« L’effet du secteur de l’autonomie sur le changement climatique est significatif puisque ses émissions représentent autour de 9 millions de tonnes de CO2 », soit l’équivalent de l’empreinte carbone de 900 000 Français. Tel est le principal résultat de l’enquête menée par le think tank The Shift Project, en partenariat avec la CNSA et l’EN3S, présentée le 26 septembre. Formations, accompagnements des usagers et des professionnels, mise à disposition d’outils opérationnels… la réussite de la décarbonation du secteur passe par une étroite collaboration entre les pouvoirs publics et les établissements et services. Sur le terrain, les acteurs du secteur multiplient les initiatives. « Nous mettons en place des choses évidentes. Par exemple, sur la question de l’alimentation, nous allons privilégier le poulet au bœuf car son empreinte carbone est cinq à dix fois plus faible, renseigne Noémie Le Clech, gériatre au centre hospitalier de Lisieux (Calvados), qui compte 214 lits d’Ehpad. L’idée n’est pas de faire des établissements vegan mais de diminuer les émissions tout en améliorant la prise en charge de la dénutrition. »
Selon l’enquête, 10 milliards de kilomètres, soit l’équivalent de 250 000 tours de la terre, sont parcourus chaque année par les professionnels du secteur lors de leurs déplacements domicile-travail. Si certaines structures développent la visioconférence pour enclencher une politique de réduction des émissions, d’autres vont plus loin. « Avec une flotte de 250 véhicules et environ 1,3 million de kilomètres annuels, c’est un sujet majeur, reconnaît Christèle Cammas, directrice générale de l’association Reso (Résilience Occitanie), qui accompagne 2 600 usagers (enfants, adolescents, adultes, majeurs protégés, personnes âgées). En plus de passer à l’électrique ou à l’hybride, nous réfléchissons à mutualiser le transport des enfants vers les lieux de prise en charge. » De plus en plus de gestionnaires travaillent aussi sur des programmes de mobilité douce pour leurs collaborateurs et les personnes accompagnées avec la mise à disposition de vélos.
Autre angle d’attaque : les infrastructures. Le secteur de l’autonomie représente 80 millions de mètres carrés de bâtiments, et nombre d’entre eux sont vétustes ou assimilés à des passoires énergétiques. « Le bâtiment représente 27 % de notre bilan carbone, c’est énorme », se désole Olivier Baron, directeur général de l’Alefpa (Association laïque pour l’éducation, la formation, la prévention et l’autonomie), qui compte plus de 300 établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux. « Nous expérimentons actuellement, dans les Hauts-de-France, l’utilisation de ressources locales, à savoir des briques de lin fabriquées à Dunkerque, pour mieux isoler nos structures », poursuit-il. L’association se trouve toutefois face à un dilemme : ces briques coûtent plus cher que la laine de verre, moins écologique. Or, souligne Olivier Baron, « les autorités de tutelle ont tendance à préférer le plus économique. Pour réussir la décarbonation, il faut donc que les politiques, les fédérations, les pouvoirs publics suivent le pas. »