Par principe, les changements des conditions de travail s’imposent aux salariés, contrairement aux modifications du contrat de travail, qui nécessitent leur accord préalable.
En vue d’identifier les spécificités inhérentes au régime des modifications du contrat de travail, il convient de s’intéresser à celles induites par un contexte économique, disciplinaire ou autre.
Lorsqu’un employeur fait face à des difficultés économiques, des mutations technologiques ou une nécessité de sauvegarder la compétitivité de sa structure, il peut être contraint d’envisager une modification d’un élément essentiel du contrat de travail de ses salariés (code du travail [C. trav.], art. L. 1222-6 et L. 1233-3).
Face à ce contexte économique, l’employeur qui entend modifier le contrat de travail d’un salarié est assujetti à une procédure spécifique posée par le législateur. A ce titre, il est tenu de faire au salarié une proposition par lettre recommandée avec avis de réception (C. trav., art. L. 1222-6). Cette lettre précise la ou les modifications envisagées et informe le salarié qu’il dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception du courrier pour signifier son éventuel refus (C. trav., art. L. 1222-6). Pour précision, le délai est réduit à 15 jours si la structure est en redressement ou en liquidation judiciaire. A l’issue du délai, l’absence de réponse du salarié vaut acceptation de la modification (C. trav., art. L. 1222-6).
A noter : En cas de non-respect de cette procédure, l’employeur ne pourra se prévaloir d’un refus ou d’une acceptation du salarié.
Les accords de performance collective permettent de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de la structure ou de préserver et de développer l’emploi. Par conséquent, la procédure diffère en fonction de la présence de délégués syndicaux, mais également selon la taille de la structure. Les accords collectifs permettent notamment d’aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et sa répartition, la rémunération ou encore les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à la structure (C. trav., art. L. 2254-2).
Lorsqu’il est conclu valablement, un accord de performance collective se substitue de plein droit aux clauses contraires et incompatibles présentes dans les contrats de travail des salariés. Ses stipulations se substituent y compris en matière de rémunération, de durée du travail et de mobilité professionnelle ou géographique interne à la structure.
A compter de la notification du refus du salarié, l’employeur dispose d’un délai de deux mois pour engager une procédure de licenciement (C. trav., art. L. 2254-2). Lequel repose alors sur un motif spécifique qui constitue une cause réelle et sérieuse. L’employeur est tenu de réaliser un entretien préalable et de notifier le licenciement par lettre recommandée avec avis de réception (C. trav., art. L. 1232-2 à L. 1232-14). Le salarié peut également prétendre à une indemnité de préavis et une indemnité de licenciement (C. trav., art. L. 1234-1 à L. 1234-11). De surcroît, le salarié peut être pris en charge par Pôle emploi s’il remplit les conditions fixées par le législateur. Il bénéficie également d’un abondement de son compte personnel de formation, dont les conditions sont définies par l’accord de performance collective et dont le montant est au minimum égal à 3 000 € (C. trav., art. L. 2254-2).
Dans le cadre d’une procédure de sanction disciplinaire, l’employeur peut décider de prononcer à l’encontre du salarié une mutation géographique ou une rétrogradation. Toutefois, ces sanctions disciplinaires constituent des modifications du contrat de travail du salarié et ne peuvent donc lui être imposées. Lorsque l’employeur décide de recourir à ce type de sanctions, il est tenu de solliciter l’accord préalable du salarié en l’informant par écrit de sa faculté d’accepter ou de refuser la modification. A défaut, ce dernier pourrait prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur (Cass. soc., 28 avril 2011, n° 09-70.619). Il est recommandé à l’employeur de demander une réponse écrite du salarié afin d’acter la situation et d’éviter tout litige ultérieur.
Si le salarié accepte la modification de son contrat, l’employeur peut prononcer la sanction disciplinaire. En revanche, s’il la refuse, l’employeur est en droit, compte tenu de son pouvoir disciplinaire, de prononcer une autre sanction en lieu et place de la sanction précédemment proposée (Cass. soc., 16 juin 1998, n° 95-45.033). Pour précision, si l’employeur opte pour un licenciement, il est tenu de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable (Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-11.433).
En cas de modification du contrat de travail, hors motif économique ou disciplinaire, l’employeur doit proposer au salarié la modification du contrat et obtenir l’accord exprès de ce dernier. La Cour de cassation précise que le délai laissé au salarié doit être raisonnable et lui permettre de prendre une décision éclairée. En pratique, l’employeur transmet au salarié un avenant à son contrat de travail formalisant la proposition de modification et demande au salarié de lui faire retour par écrit dans un délai préfixé.
Si le salarié refuse, l’employeur retrouve alors son pouvoir de direction et peut décider soit de maintenir le contrat aux anciennes conditions en abandonnant son projet, soit d’engager une procédure de licenciement. La rupture du contrat ne sera pas motivée par le refus de modification de la part du salarié mais par la raison ayant conduit l’employeur à lui faire la proposition. Il appartiendra donc à ce dernier d’expliquer que sa motivation relevait de l’intérêt de l’entreprise ou de l’association.
En qualité de chef d’entreprise ou de dirigeant d’association, l’employeur est amené à supporter les risques inhérents à l’activité développée. En contrepartie, il dispose d’un pouvoir de direction qui s’étend à la gestion en matière économique, mais également à l’organisation de la structure et à la gestion du personnel. L’employeur a ainsi la possibilité de procéder à un changement des conditions de travail de ses salariés sans demander leur accord préalable.
