.
Le cahier des charges rappellera et précisera les besoins sociaux et médico-sociaux à satisfaire (5), et décrira les modalités de la réponse attendue. Il autorisera les candidats à présenter des variantes aux exigences et critères qu’il pose au-delà d’un seuil d’exigences minimales s’imposant en tout état de cause.
Sauf pour les projets expérimentaux ou innovants, le cahier des charges doit mentionner :
  • la capacité en lits, places ou bénéficiaires à satisfaire ;
  • la zone d’implantation et les dessertes retenues ou existantes ;
  • l’état descriptif des principales caractéristiques auxquelles le projet doit satisfaire ainsi que les critères de qualité que doivent présenter les prestations ;
  • les exigences architecturales et environnementales ;
  • le cas échéant, l’habilitation demandée au titre de l’aide sociale ou de l’article L. 313-10 du code de l’action sociale et des familles ;
  • le montant prévisionnel des dépenses restant à la charge des personnes accueillies ;
  • les modalités de financement ;
  • les coûts ou fourchettes de coûts de fonctionnement prévisionnels attendus.
On ne peut que souhaiter, dans la pratique qui sera suivie, qu’il ne soit pas trop précis sur les modalités de mise en œuvre des réponses mais qu’il soit particulièrement exigeant sur des indicateurs de qualité robustes et de bon sens.
Pour les projets expérimentaux, le cahier des charges peut ne comporter qu’une description sommaire des besoins à satisfaire et ne pas faire état d’exigences techniques particulières, sous réserve du respect de celles qui sont relatives à la sécurité des personnes et des biens ou sans lesquelles il est manifeste que la qualité des prestations ne peut pas être assurée.
Pour les projets innovants, le cahier des charges peut ne pas comporter de description des modalités de réponse aux besoins identifiés et ne pas fixer de coûts de fonctionnement prévisionnels.


C. LES CAS PARTICULIERS ET EXCEPTIONS



1. LES EXTENSIONS NON IMPORTANTES ET LES REGROUPEMENTS D’ÉTABLISSEMENTS ET DE SERVICES

L’avis de la commission de sélection d’appel à projet social et médico-social n’est pas requis en cas de demande d’extension inférieure à un seuil, défini par décret simple (CASF, art. L. 313-1-1, I, al. 2) ; ces opérations sont donc exonérées de la procédure d’appel à projet mais nullement de l’obligation d’obtenir une autorisation préalable à leur mise en œuvre.
Ce seuil au-delà duquel les projets d’extension d’établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux doivent être soumis à la commission de sélection d’appel à projet « correspond à une augmentation de 30 % ou de 15 places ou lits de la capacité initialement autorisée, que cette augmentation soit demandée et atteinte en une ou plusieurs fois » (CASF, art. D. 313-2) (6).
Par ailleurs, les opérations de regroupement d’établissements et services préexistants, défini comme le rassemblement par un même gestionnaire de ceux de ses établissements et services déjà autorisés, ne sont pas soumises à la commission de sélection si elles ne s’accompagnent pas d’une extension de capacité supérieure au seuil précité et ne modifient pas les missions des établissements et services concernés » (CASF, art. D. 313-2).


