Que ce soient des institutions ou des personnes physiques, je ne vois pas d’objection à facturer des clients. En revanche, l’Anas a une position claire sur le type d’actions payantes. Pas question de demander des honoraires à des usagers pour effectuer de l’accès aux droits, établir un dossier de revenu de solidarité active (RSA) ou une demande de prime d’activité… C’est interdit par le code de l’action sociale et des familles, et donc illégal. Le travail social n’est pas un champ commercial. Le législateur indique d’ailleurs qu’il ne doit pas y avoir « d’agent gris entre les citoyens et l’accès aux droits ». Des plateformes en ligne comme Mes-alloc.fr se l’autorisent pourtant, en faisant croire qu’elles vont faire gagner de l’argent aux gens, passant sous silence qu’il s’agit d’un droit social.
Bien qu’il y ait un peu plus d’assistants de service social indépendants qu’avant, leur part reste minoritaire. Aujourd’hui, la libéralisation du métier tient à la crise que traversent les travailleurs sociaux et au manque de moyens. Mais cela ne s’y limite pas. Les professionnels savent où ils vont, ce sont les institutions qui posent des demandes orientées à l’inverse du sens et de l’éthique professionnelle. La contractualisation du RSA, pour laquelle on enjoint les acteurs à fournir un taux de contrats comme s’il s’agissait d’une garantie d’accompagnement, ou le fait que la qualité de service soit jugée en fonction du nombre de dispositifs actionnés en témoignent.
Pourtant, je ne suis pas certain que le libéral soit la solution. S’il n’est pas compliqué de s’installer, il n’est pas facile d’en vivre. Faire ce choix entraîne des risques, comme le glissement vers la sous-traitance forcée. D’autant que le manque d’attractivité des métiers du secteur pourrait favoriser le phénomène. L’exercice en indépendance implique de trouver des clients et, pour s’assurer un salaire, il est possible d’être moins regardant sur leur profil. De plus, nous ne sommes pas que des techniciens juste bons à remplir des formulaires, nous aidons des personnes en difficultés. Mais, finalement, chacun prend ce qu’il peut ou lutte à contre-courant. L’action publique doit toutefois rester garante de la régulation et de la réglementation du travail social.