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LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE MOBILE

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[Code pénal, articles 131-36-9 à 131-36-12 ; code de procédure pénale, articles 763-10 à 763-14 ; circulaire DACG n° CRIM 08 – 05/E3 du 28 janvier 2008, BOMJ n° 2008/1 du 29-02-08]
Le placement sous surveillance électronique mobile s’adresse à des détenus qualifiés de dangereux condamnés à de longues peines. Il peut être prononcé dans le cadre du suivi socio-judiciaire, d’une libération conditionnelle, de la surveillance judiciaire ou de la surveillance de sûreté.


A. UN DISPOSITIF RÉCENT APPELÉ À SE DÉVELOPPER...

Créé par la loi du la loi du 12 décembre 2005 (1) et étendu par celle du 25 février 2008 (2), le placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) consiste pour le condamné à porter un émetteur permettant à tout moment de déterminer à distance sa localisation sur l’ensemble du territoire national. Selon le même mécanisme que l’injonction de soins, la juridiction informe le condamné que cette mesure ne peut être mise en œuvre sans son consentement, mais qu’à défaut, une peine privative de liberté sera mise à exécution.
Son objet est de localiser la personne dont la dangerosité est avérée, lorsque la mesure apparaît indispensable pour prévenir la récidive « tant par son caractère dissuasif que par son souci de privilégier la réadaptation sociale des condamnés » . Cette mesure peut également être utilisée par les enquêteurs en cas de nouvelles infractions, puisque les données enregistrées peuvent être consultées aux fins d’incriminer ou de disculper le condamné qui aura ainsi pu être localisé.
La loi prévoit que sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne et favoriser sa réinsertion sociale .
Le PSEM peut être prononcé pour un maximum de quatre ans (deux ans renouvelables une fois) en matière correctionnelle, ou de six ans (deux ans renouvelables deux fois) en matière criminelle, dans la limite toutefois de la durée de la « mesure-support », qui peut être d’une durée moindre. Seuls les condamnés majeurs peuvent y être assujettis, mais le fait qu’ils aient été condamnés pour des faits commis pendant leur minorité n’exclut pas qu’ils soient soumis à ce dispositif.
Au 17 mars 2010, 74 mesures de PSEM avaient été prononcées, dont 17 dans le cadre d’une libération conditionnelle et 57 dans le cadre d’une surveillance judiciaire, 46 mesures étaient en cours. Parmi les PSEM terminés, 9 libérations conditionnelles sont arrivées à terme, 3 ont été révoquées partiellement ou totalement, 4 surveillances judiciaires sont arrivées à terme et 16 ont été retirées partiellement ou totalement. Les révocations ou retraits sont essentiellement liés à un non-respect des obligations ou interdictions du PSEM (3).
La progression de ce dispositif est rapide, bien qu’il s’agisse d’une mesure qui reste encore exceptionnelle comparée notamment aux personnes placées sous surveillance électronique fixe (4). Le taux d’échec est important, et apparaît lié non à la récidive mais aux difficultés à supporter un dispositif que les intéressés décrivent comme stigmatisant et extrêmement contraignant.
Toutefois, estimant que « les premiers placements sous surveillance électronique mobile prononcés démontrent qu’il est un outil essentiel de prévention de la récidive, particulièrement efficace pour garantir l’ordre public et la sécurité des personnes », le ministre de la Justice préconise « un développement impératif de cette mesure » en invitant les parquets à la requérir chaque fois qu’elle sera possible (5).


B. ... DANS LE CADRE DE PLUSIEURS « MESURES-SUPPORT »

Le placement sous surveillance électronique mobile n’est pas une peine ou une mesure de sûreté supplémentaire. Elle est ordonnée, selon le cas, par le juge de l’application des peines, le tribunal de l’application des peines ou la juridiction régionale des mesures de sûreté, comme obligation supplémentaire d’une mesure de suivi socio-judiciaire, de surveillance judiciaire, de surveillance de sûreté ou de libération conditionnelle. Le PSEM peut être prononcé dès le début de cette « mesure-support » ou pour certaines dans un second temps.
Dans tous les cas, le service pénitentiaire d’insertion et de probation est chargé d’une enquête préalable de faisabilité ainsi que du suivi de la « mesure-support ».


