Cette question n’est pas simple. Vous la poseriez à une centaine de mandataires, chacun vous répondrait autre chose. Mais tout dépend également de ce que l’on entend par « travailleur social », qui n’est pas non plus une profession clairement définie. A la lecture de sa définition – inscrite dans le décret n° 2017-877 du 6 mai 2017 relatif à la définition du travail social (paru au Journal officiel du 10 mai 2017) –, on voit bien que la tâche du mandataire judiciaire s’inscrit aussi dans cette caractérisation, liée à l’accompagnement des personnes. Le métier de mandataire judiciaire est très encadré, notamment par le certificat national de compétences et le code de l’action sociale et des familles (CASF).
Au cours de la formation, il y a toute une partie sur la protection des personnes et leur accompagnement, la connaissance des publics, les pathologies, tout ce qui recouvre les relations et les interventions. En ce sens, il existe de nombreuses passerelles. Ces dernières années, le métier de mandataire judiciaire à la protection des majeurs a beaucoup évolué. Avec une nette accentuation de la dimension juridique. A tel point que, aujourd’hui, le mandataire est souvent considéré comme un auxiliaire de justice. Mais si, dans le cadre d’une réforme, il avait été question de l’assimiler purement et simplement à un auxiliaire de justice, cela n’avait finalement pas abouti.
Je côtoie régulièrement un grand nombre de mandataires, de professionnels, de magistrats – tous les intervenants qui gravitent autour de ce secteur – et il me semble, à titre personnel, que le métier de mandataire judiciaire est à la croisée du travail social et de la justice. Cette appréciation dépend du mode d’exercice de cette fonction, selon que les mandataires exercent en libéral ou dans une association. Dans ce deuxième cas, ils ont le sentiment, pour une grande majorité d’entre eux, d’être des travailleurs sociaux. En revanche, lorsque les mandataires exercent en libéral, ils se considèrent davantage comme des auxiliaires de justice travaillant sur mandat judiciaire.
Les missions du mandataire judiciaire sont extrêmement règlementées en fonction du code civil. Mais dans les faits, les services et les institutions sont tellement surchargés, qu’ils se reposent volontiers sur le mandataire pour accomplir telle ou telle tâche qui relève de l’accompagnement. Même si ce n’est pas forcément de son ressort. Chaque professionnel agit en fonction de ses convictions et de sa propre boussole : certains n’hésitent pas à outrepasser les limites de leur mandat, en prenant en compte l’intérêt de la personne vulnérable. Ils font de l’accompagnement, pour pallier les manques de services sociaux. D’autres s’y refusent, pour ne pas engager leur responsabilité ou parce qu’ils sont assez fermes sur les limites données par leur mandat.