Anatole Le Bras le précise d’emblée : son livre ne raconte pas l’histoire des asiles d’aliénés ni celle de la psychiatrie au XIXe siècle, bien des historiens l’ont écrite avant lui. Son parti pris se veut plus humain, incarné, « à hauteur d’individu ». Mais qui sont les internés de l’époque ? Ils ont majoritairement entre 20 et 49 ans, en situation d’isolement social et familial. Les plus aisés se répartissent dans les asiles payants, les plus démunis là où l’assistance est gratuite. Si la misère joue un rôle dans une partie des internements, elle n’apparaît pas surdéterminante. « La population internée est avant tout une population laborieuse, dont la composition reflète la diversité des classes populaires (…) », souligne l’historien. Parmi elles, des ouvriers agricoles, des manœuvres, des petits artisans, des couturières, des blanchisseuses, des domestiques… Loin des représentations stigmatisantes et moralisantes de la folie, l’ouvrage décrit aussi les « manières d’être fou », les relations familiales, la sortie de l’asile, etc. Et nous rappelle la fragilité de l’être.
« Aliénés. Une histoire sociale de la folie au XIXe siècle », Anatole Le Bras, éd. CNRS, 25 €.