1. UN SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE

[Code pénal, articles 131-36-9 à 131-36-12, R. 61-32 et R. 61-33]
Peuvent être assujettis à un PSEM les condamnés majeurs qui ont purgé une peine privative de liberté de sept années au minimum, lorsqu’ils font l’objet d’un suivi socio-judiciaire à titre de peine complémentaire. Ils doivent d’abord faire l’objet d’un examen destiné à évaluer leur dangerosité et à mesurer le risque de commission d’une nouvelle infraction.
La mesure peut être décidée par la juridiction de condamnation depuis l’entrée en vigueur de la loi du 12 décembre 2005. Elle peut également l’être par le juge de l’application des peines, à titre d’obligation nouvelle de la mesure de suivi socio-judiciaire. Dans ce cas, l’examen de dangerosité est ordonné par le juge de l’application des peines, qui peut solliciter l’avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté . Dans tous les cas, c’est le juge de l’application des peines qui détermine les modalités concrètes de ce placement.
En cas de non-respect des obligations du PSEM, le juge de l’application des peines peut mettre à exécution, totalement ou partiellement, la peine d’emprisonnement prévue en cas de non-respect des obligations du suivi socio-judiciaire (cf. supra, § 4, B).
Une procédure de repérage systématique des détenus pouvant être éligibles à cette mesure a été mise en place par l’administration pénitentiaire et le parquet, afin de saisir au besoin le juge de l’application des peines. Outre la constatation d’une dangerosité, la mesure ne peut être envisagée que si cette mesure apparaît indispensable pour prévenir la récidive à compter du jour où la privation de liberté a pris fin. C’est donc seulement à la suite de la peine initiale ou à la suite de l’emprisonnement prononcé en cas d’inobservation des obligations d’un suivi socio-judiciaire qu’un PSEM peut être ordonné.


2. UNE SURVEILLANCE JUDICIAIRE

[Code de procédure pénale, articles 723-30 et R. 61-35]
Sous réserve des mêmes critères liés à la condamnation et à la dangerosité du condamné qu’en matière de suivi socio-judiciaire, le PSEM peut être prononcé comme obligation d’une mesure de surveillance judiciaire. En cas de non-respect, le retrait des réductions de peine peut être prononcé totalement ou partiellement par le juge de l’application des peines. L’examen de dangerosité peut se substituer à l’expertise préalable en matière de surveillance judiciaire.
Le PSEM peut être ordonné avant la libération de l’intéressé, mais aussi, à la différence du suivi socio-judiciaire, à la place d’une mise à exécution du retrait de réductions de peine en cas de non-respect des autres obligations de la mesure. Le PSEM peut donc être à cet égard une nouvelle forme de sanction, y compris par exemple en cas de non-respect de l’injonction de soins.


3. UNE LIBÉRATION CONDITIONNELLE

[Code de procédure pénale, articles 731-1 et R. 61-34]
S’agissant des obligations et interdictions qui peuvent être prévues dans le cadre d’une libération conditionnelle à la suite d’une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru, qu’il soit ou non prononcé, la loi renvoie aux mêmes dispositions, y compris pour ce qui concerne le PSEM. En conséquence, tout condamné à sept années de privation de liberté au moins pour une de ces infractions, soumis à un examen de dangerosité, peut faire l’objet d’une telle obligation. La décision est prise par le juge de l’application des peines ou le tribunal de l’application des peines compétent, après avis facultatif de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté. L’examen de dangerosité peut se substituer à l’expertise préalable en matière de libération conditionnelle.
A la différence de la surveillance de sûreté, le PSEM ne peut, dans ce cas-là, être prononcé qu’au moment de la libération conditionnelle. Il ne peut donc pas sanctionner en cours de mesure un non-respect des autres obligations de la libération conditionnelle.
La révocation totale ou partielle de la libération conditionnelle est encourue en cas de non-respect des obligations du PSEM.


4. UNE SURVEILLANCE DE SÛRETÉ

[Code de procédure pénale, article 706-53-19]
La surveillance de sûreté comprend des obligations identiques à celles qui sont prévues dans le cadre de la surveillance judiciaire, en particulier le placement sous surveillance électronique mobile. Cette mesure est donc de nature à assortir la plupart des surveillances judiciaires prononcées, sous réserve que la personne concernée dispose d’une liberté de déplacement (6). Le niveau de dangerosité exigé pour prononcer un PSEM apparaît moindre que celui qui prévaut pour prononcer une surveillance de sûreté.
C’est, dans cette hypothèse, la juridiction régionale des mesures de sûreté qui est compétente pour prendre la décision, selon la procédure applicable à cette juridiction. Le président de la juridiction régionale de la rétention de sûreté avertit la personne placée sous surveillance de sûreté que le placement sous surveillance électronique mobile ne pourra être mis en œuvre sans son consentement mais que, à défaut ou si elle manque à ses obligations, le placement dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté pourra être ordonné.
En cas de non-respect des obligations du PSEM, le placement au centre de sûreté peut être prononcé.


