De 1945 à 1951, l’Education surveillée (ES) est organisée nationalement au sein du ministère de la Justice, comme l’Administration pénitentiaire, modèle dont elle est issue. Composée de 15 cadres, dont quatre inspecteurs chargés du contrôle de tous les établissements, elle gère depuis Paris les placements des huit gros internats, pour la plupart issus des colonies pénitentiaires, qu’elle doit piloter pédagogiquement. Mais cette organisation va bientôt s’avérer problématique quant aux contenus éducatifs. Ainsi, bien avant l’ordonnance sur l’assistance éducative de 1958, le travail avec les familles, même déficientes, apparaît déterminant. Le placement des enfants s’organise selon les disponibilités dans les institutions, et d’un point de vue assez parisien : le lieu de résidence des familles n’est souvent pas pris en compte et, du fait de l’éloignement, le travail avec elles relève d’une mission impossible.
A la fin des années 1950, un ensemble d’éléments convergent vers une modernisation possible de l’ES, avec son inscription aux plans de développement économique et social. Pour chacune des 21 circonscriptions d’action régionale, la liste de ses équipements prévus par le plan de secteur public comprend trois types d’établissements : le centre d’observation et d’action éducative (COAE) – équipement de base des tribunaux pour enfants –, le centre d’observation et l’internat, sans harmonisation entre circonscriptions et tribunaux. En 1964, un décret précise le renforcement du rôle des préfets concernant la coordination des actions de l’Etat dans les circonscriptions d’action régionale. Néanmoins, les dispositions de ce décret ne sont pas applicables aux « organismes (…) relevant du garde des Sceaux », sauf « en ce qui concerne les investissements (…) ». Pour l’ES, la régionalisation reste fictive.
En 1969, les limites de la prise en charge en internat apparaissent à la suite de l’évocation de la « réponse aux besoins des jeunes ». La notion de « continuité de l’action éducative » naît du renforcement des liens entre les différents organismes de décision, de diagnostic et de traitement. Une régionalisation des équipements s’impose, avec la limitation de l’extension des internats et la dotation en personnels nombreux des services de milieu ouvert. En 1970, un décret de déconcentration précise les procédures de délégation de dotation des préfets en matière d’autorisation de programme. Deux ans après, 20 services départementaux regroupent foyers, consultations et institutions spéciales d’éducation surveillée (ISES). En 1977 les délégations régionales sont créées : sans pouvoir hiérarchique sur les services, elles représentent l’administration auprès des différentes autorités et coordonnent l’action pédagogique des secteurs public et privé. Les changements politiques de 1981 installeront la décentralisation et l’Education surveillée, les directions départementales avec la note du 8 avril 1983.
Pour aller plus loin, à suivre absolument : Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière ».