Son utilisation est parfois galvaudée, mais le terme de « médiation » prend un sens tangible lorsqu’il est décliné dans la sphère familiale. Là, tout type de désaccord, qu’il s’agisse d’une séparation, de conflits autour du maintien des liens (entre enfants et parents, entre petits-enfants et grands-parents) ou de la prise en charge d’un parent âgé, peut être motif à solliciter l’intervention d’un médiateur. Sa mission : proposer un espace de discussions pour tenter de rétablir un lien et envisager des solutions qui conviennent à tous. « Ni conseillers ni thérapeutes, notre mission consiste à accompagner les personnes de façon neutre et impartiale en leur apportant un cadre sécurisant où elles peuvent s’exprimer sans craindre d’être jugées », expose Marie-Laure Pesme, qui exerce ce métier en libéral à Orléans.
Si les situations rencontrées sont variées, les difficultés relationnelles entourant la séparation occupent l’essentiel des consultations. « La présence d’un tiers fait souvent redescendre les émotions et permet de remettre de l’ordre dans la relation parentale. La médiation met un peu d’huile dans les rouages quand la famille est grippée », illustre Virginie Thoby, médiatrice familiale au sein de l’Espace médiation EPE 35, à Rennes.
Alternative à la justice, la médiation s’est progressivement fait un nom à partir des années 2000. Elle peut être suggérée, voire imposée par un juge ou à l’initiative des familles. L’idée : rendre les personnes actrices de leurs décisions. « Qui de mieux placé qu’elles pour savoir ce dont elles ont besoin ? Plutôt que d’imposer, on leur laisse le choix de régler leurs différends, en évitant ou en retardant le recours au juge », poursuit la professionnelle rennaise. Tel un équilibriste, le médiateur familial progresse à tâtons entre les tensions que renvoient les personnes accompagnées et le projet qu’elles parviennent à trouver un terrain d’entente. « Il faut sans cesse reformuler, dépolluer les phrases de reproches. On reçoit pas mal de souffrance, mais c’est satisfaisant d’aider les gens à trouver la paix », reconnaît Pierre Hosselet, médiateur familial au sein de l’association Résonances médiations, à Marseille.
Dans ce lieu sécurisé où il garantit le respect de l’équité entre les membres d’une même famille, le médiateur familial montre nécessairement des capacités relationnelles et d’écoute, de la flexibilité, de la discrétion et de la patience. « Il faut arriver à maintenir la bonne distance. On n’est pas là pour réparer ni pour décider à la place des personnes », prévient Virginie Thoby qui, après avoir été témoin en tant qu’éducatrice sociale des dégâts provoqués par les conflits conjugaux sur les enfants placés, apprécie désormais de pouvoir les accompagner sur le chemin de l’apaisement. De son côté, Marie-Laure Pesme, formée à la médiation familiale voilà quinze ans, conserve son enthousiasme de débutante. « Rien ne me fait plus plaisir que de voir, au fil des séances, des personnes renouer le dialogue alors qu’elles n’étaient pas capables de rester dans la même salle d’attente. La médiation permet cela, et c’est pourquoi j’estime tant ce métier. »
A la croisée de la psychologie, du droit et de la sociologie, la médiation familiale est une spécialisation qui ne s’improvise pas. Pour y accéder, un seul diplôme : le DEMF (diplôme d’Etat de médiateur familial), ouvert aux titulaires d’un bac + 3 dans une discipline sociale, juridique, éducative ou sanitaire. La formation s’échelonne sur deux ans. Elle vise l’acquisition de notions juridiques, sociologiques et psychologiques et d’un savoir-faire par un ensemble de méthodes et outils permettant de conduire des entretiens de médiation. « Au quotidien, on traite tous les aspects qu’ils soient émotionnels, psychologiques ou juridiques », instruit Pierre Hosselet, de Résonances médiations, à Marseille. Près de 70 % des médiateurs familiaux sont issus de professions sociales, avec une solide pratique auprès des familles en difficultés. Les autres exercent dans des services de médiation familiale ou d’action sociale, ou parfois en libéral, à plein temps ou en complément d’une autre activité.