C. LES SPÉCIFICITÉS TECHNIQUES DU PSEM



1. UN ÉMETTEUR-RÉCEPTEUR GPS

La personne placée sous surveillance électronique mobile est équipée avant sa libération d’un émetteur – ressemblant à une grosse montre – fixé en principe à la cheville et d’un émetteur-récepteur portable appelé également « unité de géolocalisation » qui se porte à la ceinture ou en bandoulière. L’émetteur envoie en permanence un signal radio capté par l’émetteur-récepteur et dispose d’un GPS (positionnement par satellite) permettant de localiser la personne. A défaut de réception satellitaire, le relais est assuré par un système de positionnement fondé sur le réseau téléphonique GSM. Le dispositif est complété par un récepteur statique placé soit au domicile de la personne, soit par exemple sur son lieu de travail qui, branché sur une prise électrique, peut prendre le relais du récepteur portable .
Les données de localisation sont communiquées par le dispositif à un prestataire et à un « pôle centralisateur » relevant de l’administration pénitentiaire selon une fréquence variable en fonction du mode de surveillance choisi. Si la personne pénètre dans une zone d’exclusion ou tente d’enlever ou de neutraliser l’émetteur-récepteur, un signal d’alarme se déclenche.


2. DES ZONES D’INCLUSION ET D’EXCLUSION

[Code de procédure pénale, article R. 61-23]
Confiée au service pénitentiaire d’insertion et de probation et à du personnel de surveillance spécialisé de l’administration pénitentiaire, l’enquête de faisabilité technique doit permettre de délimiter différentes zones, qui seront précisées par la décision de PSEM :
  • des « zones d’inclusion », c’est-à-dire des zones desquelles la personne placée ne peut sortir, généralement un lieu de travail ou de résidence, selon des horaires d’assignation ;
  • des « zones d’exclusion », c’est-à-dire des lieux dont la fréquentation est interdite, sauf éventuellement à certains horaires. Il peut s’agir de lieux fréquentés par les mineurs ou de domiciles de victimes ;
  • le cas échéant des « zones tampon », c’est-à-dire des zones situées à proximité des zones d’exclusion permettant d’alerter le condamné de son approche d’une zone d’exclusion et d’avertir au besoin les autorités judiciaires.
En pratique, le PSEM comporte des limites technologiques qui ne permettent pas de délimiter des zones d’exclusion avec précision, particulièrement si elles sont nombreuses, telles que les établissements scolaires, ni de garantir une localisation permanente des personnes placées sous ce dispositif.


Exemple des difficultés pratiques du PSEM

M. A est condamné à 18 ans de réclusion criminelle pour des faits de corruption de mineurs, de viols et agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans avec plusieurs circonstances aggravantes par personne ayant autorité, faits commis entre 1989 et 1995, le suivi socio-judiciaire n’étant donc pas encouru.
Après avoir purgé 15 années de détention du fait des réductions de peine, n’ayant été admis à aucun aménagement de peine, il est libérable en juillet 2009. Il est placé à compter de cette date sous surveillance judiciaire, avec injonction de soins, pour une durée de deux ans par le tribunal de l’application des peines avec un PSEM pour une durée de un an renouvelable, au vu d’un examen de dangerosité et des conclusions de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.
La décision du juge de l’application des peines fixant les modalités de la mesure prévoit que l’intéressé résidera dans une structure d’accueil qu’il peut quitter chaque jour de 9 heures à 18 heures, avec une zone de circulation délimitée à environ la moitié d’un arrondissement parisien, et à l’intérieur même de cette zone 34 lieux interdits pouvant être fréquentés par des mineurs tels que collèges, centres sportifs et de loisirs, squares...
A la suite de nombreuses alarmes indiquant que M. A pénètre dans des zones d’exclusion ou qu’il a neutralisé délibérément le dispositif, en novembre 2009, le juge de l’application des peines ordonne le retrait à hauteur de huit mois de la durée des réductions de peines dont il avait bénéficié. La cour d’appel, saisie par M. A, réduit ce retrait à cinq mois, estimant que les conditions de mise en œuvre du PSEM n’apparaissaient pas garantir le respect de sa personne et sa réinsertion, et relevant « un sentiment d’exaspération de découragement » de l’intéressé du fait de cette mesure.
A la suite d’un nouvel examen de dangerosité qui préconise le maintien du PSEM « dans le cadre d’un principe de précaution » et d’une nouvelle enquête de faisabilité, le juge de l’application des peines ordonne le renouvellement de cette mesure pour une durée de un an. Il prévoit toutefois que dès sa sortie d’incarcération M. A. sera hébergé en province dans une nouvelle structure d’accueil, avec des horaires d’assignation similaires. Il sera interdit de sortir du département où il est assigné, mais avec une liberté de circulation dans tout ce département.


(1)
Loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales.


(2)
Loi n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.


(3)
Réponse du ministre de la Justice à question écrite n° 70581 de M. Folliot Ph., député, publiée au JO du 11-05-10.


(4)
Qui étaient 4 448 au 1er janvier 2010, cf. infra les aménagements de peine, le PSE...


(5)
Circulaire DACG du 16 octobre 2009, BOMJ n° 2009/6 du 30-12-09.


(6)
La première personne placée sous surveillance de sûreté étant en hospitalisation d’office, la question ne s’est pas posée.

SECTION 3 - LES MESURES DE SÛRETÉ

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