Premier principe d’une prise en charge thérapeutique, celui du consentement du patient aux soins proposés.
A. AFFIRMATION DU PRINCIPE DU CONSENTEMENT DU PATIENT
[Code de la santé publique, articles R. 4127-35 et R. 4127-36]
Le consentement du patient « doit être recherché dans tous les cas ». Lorsque le patient est en état d’exprimer sa volonté, le médecin doit accepter de sa part un éventuel refus des soins proposés et l’informer des conséquences de son choix.
Le consentement d’un patient ne peut être recueilli qu’après qu’il a reçu une information sur ce que le médecin lui propose. A cet égard, « le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. [...] Il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension » .
On pense d’abord à la prescription d’un traitement médicamenteux ou à une intervention chirurgicale mais le consentement et l’information sont attendus pour toute prise en charge, même psychothérapeutique.
B. LE CONSENTEMENT PARTICULIER DES AIS EN SOINS OBLIGÉS
[Code de la santé publique, articles R. 4127-36 et R. 4127-42]
En dehors d’un patient mineur ou d’un patient majeur protégé, d’une urgence et du cas où le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, il n’est pas prévu de disposition particulière sur le consentement du patient.
Il n’y a donc aucune dérogation particulière relative aux AIS en soins obligés ou en détention, tant en ce qui concerne leur information sur les soins que le recueil de leur consentement à ces mêmes soins. De son côté, le juge de l’application des peines recueille l’acceptation par le condamné du principe de l’injonction de soins.
Le projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle prévoyait peu ou prou de diminuer la portée du consentement du condamné, notamment sur la « castration chimique », mais la loi finale n’a rien modifié. Avec la remise en question d’un principe fondamental du soin en France, les débats furent souvent passionnels parmi les politiques, entre position sécuritaire parfois qualifiée de liberticide, et position humaniste parfois qualifiée de laxiste.
En revanche, force est de constater que ce consentement est recueilli dans un contexte contraignant pour le patient-condamné, puisque, s’il ne se soumet pas aux soins, il risque une nouvelle privation de liberté, clairement énoncée dans le cadre de l’injonction de soins. On sait que le médecin doit accepter le refus du patient, et l’informer des conséquences de son choix, mais informer le patient d’un risque d’incarcération (ou de rétention de sûreté) consécutif à son refus semble mal venu dans une relation thérapeutique, et risque d’être interprété par le patient comme du chantage. Il est alors important que le médecin ait des connaissances solides et spécialisées sur les soins obligés pour informer le patient de manière « loyale, claire et appropriée » afin de maintenir malgré tout une logique dans l’alliance thérapeutique.
LES SOINS AUX AUTEURS D’INFRACTIONS SEXUELLES INCARCERES EN AQUITAINE : BILAN ET PERSPECTIVES
Une étude organisée par ERIOS (CRIAVS Aquitaine), en lien avec l’Agence régionale de l’hospitalisation d’Aquitaine et la direction interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux, a été réalisée de décembre 2008 à janvier 2009 sur les soins délivrés aux auteurs d’infractions sexuelles condamnés et incarcérés en Aquitaine. A partir des résultats de cette étude, s’est développée une équipe soignante mobile prenant en charge les AIS en centres de détention.
UN BILAN MITIGÉ
Dans le cadre de cette étude, un questionnaire, portant sur les caractéristiques de la prison, les moyens sanitaires existants, les besoins et les difficultés rencontrées, a été adressé aux médecins référents des soins psychiatriques de tous les établissements pénitentiaires d’Aquitaine, qui étaient invités à répondre en équipe. Objectifs : dresser un état des lieux, identifier des compétences locales, lister les besoins et les difficultés rencontrées.
Sept équipes psychiatriques sur neuf ont répondu (soit 78 % de répondeurs). Il apparaît que plus de 88 % des AIS condamnés sont dans les centres de détention, moins de 12 % sont dans les maisons d’arrêt (ils représentent moins de 8 % de l’ensemble des détenus d’une maison d’arrêt).
Des postes de psychiatre sont vacants. Même si l’effectif est complet, toutes les possibilités thérapeutiques ne sont pas représentées : la psychanalyse est absente dans trois établissements pénitentiaires, de même que la thérapie groupale. Quant aux thérapies cognitivo-comportementales et au traitement anti-hormonal, ils sont absents dans cinq établissements.
Des prises en charge individuelles existent dans tous les établissements pénitentiaires, mais leur nombre est inconnu. Des prises en charge groupales existent dans 50 % des cas, sont très diversifiées (paroles, théâtre, informations, art-thérapie, etc.) et concernent au maximum 50 auteurs d’infractions sexuelles, soit moins de 10 % de la totalité des AIS condamnés et détenus.
Enfin, 100 % des interrogés rapportent au moins une difficulté liée au contexte pénitentiaire des soins et 50 % qualifient d’« insatisfaisante » la continuité des soins à la libération.
UNE EQUIPE MOBILE DE SOINS (INTER-CD)
Il s’agit d’une équipe de soins, située à Bordeaux, qui se déplace dans les centres de détention de l’Aquitaine afin de développer, en partenariat avec les équipes psychiatriques des UCSA, des prises en charge groupales pour les auteurs d’infractions sexuelles. Le choix s’est porté sur les centres de détention, et non sur les maisons d’arrêt, les AIS y étant les plus représentés (cf. supra).
Le projet a été élaboré début 2009. L’équipe Inter-CD, composée de psychiatres, de psychologues, d’infirmiers et de psychomotriciens, s’est constituée à la fin de 2009. Au début d’avril 2010, elle a commencé des prises en charge groupales pour les AIS, animées par des binômes de soignants issus de l’UCSA et d’Inter-CD.