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Liberté conditionnelle ou conditionnée

Les personnes en situation de handicap ou âgées n’ont pas la même qualité de vie et de liberté en fonction de la structure qui les héberge. Elles ne sont pas « logées à la même enseigne ». Il peut y avoir de grandes disparités dans le traitement et l’application des lois, pour des motifs divers plus ou moins recevables. J’exagère ? C’est que l’on ne s’est pas rendu dans les établissements où j’ai travaillé ou que j’ai visités.

Les conseils de la vie sociale (CVS) ont été créés pour donner au monde du médico-social, et aux usagers en particulier, l’illusion que nos politiques se soucient grandement de la qualité de vie et de la « bientraitance » des plus vulnérables. Modifié par le décret du 25 avril 2022, le CVS est peut-être plus étoffé que l’original, mais pas plus convaincant. On continue à mettre la poussière sous le tapis des apparences démocratiques.

A mes yeux, l’avantage du CVS, s’il y en a un, est de valoriser les personnes en situation de handicap qui y siègent, en leur donnant un sentiment d’importance et d’utilité. Mais est-ce suffisant ? Peut-on s’en contenter ?

Marcel Nuss, écrivain et formateur.

Noël chez nous

Cette année, lors d’un conseil de la vie sociale (CVS) où j’avais la fonction de représentante du personnel, deux des résidents élus ont réitéré leur envie de pouvoir profiter à Noël de la structure, laquelle est alors habituellement fermée. Les familles présentes accueillant leurs enfants à domicile ont compris cette demande de personnes n’ayant pas la même chance. Celle-ci a donc été prise en compte. Et pour cause ! Chacun avait ses arguments : raisons économiques, personnes vieillissantes en besoin de stabilité et n’appréciant plus les changements. Sans oublier la notion de respect de l’intimité, puisque les chambres en séjour vacances ne sont pas individuelles. Cette revendication ancienne a enfin été entendue car elle a été officiellement présentée lors d’un CVS.

Désormais, chaque résident est libre de faire ce qu’il veut de ce temps de congé. Pour autant, il semble important de ne plus imposer des poids d’organisation aux personnes accueillies, qui sont en toute logique au centre du dispositif. Une réalité qui conduit les professionnels à s’adapter aux attentes et besoins des personnes accompagnées, et non l’inverse. Le sujet est encore aujourd’hui sensible : entre l’impression de privation des acquis pour les salariés, qui n’en sont pas et avoir le sentiment que cette fermeture était notre seul avantage par rapport à des horaires de travail décalés (travail de nuit, le week-end, les jours fériés…). Comment faire autrement dans des métiers de l’accompagnement ?

Manuela Deparis, monitrice-éducatrice de l’association Handi Aide, dans l’Oise.

L’écoute au quotidien

Avec la restructuration des locaux de notre Ehpad, et pour créer une dynamique de construction participative de la vie quotidienne, l’idée de la création d’un Conseil de maison dans chacune des huit demeures de 12 à 13 habitants que compte l’établissement a fait son chemin.

Cette instance qui réunit, dans un cadre familier, tous ceux qui sont concernés par la vie quotidienne propre à chaque lieu, permet de lever bien des obstacles à l’expression des habitants et à l’exercice de leur droit aux choix. En effet, dans la mesure où les rencontres ont lieu dans l’espace de vie commune, les déplacements fatigants vers une salle de réunion disparaissent, les participants familiers des lieux peuvent plus facilement se faire entendre avec, au besoin, l’aide d’un tiers qui les connait bien. Dans ce cadre rassurant, sujets abordés, propositions, demandes, concernent le quotidien d’un petit groupe qui se connait, qui partage un même espace de vie, échange des avis, des souhaits et des critiques.

Françoise Desimpel, ancienne directrice d’Ehpad.

La dignité du risque

Et la France, alors ? Ici, il n’y a ni leader, ni mouvement structuré. Non pas qu’il n’y ait rien ! En santé mentale, après la création des groupes d’entraide mutuelle (GEM) de malades, nous voyons la reconnaissance des pairs-aidants et l’instauration de centres d’accueil et de résidence innovants où l’autodétermination des personnes progresse. Les associations gestionnaires d’établissements sont aujourd’hui chahutées par un mouvement d’« auto-représentants » qui s’estime mieux légitime à porter les attentes des personnes concernées. Mais cela reste encore timide. Nous pourrions nous dire que c’est affaire d’époque : les mises en cause des professionnels et des établissements ayant « charge d’âmes » au motif de risques courus ou encourus par les personnes qui leur sont confiées ne sont plus si rares. En France, après le secteur du handicap, le vent se lève du côté de l’âge. C’est une bonne nouvelle.

Christian Saout, membre du collège de la Haute Autorité de santé.

Maîtres de leurs choix ?

Il me revient une anecdote. Lors d’un comité consultatif d’usagers, certains résidents d’un foyer nous ont dit : « Vous affirmez que notre chambre est notre “chez nous”, mais je ne peux, comme vous le faites chez vous, y inviter quelqu’un, famille, ami, pour une nuit ou un week-end. »

Que faire de cette réclamation, somme toute légitime ? Très vite interviennent des limites administratives, sécuritaires, voire culturelles ou morales, qui pointent du doigt l’idée que l’institution est sans doute en elle-même un frein à l’autodétermination des personnes.

Alors toutes ces structures doivent-elles fermer pour permettre aux personnes de réellement s’autodéterminer, comme semblent l’indiquer certains rapports de l’ONU ou de la Commission européenne ? Les choses ne sont pas si simples.

Jean-Pierre Boissonnat, administrateur du Gepso.

Toutes ces contributions sont extraites du hors-série n° 34 des ASH d’octobre 2023, « Auto-détermination en établissement. Vers un nouveau mode d’accompagnement ». Pour commander un exemplaire, rendez-vous sur l'onglet « Boutique » du site ash.tm.fr.

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