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Manager de transition : un état d’esprit

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Couteaux suisses de la transformation des organisations et de la gestion de crise, les dirigeants de transition investissent également le secteur social. De nouvelles formations qualifiantes apparaissent, signe que les grands marqueurs de la culture d’entreprise ont bien été importés.

Une situation de crise à débloquer ? Une fusion-absorption entre entités associatives à mener ? Des équipes de salariés lessivés à remotiver ? Un établissement à remettre d’urgence aux normes après une inspection de l’agence régionale de santé (ARS) ? Un projet associatif à redéfinir ? Une nouvelle politique de qualité de vie au travail à instaurer ? Une restructuration à organiser avec un PSE ou un plan de départs à la clé ?… Les raisons de faire appel à un manager de transition ne manquent désormais plus dans le champ sanitaire, social et médico-social.

Longtemps, on a cru ce type de prestation, consistant à faire venir dans la structure un professionnel extérieur le temps de reprendre en main une organisation défaillante ou de diriger des actions de conduite du changement, réservé aux seules grandes entreprises privées de l’industrie ou des services.

Performances économiques

Mais les temps ont changé. Sous les effets combinés de l’introduction de la notion d’évaluation de la qualité du service rendu par les établissements à gestion associative (loi du 2 janvier 2002), de la rationalisation organisationnelle des réseaux associatifs exigée par les organismes financeurs (ARS et conseils départementaux en tête) et d’une tendance générale au recul de l’Etat-providence, qui contraint le secteur associatif à adopter un modèle économique plus performant et moins dépendant des fonds publics, il a fallu se mettre au diapason. Et sortir progressivement d’une culture associative marquée par un certain militantisme pour se rapprocher des process en vigueur dans le monde de l’entreprise. Quasiment une révolution culturelle.

Aujourd’hui, sans être encore pleinement entré dans les mœurs, le management de transition commence à faire son chemin dans les établissements dédiés à la petite enfance, au handicap ou au grand âge. Ils n’hésitent plus à recourir aux services de directeurs d’établissements, de sites, de directeurs des ressources humaines (DRH) ou de directeurs administratifs et financiers (DAF) temporaires pour accompagner la mise en place d’un projet de transformation structurelle ou résoudre une situation de crise ponctuelle. A l’Afiph, une structure de 2 300 salariés qui gère 88 établissements et services sur le seul département de l’Isère, on compte quatre managers de transition sur la vingtaine de postes de directeurs de l’association. « Le mouvement n’est pas si récent, mais les choses se sont accélérées depuis la crise Covid qui a vu nombre de dirigeants associatifs partir vers de nouveaux projets de vie », explique Philippe Nicot, son directeur général. « C’est un recours encore émergent qui s’explique en partie par la pénurie de recrutements sur des fonctions managériales que connaît le secteur. Certains s’y réfèrent à titre préventif, mais cela demeure encore massivement de l’appel de crise », abonde Bruno Vidal, directeur associé chez MCG Manager, un cabinet de recrutement spécialisé, depuis 2011, dans le management de transition adapté aux structures sanitaires, sociales et médico-sociales et de l’économie sociale et solidaire (ESS).

« De plus en plus de quadras »

Pourtant, les profils de ces candidats au management de transition évoluent aussi. « Hier, il s’agissait surtout d’anciens dirigeants ou de cadres proches de la retraite ou de retour après un long burn-out. Aujourd’hui, on croise de plus en plus de quadras », reconnaît Christian Clauzonnier, membre du collectif Directiom qui regroupe quelques dizaines de « cafdésiens » ayant opté pour ce type de carrière. Ce changement de sociologie, mais aussi les besoins nouveaux exprimés par les structures, ont d’ailleurs poussé le collectif à s’associer à l’organisme de formation lyonnais Enseis Management (Ecole des solidarités, de l’encadrement et de l’intervention sociale) pour créer un cycle de formation spécialement dédié au management de transition dans le domaine sanitaire, social et médico-social (voir encadré). Une première dans un secteur où, pour l’heure, les employeurs regardent surtout le CV et l’expérience du candidat pour savoir s’il sera à même d’exercer la mission de transition qu’on compte lui confier. « C’est parfois une erreur, car un bon directeur de structure ne fait pas nécessairement un bon manager de transition. C’est pourquoi il faut être clair au moment de la définition de la mission et de sa contractualisation. Un directeur est censé s’occuper de presque tout dans l’établissement qu’il dirige, pas un manager de transition qui doit rester concentré sur ses objectifs », estime Christian Clément, également adhérent de Directiom et spécialisé dans le pilotage de structures d’insertion et d’hébergement médico-social.

