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« En réunion, on m’a dit qu’il valait mieux “écraser” »

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« J’ai dénoncé la maltraitance tout au long de ma carrière, avant même que le statut de lanceur d’alerte n’existe », assure Harry Djedid. Embauché en 1993 dans un institut médico-éducatif (IME) de l’Essonne en tant qu’aide médico-psychologique, il est confronté assez vite à ce qu’il appelle « la maltraitance institutionnelle, naturalisée » : « Certains de mes collègues prenaient les enfants par les pieds, leur criaient dessus, les giflaient. A l’époque, on disait que c’était comme cela qu’il fallait les éduquer. Je l’ai toujours refusé. »

« Délateurs légaux »

En 1995, pour la première fois, Harry Djedid prend la plume pour signaler une monitrice-éducatrice violente avec les résidents. Après une première lettre sans réponse, avec une collègue, il menace de prévenir les médias, et la direction finit par licencier la salariée. Mais s’ensuit alors une forme de descente aux enfers. « Nous avons été accusés d’avoir brisé la vie de cette personne, mis à l’écart, insultés, nos voitures ont été rayées, se souvient-il. A l’époque, la loi sur les lanceurs d’alerte était loin d’exister. Nous étions considérés comme des “délateurs légaux”, un terme qui ne donne pas envie de s’opposer. » Pendant cinq ans, il continue à subir moqueries, reproches et brimades. Ces représailles sont telles qu’il finit par chercher un autre emploi.

Il est alors embauché dans une maison d’accueil spécialisée (MAS) pour personnes atteintes de troubles autistiques, dans le sud de la France. Mais, là aussi, il constate des situations de maltraitance : « Des résidents étaient attachés, forcés à effectuer des activités dites d’apprentissage, qui avaient pour seul but de permettre aux professionnels de faire autre chose. J’en ai parlé en réunion, on m’a répondu qu’il valait mieux “écraser”. »

En 2002, il constate à son retour de congés que l’une des résidentes dont il est le référent a été violentée par un éducateur. « Elle a eu sept côtes cassées, mais la direction n’a pas voulu sanctionner le coupable, se souvient-il. J’ai alors alerté l’ex-Ddass [direction départementale des affaires sanitaires et sociales] et, aussitôt, j’ai reçu un appel du président de l’association, qui m’a menacé. » Des situations comme celle-ci, Harry Djedid va en rencontrer d’autres, avant de décider de consacrer l’essentiel de son temps à aider les professionnels à sortir du silence. Il est aujourd’hui bénévole au Centre national des lanceurs d’alerte (CNLA) et constate les difficultés : « Les démarches sont compliquées, et certains magistrats ne connaissent même pas les nouveaux textes de loi. Nous sommes toujours considérés comme des cibles, des “fauteurs de troubles”. Quand un juge ose vous demander : “Pourquoi faites-vous cela ? Pourquoi n’arrêtez-vous pas de dénoncer ?”, c’est qu’il reste des freins à lever. »

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