Au quotidien, à de nombreuses occasions, le partage d’une information à caractère secret intervient. Que ce soit lors des échanges informels entre travailleurs sociaux à propos des personnes reçues, lors des commissions de réflexion ou d’orientation sur les situations… la question des informations qui peuvent être partagées ou non se pose fréquemment. Plusieurs éléments me permettent en tant qu’encadrant de proposer des pistes de réponse face à cette difficulté. La première est que toutes les informations n’ont pas à être livrées avec précision. Par exemple, lors des réflexions sur l’accompagnement socio-professionnel des allocataires du RSA, il me suffit de savoir qu’une personne est en arrêt maladie et qu’à ce titre elle ne peut pas chercher un emploi durant les mois à venir. Je n’ai pas besoin de savoir de quelle maladie il s’agit. Cette information a pu être donnée au travailleur social qui doit la garder pour lui. En outre, il n’est pas opportun de connaître tout « l’historique » d’une personne, mais uniquement les éléments de sa situation qui permettront la prise d’une décision. Je ne compte plus les notes sociales à rallonge reçues pour des demandes d’aide financière qui commencent, par exemple, par « Madame est arrivée en France il y a 20 ans ».
Autre exemple : le dossier d’une personne exilée présenté devant une commission, Madame G. explique que : « Monsieur A., qui vient du Soudan, a subi durant plusieurs années des tortures qui sont la cause de sa maladie psychique actuelle. Des terreurs nocturnes obligent une infirmière à lui administrer, chaque jour à son domicile, une piqûre pour dormir. Il est suivi par un médecin du centre médico-psychologique (CMP). Tout ceci l’empêche pour le moment de se stabiliser et de rechercher un emploi, alors qu’il pourrait travailler puisqu’il a un titre de séjour. » Dans ce cas, Madame G. partage beaucoup d’informations àcaractère secret. N’aurait-elle pas pu se contenter de dire : « Monsieur A. a un statut de réfugié. Il m’a autorisée à vous rapporter qu’il est suivi par un médecin du CMP » ? Ces renseignements suffisent pour rencontrer la personne et évoquer ses besoins en termes d’intervention sociale. Au-delà du secret, il existe un biais potentiellement négatif pour la personne à éviter : en effet, eu égard à la situation décrite, le travailleur social pourrait ne pas croire en la capacité de Monsieur A. à reprendre une activité. Alors que chercher un emploi pourrait constituer, au contraire, une motivation pour lui ?
Une bonne communication entre professionnels se veut pondérée et réfléchie. Le secret doit être partagé dans l’intérêt des personnes concernées, en conservant leur intimité.