Profils expérimentés

Cette posture particulière du manager de transition a d’ailleurs été placée au cœur des 70 heures de cursus que propose Enseis Management. La formation ne s’adresse pas aux primo-apprenants, mais à des publics pouvant justifier à minima de cinq ans d’expérience dans la direction d’établissements sociaux ou médico-sociaux. « Notre formation insiste beaucoup sur la posture, l’éthique et la déontologie qu’un manager de transition doit adopter durant son intervention. Elle apporte des grilles de lecture pour développer la capacité d’analyse de situations complexes dont le manager de transition doit faire preuve. Ses contenus sont étroitement liés aux valeurs politiques et caractéristiques du secteur social et médico-social et étayent le manager de transition dans la conduite opérationnelle de sa mission afin que les transformations qu’il apporte se pérennisent après son départ », résume Murielle Cuttat, directrice de l’organisme de formation.

L’exercice d’équilibriste n’est pas simple. Les professionnels estiment que la durée d’une telle mission doit impérativement demeurer limitée – pas plus de six ou huit mois – et qu’elle s’accomplit d’autant mieux que la présence sur site du manager de transition n’excède pas quelques jours par semaine. Certains vont même jusqu’à refuser le rapport de sujétion direct avec la gouvernance de la structure d’accueil que représenterait un contrat de travail, lui préférant le recours à l’auto-entreprise ou au portage salarial pour facturer leurs prestations et conserver une certaine liberté d’action. Quant à savoir si le dirigeant de transition doit participer ou non au recrutement de son successeur pour bien marquer le caractère ponctuel de son intervention, les avis sont partagés.

Manager de transition, c’est donc bien plus qu’un boulot : un véritable était d’esprit ! « Ceux qui effectuent une mission de transition et qui se voient proposés un CDI finissent tous par revenir chez nous au bout d’un certain temps car ils ne s’inscrivent plus totalement dans ce modèle contractuel qui les enferme d’une certaine façon », assure Bruno Vidal. Léna Basile, ancienne DRH de transition dans le secteur de la protection de l’enfance, confirme : « C’est un métier passionnant, mais éprouvant. Il faut se donner à 200 % dès le premier jour. Cela demande d’établir un diagnostic de la situation très rapidement pour pouvoir redresser les choses. »

« Ni de l’intérim, ni du coaching »

Revers de la médaille qui l’a incitée à prendre du champ avec cette activité : l’absence de retour d’expérience peut se révéler frustrante. « En six mois, on n’a pas le temps de voir les fruits de notre travail », explique-t-elle. « Le management de transition n’est ni de l’intérim, ni du coaching. Il ne s’agit ni d’effectuer un remplacement poste pour poste, ni d’identifier les faiblesses d’une structure pour les corriger. C’est pour cela que la séquence préparatoire avec le commanditaire est capitale : les objectifs de la mission doivent être définis dès le départ, le manager doit accepter de laisser des éléments de direction de côté et de les déléguer », souligne Christian Clauzonnier. Bref, un positionnement professionnel à adopter… et à apprendre.

La formation d’Enseis Management en quatre points clés

→ Un cursus de 70 heures sur 10 jours construit autour de quatre modules principaux :

– maîtriser les registres et les spécificités d’intervention du manager de transition ;

– adopter un positionnement et une éthique d’intervention adaptés à des missions de management de transition ;

– maîtriser les éléments de professionnalisation nécessaires à la réalisation de mission de transition ;

– acquérir les outils d’analyse, de diagnostic, d’animation d’équipe, de conduite du changement, de gestion de la complexité requis en situation de transition.

→ Un cursus modulable : chaque bloc pouvant être suivi indépendamment sous forme d’une formation de 2 jours.

→ Une pédagogie construite autour « d’un dialogue de professionnels à professionnels » où les enseignements sont assurés par des managers de transition confirmés. La formation n’est pas ouverte aux primo-apprenants, mais réservée à des salariés disposant déjà de cinq ans d’expérience dans des fonctions managériales ou d’encadrant dans le sanitaire, social et médico-social.

→ La formation est qualifiante mais n’est pas pour l’instant inscrite au Répertoire spécifique de France Compétences et donc pas éligible au CPF.

Paroles de pros

« Notre formation insiste beaucoup sur la posture, l’éthique et la déontologie qu’un manager de transition doit adopter durant son intervention. Elle apporte des grilles de lecture pour développer la capacité d’analyse de situations complexes dont le manager de transition doit faire preuve. »

Murielle Cuttat, directrice d’Enseis Management”

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