2. LES PROJETS NE REQUÉRANT AUCUN FINANCEMENT PUBLIC

Pour les projets ne relevant pas de financements publics, le régime d’autorisation est allégé (CASF, art. L. 313-4) : l’autorisation est accordée si le projet satisfait aux règles d’organisation et de fonctionnement du code de l’action sociale et des familles et prévoit les démarches d’évaluation requises. Ce régime est organisé par quatre articles du décret n° 2010-870 du 26 juillet 2010.
L’article R. 313-8 du code de l’action sociale et des familles dispose que la procédure d’appel à projet ne leur est pas applicable et que les projets de création, de transformation et d’extension d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux font l’objet d’une demande d’autorisation déposée auprès de l’autorité ou des autorités compétentes pour délivrer l’autorisation.
L’article R. 313-8-1 du code de l’action sociale et des familles décrit, quant à lui, le dossier devant accompagner la demande ; la description est plus souple et le dossier plus succinct que pour les établissements « ordinaires ». Il est demandé en substance de fournir tout document permettant de décrire le projet et d’apprécier le respect des critères de l’article L. 313-4, notamment les éléments suivants :
  • la répartition prévisionnelle de la capacité d’accueil par types de prestations ;
  • la nature des prestations délivrées et les catégories de publics concernés ;
  • la répartition prévisionnelle des effectifs de personnels par types de qualifications ;
  • le budget prévisionnel en année pleine de l’établissement ou du service pour sa première année de fonctionnement.
Les opérations de regroupement d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux qui ne requièrent aucun financement public ne sont pas soumises à autorisation (mais simplement portées à la connaissance de l’autorité ayant délivré l’autorisation des établissements regroupés) si elles n’entraînent pas des extensions de capacité supérieures au seuil précité (cf. supra, 1) et ne modifient pas les missions des établissements et services concernés.
De même un « changement » de ce type d’établissement ou service ne requérant aucun financement public et ne comportant pas de transformation au sens d’une « modification de la catégorie de bénéficiaires de l’établissement ou du service » (CASF, art. R. 313-2-1, al. 1) relève d’une simple déclaration à l’autorité ayant délivré l’autorisation.


3. LES PROJETS DE CRÉATION ET D’EXTENSION D’ÉTABLISSEMENTS ET SERVICES DU SECTEUR PUBLIC DE LA PJJ

[Code de l’action sociale et des familles, article R. 313-9]
Les demandes d’autorisation d’établissements et services du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse pour les investigations et mesures éducatives ordonnées par le juge qui ne peuvent être mises en œuvre que par ces structures (CASF, art. L. 312-1, 4°) ne sont pas soumises à la procédure d’appel à projet mais simplement déposées auprès de l’autorité compétente de l’Etat, qui statue après avis des financeurs.
Un socle de règles est applicable à ces projets : critères d’autorisation (CASF, art. L. 313-2), délai de réalisation et de commencement d’exécution, cas de dépenses excessives ou injustifiées, convention d’habilitation.


4. LES PROJETS DE CRÉATION, DE TRANSFORMATION ET D’EXTENSION DE SMJPM ET DE SERVICES DÉLÉGUÉS AUX PRESTATIONS FAMILIALES

Il s’agit, d’une part, des services mettant en œuvre les mesures de protection des majeurs ordonnées par l’autorité judiciaire (SMJPM) (CASF, art. L. 312-1, 14°) et, d’autre part, des services chargés des mesures judiciaire d’aide à la gestion du budget familial (CASF, art. L. 312-1, 15°) : les cahiers des charges doivent prévoir des dispositions propres à garantir les droits des usagers et des règles internes de contrôle des personnes qui ont reçu délégation des représentants du service pour assurer la mise en œuvre de ces mesures.


D. LES DISPOSITIONS TRANSITOIRES



1. LE STOCK DE DOSSIERS

[Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 modifiée, article 131, II]
Les dispositions de la loi « HPST » ayant trait à la création de la commission d’appel à projet, à la suppression du comité régional de l’organisation sociale et médico-sociale et à la définition d’une nouvelle procédure d’autorisation s’appliquent aux nouvelles demandes d’autorisation, d’extension ou de transformation des établissements et services médico-sociaux déposées à compter du 1er juillet 2010.
Les mandats des membres des comités régionaux de l’organisation sociale et médico-sociale en cours ou arrivant à échéance durant l’année 2010 restent en vigueur pour l’examen des demandes déposées jusqu’au 1er juillet 2010, et ce pour une durée maximale de six mois à compter de cette date.
Il semble résulter du jeu de ces dispositions que les Crosms peuvent être réunies jusqu’à la fin de l’année 2010 pour donner un avis sur les dossiers de demande déposés avant le 1er juillet 2010.
L’article 3 du décret du 26 juillet 2010 dispose toute-fois que ce texte entre en vigueur le premier jour du mois suivant sa publication, soit donc le 1er août 2010, à l’exception du nouvel article R. 313-1 du code de l’action sociale et des familles (relatif à la composition de la commission de sélection d’appel à projet social et médico-social), qui est d’application immédiate.
Les textes antérieurs demeurent applicables aux demandes d’autorisation, de transformation et d’extension déposées avant le 1er août 2010.
On peut donc penser que ces dossiers étaient recevables jusqu’au 1er août 2010 et non seulement jusqu’au 1er juillet 2010.


