Bienvenue en Ouganda, ancienne « perle de l’Afrique » de l’Empire britannique, réputée pour ses paysages majestueux comme ses guerres civiles sanglantes, son inamovible président Yoweri Museveni, et… sa répression féroce visant la communauté LGBT. Déjà illégale et passible de peines de prison à perpétuité depuis une loi datant de la colonisation anglaise (toujours en vigueur mais non appliquée), l’homosexualité n’en finit plus d’obséder la classe politique ougandaise, jusqu’au plus haut sommet de l’Etat. Le 21 mars dernier, le Parlement adoptait une nouvelle législation conçue pour accentuer la répression des « déviants », comme les qualifie Yoweri Museveni, et punir de lourdes sanctions les relations dites « contre nature ». « Le projet de loi prévoit la peine de mort pour le délit d’homosexualité aggravée, l’emprisonnement à vie pour le délit d’homosexualité, jusqu’à 14 ans pour la tentative d’homosexualité. Cette peine peut aller jusqu’à 20 ans de prison pour la promotion de l’homosexualité », s’était alarmé le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme au lendemain du vote des députés ougandais. L’initiative parlementaire a également provoqué l’indignation d’Amnesty International, de l’Union européenne, du Royaume-Uni et des Etats-Unis, la Maison Blanche mettant en garde l’Ouganda contre de potentielles représailles économiques.
Face au tollé général, Yoweri Museveni a finalement fait machine arrière en renvoyant le projet de loi au Parlement pour « réexamen », sans pour autant renoncer à une répression accrue mais en demandant aux élus de « faire la distinction entre le fait d’être homosexuel et se livrer à des actes homosexuels » : « Il est clair que notre société n’accepte pas [leur] conduite, donc la loi proposée doit être claire afin que ce qui est criminalisé ne soit pas l’état d’une personne ayant une propension déviante mais plutôt les actes d’une personne agissant sur cette base ou en faisant la promotion. Le projet de loi doit être revu et inclure une disposition qui stipule clairement qu’une personne qui est présumée ou soupçonnée homosexuelle et qui n’a pas commis d’acte sexuel avec une autre personne de même sexe ne commet pas d’infraction », précise le chef de l’Etat.
La répression en Ouganda ne vise pas seulement les homosexuels mais également les travailleurs sociaux qui seraient tentés de leur venir en aide, et nombre de ces derniers en sont réduits à la clandestinité pour échapper aux diverses menaces et intimidations. En 2016, un groupe d’activistes et de travailleurs sociaux avaient ainsi été arrêtés à Kampala lors d’une formation sur la défense des droits de l’Homme et la promotion des minorités sexuelles, et accusés d’incitation à la désobéissance civile. Une hystérie homophobe qui encourage les actes les plus brutaux, jusqu’à l’assassinat. D’autres travailleurs sociaux avaient par exemple été violemment battus en 2014 par une foule hostile dans la localité de Jinja (située dans l’est du pays), au prétexte d’avoir offert des soins de santé à la communauté LGBT. Trois ans plus tôt, un militant des droits de l’Homme et travailleur social assumant son homosexualité avait été tué à coups de marteau à son domicile, un meurtre vraisemblablement motivé par son orientation sexuelle, selon Human Rights Watch : « Le gouvernement ougandais doit assurer que les membres de la communauté homosexuelle du pays reçoivent une protection adéquate contre les violences, et il doit agir contre les menaces et propos haineux incitant à la violence et aux discriminations. » Un plaidoyer qui n’a jusqu’à présent guère ému les autorités.