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« Considérer l’autre dans sa différence sans le stigmatiser »

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A l’heure où la maladie d’Alzheimer est synonyme de solitude et d’isolement, le mouvement « Alzheimer Friendly » promeut l’inclusion par la sensibilisation de la population et la prise en compte de la parole des malades. En France, Isabelle Donnio, vice-présidente et cofondatrice du Bistrot mémoire de Rennes (devenu Globalcité), défend ce concept inclusif depuis deux décennies.
Le mouvement « Dementia friendly » est né dans les pays anglo-saxons. Comment le définiriez-vous ?

C’est un mouvement qui prône le principe de l’inclusion en mettant l’accent sur la transformation des individus dans la société et pas seulement la transformation de l’environnement matériel et architectural. On est dans une invitation des citoyens à prendre en considération l’autre dans sa différence sans le stigmatiser ; en créant des conditions, en nous transformant nous-mêmes pour le rejoindre dans sa réalité. Il s’agit de ne pas lui demander l’effort de s’ajuster à notre société, c’est à chacun de nous qu’il revient de le faire, pour aller à sa rencontre.

A quel moment la question d’une société plus inclusive pour les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer ou de troubles associés s’est-elle exportée dans notre pays ?

Le concept d’inclusion vient du champ du handicap avec les apports de l’anthropologue Charles Gardou. C’est lorsque l’on a commencé à considérer les personnes qui vivent avec une maladie neuro-évolutive, comme un handicap cognitif invisible, que l’on a utilisé ce concept d’inclusion. Ce qui nous parasite en France, dans les politiques publiques notamment, c’est le critère de l’âge et les représentations négatives du vieillissement et de la maladie d’Alzheimer qui cristallisent nos peurs. Considérant à la fois que c’est une maladie du grand âge, de manière statistique, et que nos politiques publiques sont trop cloisonnées, on ne l’a pas placée dans le champ du handicap, mais dans celui de la gérontologie.

Le Bistrot mémoire rennais (aujourd’hui Globalcité) a suivi le modèle de nos voisins belges avec la volonté de transformer les représentations vis-à-vis des personnes et des maladies. Ce mouvement remonte au début des années 2010, au niveau européen, et à 2017 en France, avec Rennes qui a été la première ville « Dementia friendly ». Puis la crise du Covid a mis tout à l’arrêt. On ne pouvait plus réaliser d’actions de sensibilisation.

Maintenant que la pandémie est derrière nous, que faudrait-il faire pour relancer la machine ?

Malheureusement en France, depuis le « plan Alzheimer 2008-2012 » et le « plan maladies neuro-dégénératives », achevé en 2019, il n’y a rien de nouveau en termes de politiques publiques. Le concept de « Dementia friendly » n’est pas connu, hormis dans quelques villes pionnières. France Alzheimer a mis en place une « charte ville aidante Alzheimer » pour développer des actions inclusives sur tout le territoire. Cette dynamique des « Dementia friendly communities » est indispensable et doit être soutenue, mais le risque existe que des communes s’affilient en ne remplissant que certains critères. C’est un bon début, mais il faut être vigilant et constant pour consolider chaque petite transformation et réussir sur le long terme.

On pourrait repartir du Livre blanc de 2019, pour relancer cette dynamique dans le cadre de politiques publiques s’inscrivant dans le mouvement « Dementia friendly » avec des financements pérennes. C’est un travail de longue haleine et d’humilité pour transformer la société et changer le regard sur le vieillissement.

La question du financement est-elle centrale ?

Aujourd’hui nous manquons de moyens financiers, car il faut des salariés pour animer les temps de rencontres hebdomadaires avec la psychologue, développer les partenariats, répondre aux appels à projets, coordonner ces actions et les animer. Le groupe des « Ambassadeurs malades jeunes » (en lien avec la consultation multidisciplinaire Cluedo), a besoin de ressources pour atteindre le grand public et les professionnels, notamment via les réseaux sociaux… Il faut un minimum de professionnalisation des bénévoles, en complémentarité avec les services sanitaires et médico-sociaux.

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