2. LE STOCK D’AUTORISATIONS POSSIBLES

Dans le cadre de la procédure d’autorisation antérieure, lorsqu’une autorisation avait été refusée pour des raisons tenant à l’insuffisance des enveloppes disponibles et que lorsque dans un délai de moins de trois ans le coût prévisionnel de fonctionnement du projet devenait compatible avec le montant des dotations disponibles, il pouvait être autorisé en tout ou partie sans qu’il y ait lieu de procéder à nouveau aux consultations requises (CASF, art. L. 313-4, al. 8, abrogé par l’ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010).
Dans la période transitoire entre la procédure d’autorisation antérieure et la procédure d’appel à projet, les autorités compétentes apprécient si elles recourent ou non à la nouvelle procédure. Il leur appartiendra donc de choisir, pour la réponse aux besoins repérés dans le schéma régional d’organisation médico-sociale, et en fonction des dotations effectivement disponibles, soit de financer des projets en attente dans un délai maximal de trois ans (7), soit de lancer des appels à projets s’il considère que celui-ci peut apporter une réponse mieux appropriée à ces besoins.


E. LES CRAINTES SUSCITÉES PAR LA RÉFORME

Le régime des autorisations connaît à nouveau une évolution majeure, dans la suite logique des précédentes (passage aux autorisations limitées dans le temps et à la technique de la « fenêtre »). Cette évolution est marquée par l’esprit de la législation communautaire qui entraîne, comme nous l’avons vu, une logique d’appel d’offre.
La crainte est particulièrement vive dans le monde associatif, exprimée notamment par l’Uniopss, d’une instrumentalisation des associations et d’un encadrement réducteur ramenant le rôle des associations à celui de simples sous-traitants.
La procédure d’appel à projet, par sa forte proximité avec une procédure d’appel d’offre classique, cristallise toutes ces craintes.
Il faut citer à cet égard le témoignage d’un observateur privilégié, Michel Thierry, inspecteur général des affaires sociales, ancien directeur de l’action sociale (8) : « Il faut savoir reconnaître l’initiative sociale, l’appuyer lorsqu’elle rencontre des priorités des collectivités publiques, organiser la conjonction dans une démarche qui ne soit pas exclusivement descendante. C’est une question d’éthique de l’action publique et du service public [...].C’est une question d’efficacité tout court, si du moins l’on estime que la capacité d’engagement et d’innovation du mouvement associatif et la réactivité de la gestion associative sont des facteurs d’efficience et d’utilité publique. La capacité d’innovation ou de réactivité aux besoins sociaux n’est pas un vain mot. Qu’aurions-nous fait au milieu des années 1980 pour développer l’accompagnement des malades du sida et réagir tout de suite en matière de prévention, sans une génération associative qui n’a pas attendu la publication d’appels à projets ? Peut-on oublier que la plupart des grandes innovations de l’action sociale ces trente dernières années ont été portées à l’origine par des associations, puis légitimement encadrées dans des politiques publiques – insertion par l’activité économique, lutte contre le sida, prise en charge de l’accompagnement des toxicomanes, aide aux devoirs et accompagnement de la scolarisation, multiculturalisme et refus des discriminations, accompagnement des mourants, transformation des réponses à l’urgence sociale [...]. »
Il est permis, par ailleurs, de craindre que ce nouveau régime d’autorisation, au-delà de la question de principe majeure que pose Michel Thierry, se heurte :
  • d’abord à la complexité du régime transitoire, avec des arbitrages difficiles entre la mise en œuvre de la nouvelle procédure et le financement de bons projets qui avaient été rejetés faute de financement mais peuvent être « repêchés » ; on peut même imaginer que la nouvelle procédure n’entre en vigueur, de ce fait, qu’assez tard ;
  • ensuite à la lourdeur et à la minutie des procédures nouvelles, assorties de risques contentieux non moins lourds, qui justifieraient l’affectation de moyens administratifs spécifiques que les petites agences, les DDCS(PP) ou les petits départements auront du mal à dégager ;
  • enfin, au risque de blocage du processus de décision, lorsqu’il fait intervenir conjointement deux partenaires, qui n’est nullement négligeable. Ce risque existait déjà, la pratique de ces dernières années a montré qu’il ne fallait pas le surestimer. La loi « HPST » n’a rien changé à cet égard ; le contexte financier et politique vient, en revanche, introduire un élément supplémentaire de complexité.


