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LES PRINCIPES DE NÉCESSITÉ, DE SUBSIDIARITÉ ET DE PROPORTIONNALITÉ

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La loi du 5 mars 2007 renforce les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité préalables à l’ouverture d’une mesure judiciaire de protection juridique (tutelle, curatelle et sauvegarde de justice). Elle met ainsi le droit français en conformité avec la recommandation du Conseil de l’Europe sur les principes concernant la protection juridique des majeurs incapables du 23 février 1999.
Ces principes ne sont pas applicables au mandat de protection future qui constitue une mesure conventionnelle.


A. LE PRINCIPE DE NÉCESSITÉ

[Code civil., article 428]
La loi consacre d’abord un principe jurisprudentiel repris par le Conseil de l’Europe : la nécessité de la mesure. En effet, depuis longtemps, la Cour de cassation exige du juge, outre la preuve d’une altération des facultés personnelles du majeur, la vérification du besoin de protection (1).
Quant au Conseil de l’Europe, il a défini, dans sa recommandation de 1999, le principe de nécessité de la façon suivante : « Aucune mesure de protection ne devrait être instaurée à l’égard d’un majeur incapable à moins que celle-ci ne soit nécessaire, compte tenu des circonstances particulières et des besoins de l’intéressé. »
La loi du 5 mars 2007 reprend ce principe et prévoit, de manière générale et explicite, que « la mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge qu’en cas de nécessité ».
Cette règle est ensuite déclinée au travers des définitions des différentes mesures. Ainsi, la personne doit :
  • dans le cas d’une demande de tutelle, avoir besoin d’être « représentée d’une manière continue dans les actes de la vie civile » ;
  • dans le cas d’une demande de curatelle, avoir besoin d’être « assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile » ;
  • dans le cas d’une demande de sauvegarde de justice, avoir besoin « d’une protection juridique temporaire ou d’être représentée pour l’accomplissement de certains actes déterminés » (C. civ., art. 433 et 440).
Toujours dans cet esprit, à peine d’irrecevabilité, le juge ne peut être saisi que par requête accompagnée d’un certificat médical circonstancié, constatant l’altération des facultés personnelles du majeur et décrivant les conséquences de celle-ci sur la vie civile de l’intéressé. « Cette obligation a pour objectif de s’assurer du sérieux des requêtes déposées et d’éviter d’ouvrir à la légère une procédure en incapacité » (2). En outre, les mesures de protection juridique doivent désormais être révisées régulièrement « afin que le juge puisse s’assurer qu’elles sont bien encore nécessaires et ne privent pas inutilement de leur liberté d’agir les personnes concernées » (3).


B. LE PRINCIPE DE SUBSIDIARITÉ

[Code civil, article 428]
Autre principe qui fonde la protection juridique des majeurs : celui de subsidiarité. Le législateur de 2007 rétablit ainsi un principe déjà affirmé par la loi du 3 janvier 1968 et également repris par le Conseil de l’Europe dans sa recommandation de 1999 (4). Auparavant, ce principe pouvait se déduire de l’ancien article 498 du code civil qui interdisait l’ouverture d’une tutelle si l’application d’un régime matrimonial permettait de pourvoir aux intérêts de la personne protégée.
Généralisant et élargissant cette règle, la loi du 5 mars 2007 prévoit que la mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge que lorsqu’il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne protégée par l’application :
  • des règles du droit commun de la représentation, de celles qui sont relatives aux droits et devoirs respectifs des époux (notamment les devoirs de secours et d’assistance mutuels prévus par l’article 212 du code civil) et des règles des régimes matrimoniaux ;
  • d’une autre mesure judiciaire de protection moins contraignante ou encore d’un mandat de protection future conclu par l’intéressé.
S’agissant des régimes matrimoniaux, le texte renvoie aux articles 217, 219, 1426 et 1429 du code civil. En effet, lorsque l’un des époux est hors d’état de manifester sa volonté, l’autre époux peut être autorisé par le juge à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire (C. civ., art. 217). Il peut s’agir d’un acte de disposition (vente d’un immeuble, par exemple) ou d’administration (mise en location du logement familial notamment) portant sur un bien indivis ou commun. Sur le fondement de l’article 219, l’époux peut même demander au juge de l’habiliter à représenter son conjoint, d’une manière générale ou pour certains actes particuliers, dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial. Enfin, sous le régime de communauté, en application des articles 1426 et 1429, si l’un des époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’administration des biens est conférée par jugement à l’autre époux.
En outre, un décret du 29 octobre 2004 portant réforme de la procédure en matière familiale tend à favoriser l’application du droit commun des régimes matrimoniaux à la place de l’ouverture d’une mesure de protection et donne compétence au juge des tutelles pour autoriser un époux à représenter de manière durable ou à l’occasion d’un acte particulier son conjoint « hors d’état de manifester sa volonté » (C. proc. civ., art. 1286 ; décret n° 2004-1158 du 29 octobre 2004, J.O. du 31-10-04).
Dès lors, saisi d’une demande d’ouverture d’une mesure judiciaire de protection, le juge doit donc désormais vérifier si les difficultés du majeur ne peuvent pas être réglées par le jeu de ces autres règles.
Une jurisprudence antérieure à la réforme et assez ancienne montre d’ailleurs que les juges ont déjà cherché à favoriser la solution reposant sur l’entraide familiale plutôt que le placement sous une mesure de protection juridique, même lorsque toutes les conditions pour placer le conjoint sous une telle mesure étaient réunies (5).


C. LE PRINCIPE DE PROPORTIONNALITÉ

[Code civil, article 428]
Enfin, la loi du 5 mars 2007 introduit un principe de proportionnalité conduisant à adapter la mesure de protection à la situation du majeur. Concrètement, le choix de la mesure devra dépendre du degré d’altération des facultés de la personne à protéger, et son contenu devra être individualisé en fonction de cette altération.
Cette exigence est déclinée par plusieurs dispositions de la loi autorisant le juge à adapter le contenu de chaque mesure soit pour en atténuer les effets (curatelle et tutelle allégées), soit, au contraire, pour les aggraver (curatelle renforcée).


(1)
« La nécessité, pour le malade, d’être représenté d’une manière continue dans les actes de la vie civile » dans le cadre d’une tutelle, par exemple : Cass. civ. 1re, 12 mai 1981, requête n° 79-16903, disponible sur www.legifrance.gouv.fr


(2)
Rapport A.N. n° 3557, Blessig, janvier 2007, p. 44.


(3)
« En se prononçant sur la nécessité d’une mesure, il convient d’envisager tout mécanisme moins formel et de tenir compte de toute assistance qui pourrait être apportée par des membres de la famille ou toute autre personne », énonce ainsi la recommandation du Conseil de l’Europe.


(4)
Cass. civ. 1re, 9 novembre 1981, requête n° 80-16.011, accessible sur www.legifrance.gouv.fr

SECTION 1 - LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA PROTECTION DES MAJEURS

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