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« J’ai pris une grosse claque »

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Chaque mois, des néophytes, ou jeunes diplômés du travail social, nous racontent pourquoi ils ont choisi leur métier et comment ils envisagent l’avenir.

D’abord musicien, j’ai abandonné cette passion par rejet de la compétition qui y règne, pour une autre – l’écriture – qui m’a poussé vers le journalisme. Porté par une envie : parler des personnes invisibilisées. Au-delà d’écrire leurs histoires, j’ai vite ressenti le besoin de m’impliquer et de lutter contre l’exclusion.

C’est en effectuant un service civique dans un Spip (service pénitentiaire d’insertion et de probation) que j’ai été confronté au choc carcéral. J’ai pris une grosse claque en ressentant l’isolement des détenus. Ils subissaient de plein fouet le confinement, avec la fin des visites et des activités. J’ai commencé à me poser des questions sur la justice, la réinsertion. On imagine la prison à travers les séries. Mais on n’en sait pas grand-chose. J’ai compris que j’avais encore des représentations. J’ai lu Foucault et d’autres. Avec en tête cette question : comment aider les personnes à sortir du cycle prison-rue-prison ?

Tout en continuant le journalisme, j’ai suivi un contrat d’apprentissage pour devenir éducateur spécialisé. Mes expériences dans un café associatif, auprès de personnes précaires, puis en quartier politique de la ville ont renforcé mon envie d’agir contre la reproduction sociale.

Un accompagnement m’a particulièrement marqué, celui de Christian. Alors qu’il gagnait bien sa vie sur des plateformes pétrolières, ce Gabonais a dû s’établir en France : décédée après avoir tenté de s’y faire soigner, sa femme a laissé seules leurs trois filles, dont la benjamine qui a contracté, comme elle, le VIH. Après deux ans à la rue, Christian intègre un foyer, trouve un emploi d’aide à domicile, régularise sa situation en obtenant une autorisation provisoire de séjour parent d’enfant malade. Un titre précaire qu’il doit renouveler tous les six mois. Pas de droits CAF possibles pour ses enfants. Pas de RSA ni d’allocation chômage. Ses demandes d’obtention d’un titre de séjour pérenne sont rejetées à plusieurs reprises. Epuisé par ces maltraitances, Christian craque et se retrouve en observation à l’hôpital, tandis que ses filles sont recueillies par le Samu social. Une fois sorti d’affaire, malgré l’affection qui nous unissait, Christian a rompu tout contact avec moi.

Cette expérience bouleversante m’a confirmé que les réponses institutionnelles sont souvent déconnectées des réalités du terrain. Elle a renforcé ma conviction qu’il faut se battre et enrayer la spirale qui détruit les personnes exclues. J’aime dire aux personnes qu’elles ne sont pas seules et qu’on va trouver des solutions. Ensemble.

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