(1)
Les financements publics s’entendent de ceux qu’apportent directement ou indirectement, en vertu de dispositions législatives ou réglementaires, les personnes morales de droit public ou les organismes de sécurité sociale en vue de supporter en tout ou partie des dépenses de fonctionnement (CASF, art. L. 313-1-1, I, al. 2).


(2)
Le régime de l’autorisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux est maintenu, ainsi que les conditions légales d’autorisation (CASF, art. L. 313-4).


(3)
Selon l’administration, la nouvelle procédure d’autorisation vise effectivement à réduire les délais de mise en œuvre des projets d’établissements et services, en supprimant notamment la mise en attente d’autorisation de projets ne disposant pas de financements. Cette attente pouvait durer trois ans, allongeant d’autant les délais de réalisation, et la demande devait être renouvelée si l’autorisation n’était pas donnée dans ce délai. Les promoteurs de projets déposeront désormais leur dossier en réponse aux choix stratégiques des décideurs, correspondant aux besoins identifiés des populations dans les territoires et aux financements disponibles (CNSA, dossier de presse sur la nouvelle procédure d’autorisation par appel à projet, 30 juillet 2010).


(4)
L’article R. 313-6-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit en effet que les informations dont les membres de la commission de sélection, les instructeurs et le secrétariat de la commission ont à connaître dans le cadre de l’examen des projets ne sont pas publiques et ne peuvent faire l’objet d’aucune communication hors les cas expressément prévus.


(5)
Le directeur de la CNSA, Laurent Vachey, a indiqué, le 3 septembre 2010, à l’occasion d’une conférence de presse, que les premiers appels à projets seraient « relativement ciblés » en termes de publics, de territoires couverts... car il est très difficile de connaître tous les besoins. A l’avenir, a-t-il précisé, « on peut imaginer que les appels à projets soient plus globaux et à horizon lointain ». Selon lui, il faudra trouver un équilibre entre les projets ciblés et les projets plus globaux.


(6)
L’Association des paralysés de France (APF) et la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) d’une part, l’Assemblée des départements de France (ADF) d’autre part, ont exercé un recours gracieux auprès du Premier ministre, à l’encontre du décret du 26 juillet 2010 relatif à la procédure d’autorisation par appel à projet des établissements sociaux et médico-sociaux. Elles demandent notamment à François Fillon de relever les seuils d’exonération pour les extensions de lits et places (« totalement décalés par rapport aux réalités actuelles ») afin qu’ils correspondent à au moins 50 % de la capacité autorisée et à plus de 50 lits ou places. Les associations, comme l’ADF, craignent des « appels à projet de pure forme », pour mener à bien des opérations d’extension sur lesquelles tout un chacun s’accorderait sur l’opportunité (courriers des 19 août et 2 septembre 2010). Le directeur général de la cohésion sociale leur a cependant opposé une fin de non-recevoir. « Il n’y a aucune raison de relever les seuils », a-t-il estimé, ajoutant que, dans ce cas, « trop de projets [échapperaient] à la nouvelle procédure ».


(7)
Etant précisé que « cette possibilité n’induit ni obligation ni priorité pour l’autorité », précise la CNSA (dossier de presse du 30 juillet 2010).


(8)
Thierry M., « Reconnaître l’initiative sociale », ASH n° 2652 du 26-03-10, p. 40.

SECTION 3 - LES LEVIERS DU RAPPROCHEMENT

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