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Cinq gros trucs en plus

A l’heure où j’écris ces lignes, le film d’Artus frôle les 5 millions de spectateurs. A l’heure où vous les lirez, il devrait dépasser tranquillou bilou les 6 millions. C’est simple, si on votait avec un ticket de cinéma le 9 juin, Un p’tit truc en plus serait le premier parti de France et enverrait une bonne trentaine de députés à Strasbourg et Bruxelles. A ce niveau stratosphérique, on se pince. Et on se pose. Que retenir à chaud de ce succès phénoménal ? Disons, cinq gros trucs.

Les handis, c’est bankable. Ce n’est pas la première fois qu’un long métrage avec un trisomique ou un fauteuil roulant attire les foules : 3,6 millions pour Le Huitième Jour, 19 millions pour Intouchables… Si les handis sont le plus souvent invisibilisés dans l’espace public, voilà la preuve par trois que ce tabou n’a aucun fondement.

Des valides très handicapés. Le tour de force du film, c’est qu’on n’y rit pas des handis, mais avec eux. Et qu’en prime ceux-ci se moquent allégrement des valides. Du propriétaire du gîte aux clients des supermarchés, l’inversion des rôles fonctionne à plein tube : ceux qui n’ont pas un truc en plus ont visiblement une case en moins.

Le beau rôle des éducs. Un p’tit truc en plus a fait découvrir à des millions de Français un métier sous-représenté dans les médias et les fictions, celui d’éduc. Alice Belaïdi, totalement crédible dans le rôle, y est pour beaucoup et l’engagement d’Artus pour ce métier « pas du tout valorisé, pas du tout assez bien payé » est manifeste. Il leur rend d’ailleurs hommage dans une dédicace à la fin du film.

Un casting validé. Si les travailleurs sociaux sont emballés, les antivalidistes se sont déchaînés : « Tant que les films et les scénarios sur des personnes handicapées seront faits par des personnes valides, ça ne nous plaira pas », a ainsi estimé Céline Extenso, militante chez les Dévalideuses. Il est vrai qu’avec ce postulat, on clôt le débat. L’appropriation culturelle est pourtant très relative puisque Artus est justement démasqué par un trisomique quand il essaie de se faire passer pour un handi. Oui, mais, poursuit Céline Extenso dans le Huffington Post, les personnages ne sont pas fictifs mais calqués sur leur propre personnalité. « Pourquoi ne les estime-t-on pas capables de jouer un rôle ? » Ben justement. Ils jouent pour la plupart dans d’autres fictions et ne seront pas cantonnés à interpréter leur propre rôle. Ce serait alors une véritable révolution « color blind »… Mais serait-elle possible sans l’impact d’Un p’tit truc en plus ?

Un miroir grossissant. Un tel succès ne pouvait laisser insensible le Festival de Cannes pourtant peu réceptif aux comédies. On a donc invité l’équipe du film à monter les marches, mais les organisateurs se sont pris les pieds dans le tapis rouge. Artus a dû prendre dans ses bras le jeune Sofian, qui est atteint d’ataxie, pour gravir les escaliers, braquant ainsi le projecteur sur la faible accessibilité de la plus célèbre salle de cinéma du monde. Un petit scandale qui faisait suite à son coup de gueule contre les marques de luxe qui n’avaient pas jugé bon d’habiller l’équipe pour la montée des marches. Sauf que ce qui passait sous les radars s’entend très fort maintenant…

Reste à voir si tous ces trucs préfigurent une société réellement inclusive. Car il y a du boulot. Par exemple, les athlètes porteurs d’un handicap cognitif ne pourront concourir que dans trois épreuves aux Jeux paralympiques. Et aucune épreuve n’est prévue pour les porteurs de trisomie ! Des jeux qui, de toute façon, n’attirent pas (encore) les foules : on s’arrache moins les places pour les JOP que les billets pour Un p’tit truc en plus

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