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Respect

Le 21 mars, la Journée mondiale du travail social a célébré les professionnels du secteur. Un hommage comme tous les ans discret, voire anecdotique, si ce n’est pour quelques militants chevronnés ou quelques leaders institutionnels. Car, ici ou ailleurs sur la planète, les travailleurs sociaux restent dans l’ombre. Invisibles parmi les invisibles. Eux sans qui la paix sociale – si chère aux grands de ce monde – volerait en éclats. Eux sans qui les inégalités seraient plus criantes encore. Eux si nécessaires et si maltraités. Eux à travers lesquels cette journée internationale appelle à la construction d’un monde plus juste. Comment ne pas applaudir à l’invitation ?

Sauf que la tâche s’avère colossale. Non seulement il est encore bien des sociétés où les droits les plus élémentaires des populations sont bafoués, où la protection et l’intervention sociales sont illusoires, mais quand les travailleurs sociaux existent, le manque de reconnaissance et l’épuisement les attendent au tournant. L’aquabonisme gagne.

Au Royaume-Uni, par exemple, 40 % d’entre eux envisagent de changer de métier, selon un article de la revue International Social Work publié en 2022. En France, on ne compte plus les démissions, les ruptures conventionnelles, les burn-out, les reconversions professionnelles… « La stratégie d’un “grand remplacement” est en marche », ironise un éducateur dans un post sur les réseaux sociaux.

L’actualité nous rappelle pourtant à l’ordre : précarité professionnelle, alimentaire, énergétique… et désormais hygiénique. Un tiers des Français se privent de dentifrice, de shampoing, de papier toilette… indique un récent sondage. Un chiffre deux fois plus élevé qu’en 2021. Les clignotants sont au rouge : les situations d’extrême pauvreté auxquelles les travailleurs sociaux sont confrontés augmentent, les renvoyant à un sentiment d’impuissance, voire à leur propre fragilité matérielle.

Alors oui, il y a urgence à les considérer autrement, à les valoriser dans les médias, à arrêter la casse à l’œuvre dans le secteur social et médico-social. « Je ne sais sincèrement pas si je tiendrai comme ça encore six ans. Le travail social est devenu atroce, c’est devenu maltraitant autant pour les usagers que pour les travailleurs », témoignait une assistante sociale à la protection de l’enfance il y a quelques jours dans Mediapart.

Mais, selon le proverbe, « des paroles carrées n’entrent pas dans des oreilles rondes ».

Éditorial

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