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« Changeons de modèle ! »

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Sortir du système d’autorisation établissement de la loi 2002-2, revenir sous le code de l’habitat et de la construction classique, redonner une plus grande autonomie aux directeurs, voilà quelques solutions préconisées par l’Association des directeurs au service des personnes âgées. Rencontre avec son directeur adjoint, Eric Fregona.
Que faudrait-il faire pour que les Ehpad ne soient plus assimilés à des hôpitaux avec leurs lots de restrictions hygiénistes ?

Les Ehpad doivent sortir de l’autorisation d’établissements de la loi 2002-2 et qu’ils relèvent, comme les résidences services seniors, du code de l’habitat et de la construction classique, avec un loyer, des charges de copropriété et de charges de services choisis par les résidents… Dans ce cas, les pouvoirs publics délivreraient des autorisations pour les services d’aide à domicile (SAD) et les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) afin qu’ils soient en lien avec un cabinet médical pour un accompagnement des usagers. On doit sortir du fonctionnement institutionnel pour avoir les mêmes droits et libertés que les autres citoyens.

Ne faudrait-il pas prioriser les recrutements d’animateurs ou d’éducateurs spécialisés pour justement sortir de la vision du soin, avec des effectifs actuels qui s’appuient principalement sur des aides-soignants et des infirmiers ?

Oui, c’est ce que nous demandons depuis le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale et nous continuerons de le réclamer dans le cadre de la future loi « bien vieillir ». Nous souhaitons que l’effort de la sécurité sociale puisse permettre de recruter des animateurs, des psychologues, des professionnels socio-culturels pour deux raisons. Il faut d’abord considérer que nous nous occupons non seulement de la santé physique des personnes accueillies, mais également de leur santé psychique. Aujourd’hui, dans une structure de 100 résidents, on est sur un équivalent temps plein d’animateur et 0,5 de psychologue. C’est totalement insuffisant. Pendant le Covid, la solitude a tué. Nous ne devons pas omettre cette souffrance.

Deuxième raison : l’Etat nous oppose perpétuellement que même si on ouvrait des postes on ne pourrait pas recruter parce qu’il n’y a pas assez d’infirmiers ou d’aides-soignants sur le marché. Soit, dans ce cas, permettez-nous de recruter d’autres profils. Des professionnels qui, s’ils ne pallieront pas le manque de personnels pour l’accompagnement aux toilettes, apporteront tellement au lien social.

Quelles sont les conséquences les plus marquantes de la crise Covid qui se sont inscrites dans la durée ?

Le Covid a été suivi par une phase d’épuisement puis de résignation car les promesses n’ont pas été suivies d’actes. Je parle de la fameuse loi « grand âge ». Beaucoup de directeurs ont démissionné ou étaient en situation de post-trauma, de souffrance. Aujourd’hui, ils disent : « J’en ai assez, on va changer et on va remettre du lien social et de la vie. On veut développer le pouvoir d’agir des résidents. » Notre réseau « Citoyennage » reprend d’ailleurs partout en région avec la volonté de mieux écouter les personnes âgées.

Le deuxième point, plus inattendu, c’est le refus des directeurs de baisser les moyens. Résultat : 75 % des structures sont en déficit. C’est un signe fort. La prise de conscience vient évidemment de la crise Covid, mais pas seulement. Le scandale Orpéa et le livre de Victor Castaner y ont contribué également. De nombreux adhérents ont décrété d’eux-mêmes qu’ils allaient baisser le taux d’occupation de 10 % pour rentrer dans les clous.

Quel devrait être le visage des Ehpad dans un avenir proche en termes d’organisation ?

Les établissements devraient à l’avenir permettre à ses usagers d’être dans le droit commun et non pas dans un dispositif spécifique, c’est-à-dire dépendre du code du droit des familles pour des personnes âgées dont la plupart ne sont pas sous protection juridique. En réalité, dès que l’on entre dans un établissement, on intègre un régime particulier, où on peut enfermer et attacher les résidents. C’est délirant quand on y pense.

Certains continueront de vouloir des structures de type hôpitaux, mais nous pensons que sur les 7 000 établissements, 70 % à 80 % devraient revenir à la raison et repartir sur une organisation de type habitat classique. Changeons de modèle !

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