Thierry L.(1) a confié le soin à Alis de louer son bien de 63 m2 pour un loyer de 550 € charges comprises. Un trois-pièces proche du centre-ville de Toulouse, idéal pour un couple avec enfant, qui était loué 300 € de plus par l’ancien propriétaire. Pour autant la décote consentie par Thierry L. le satisfait. « Donner un usage social à ce logement rejoint mes valeurs. La condition était que je n’y perde pas. Les aides compensent à peu près le faible loyer. Je peux rembourser mon investissement et je n’ai pas à m’embêter avec la gestion », résume-t-il.
Alis ? C’est une jeune agence immobilière sociale qui a décidé de mettre les moyens pour attirer des propriétaires comme Thierry L. et constituer son parc de logements privés à loyers modérés. Dans le cadre du plan national pour le Logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme, cette structure publique de délégation de gestion locative est pilotée par Toulouse Métropole, l’Office public de l’habitat et le centre communal d’action sociale de la ville ainsi que les associations d’aide au logement Habitat et Humanisme et l’Union Cépière Robert Monnier, réunis au sein d’un groupement d’intérêt public (GIP).
En plus des avantages fiscaux liés aux conventionnements avec l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et de primes de l’Etat, les propriétaires volontaires bénéficient, via Toulouse Métropole, d’une prime annuelle pouvant aller jusqu’à 5 000 €. Un fonds de sécurisation garantit les loyers en cas de vacances ou d’impayés. Le bien est remis en l’état par l’agence à l’échéance du bail et les propriétaires ont accès à des prêts à taux zéro pour des travaux. « Avoir affaire à un acteur public solide me met en confiance », souligne Thierry L.
« Pour favoriser le bail d’habitation classique, le plus avantageux pour les locataires, notre stratégie est de rassurer les propriétaires autant que de sécuriser les capacités d’autonomie des locataires », défend Olivier Fohanno, agent de Toulouse Métropole mis à disposition pour diriger l’agence immobilière. Aussi tout est mis en œuvre pour que ce nouveau dispositif soit attractif. « Des propriétaires peuvent craindre qu’en louant à bas prix, leur logement devienne un squat ou leur soit restitué en mauvais état. Nous devons aussi entendre ces peurs », précise le directeur.
Le SIAO (service intégré d’accueil et d’orientation) est chargé d’orienter les candidats issus d’hébergements d’urgence ou collectifs vers les locations de 30 % à 45 % moins chères que le prix du marché, qui correspondent respectivement aux catégories Loc2, logement social, et Loc3, logement très social, de l’Anah. Une conseillère en économie sociale et familiale étudie chaque dossier et s’assure que les ressources des demandeurs correspondent bien au triple du loyer proposé. Employée à temps plein, elle travaille au cas par cas, comme le font les associations d’aide au logement. Avec elle, le directeur d’Alis, un agent technique, un agent immobilier et un agent d’administration et de communication pratiquent la gestion locative adaptée (GLA).
« De la consommation d’eau aux difficultés d’emploi, l’idée est de prévenir tout problème en amont qui pourrait contrevenir à l’exécution du contrat », explique Olivier Fohanno. A minima, un rendez-vous est fixé tous les trois mois avec chacune des parties. En cas de problèmes marqués d’un locataire, les associations de solidarité, membres du GIP, peuvent être mises à contribution pour un accompagnement social renforcé.
Dans le cadre de sa mission d’intermédiation locative (IML), l’association Habitat et Humanisme loue des biens à des propriétaire privés pour les sous-louer ensuite à ses bénéficiaires. Pour sa directrice à Toulouse Christine Aguilar, valoriser le mandat de gestion est crucial pour dérouler la politique du Logement d’abord : « Le plan finance des accompagnements en IML d’une durée de 18 mois. Mais notre association peine à voir ensuite glisser ses baux spécifiques vers des baux d’habitation classique. Nous avons besoin d’un relai. Habitat et Humanisme gère 60 logements privés dans la région toulousaine. L’idée serait qu’une partie de leurs propriétaires se laissent convaincre de poursuivre en mandat de gestion avec Alis. »
L’agence immobilière se fixe comme premier palier d’atteindre un parc de 50 logements. Ceux qui peuvent héberger une famille sont les plus recherchés.
(1) Le nom a été modifié.