Il convient toutefois de préciser que ce pouvoir de direction n’est pas absolu et qu’il incombe à l’employeur de ne pas en abuser et d’agir de bonne foi. Ainsi, imposer une mutation rapide et sans explication à une salariée malgré sa situation familiale est constitutif d’une décision exclusive de la bonne foi contractuelle (Cass. soc., 12 juillet 2010, n° 08-45.516).
A noter : De jurisprudence constante, la Cour de cassation présume la bonne foi contractuelle de l’employeur. Il incombe donc au salarié d’apporter la preuve de l’abus ou du détournement de pouvoir (Cass. soc., 10 juin 1997, n° 94-43.889).
Le législateur comme les juges n’imposent aucune formalité préalable au changement des conditions de travail par l’employeur. Toutefois, en pratique, il est conseillé de prévenir le salarié par écrit et de respecter un délai raisonnable afin de lui permettre de s’organiser par rapport à sa nouvelle situation. A défaut, si le salarié parvient à démontrer un préjudice, il pourrait prétendre à des dommages et intérêts (voir notamment Cass. soc., 4 avril 2006, n° 04-43.506).
Un salarié qui refuse un changement de ses conditions de travail se soustrait au pouvoir de direction de l’employeur. Ce faisant, il s’expose à des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement. Toutefois, la Cour de cassation estime que le refus du salarié, s’il rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave susceptible de priver le salarié des indemnités de rupture (Cass. soc., 23 février 2005, n° 03-42.018).
Afin d’apprécier la situation, le juge prend en compte les conséquences du changement sur la vie personnelle du salarié. A titre d’illustration, un employeur avait imposé un changement d’horaire à une salariée sans modifier sa rémunération ou sa classification. Alors qu’elle travaillait préalablement entre 10 h 30 et 13 h 30, son nouvel horaire était compris entre 18 h 30 ou 19 h et 22 h. Or elle avait été licenciée pour faute grave en raison de son refus d’accepter le nouvel horaire. La salariée invoquait des obligations familiales impérieuses à l’appui de ses prétentions, et les juges ont estimé que son comportement ne revêtait pas le caractère de faute grave (Cass. soc., 15 décembre 2004, n° 02-44.924).
Le code du travail ne définit pas les éléments relevant d’une modification du contrat ou d’un changement des conditions de travail. De ce fait, les critères permettant de les distinguer ont été établis par la jurisprudence. Il convient donc de déterminer les éléments qui relèvent de la première ou du second, en s’intéressant spécifiquement au secteur sanitaire et social.
Par principe, la Cour de cassation estime que la modification d’une qualification professionnelle s’analyse comme une modification du contrat de travail, nécessitant l’accord du salarié (voir notamment Cass. soc., 2 février 1999, n° 96-44.340). Ainsi, un salarié qui se voit imposer par son employeur des tâches ne relevant pas de sa qualification et étrangères à l’activité pour laquelle il a été embauché est en droit de les refuser dans la mesure où cela constitue une modification de son contrat de travail.
A l’inverse, octroyer à un salarié des tâches nouvelles qui correspondent à sa qualification professionnelle initiale ne constitue pas une modification de son contrat mais un simple changement de ses conditions de travail. La haute juridiction estime que lorsque les mesures prises par l’employeur n’affectent ni la qualification, ni la rémunération, elles ne portent pas atteinte à un élément du contrat et s’analysent comme un simple changement (Cass. soc., 7 mai 1987, n° 84-40.810).
Ainsi, une entreprise de services à la personne a recruté une assistante de vie niveau 2. A compter de son embauche, la salariée a été affectée à l’accompagnement de personnes en perte d’autonomie et à l’entretien des espaces. Quelques temps plus tard, l’employeur décide de l’affecter également à la réalisation de courses ou de tâches administratives simples pour les bénéficiaires. La salariée refuse, précisant qu’il est nécessaire de recourir à son accord. Toutefois, au regard de la convention collective nationale étendue, l’emploi d’assistante de vie niveau 2 recouvre les nouvelles tâches sollicitées par l’employeur. Le refus de la salariée s’analyse donc comme un comportement fautif, dans la mesure où il s’agit d’un simple changement de ses conditions de travail. A l’inverse, si l’employeur souhaitait confier à une assistante de vie niveau 2 des activités inhérentes à la garde d’enfants, il existerait une modification de la qualification de la salariée, sauf si des dispositions particulières étaient prévues dans le contrat de travail et qu’une qualification secondaire était éventuellement instaurée. En l’absence de toute précision dans le contrat, l’affectation à des tâches de garde d’enfants s’analyserait comme une modification de celui-ci et nécessiterait de recourir à l’accord préalable de la salariée.
En conclusion, il convient de vérifier avec une extrêmement vigilance qu’il s’agit d’un simple changement de tâches ou d’une modification de la qualification professionnelle du salarié.
La Cour de cassation estime que la rémunération du salarié s’analyse comme un élément de son contrat et ne peut être modifiée, même de façon minime, sans son accord préalable. L’employeur est également tenu de demander son accord en cas de modification du mode de rémunération, peu important qu’il prétende que le nouveau mode serait plus avantageux pour le salarié (Cass. soc., 19 mai 1998, n° 96-41.573). L’employeur ne peut donc modifier ni le montant de la rémunération, ni sa structure.
L’acceptation du salarié doit être expresse et ne peut résulter de la seule poursuite par le salarié de son contrat de travail.
A noter : Il convient d’être très vigilant face à un accord de performance collective, les modalités étant différentes. En effet, comme précisé précédemment, il est possible d’imposer la modification du contrat du salarié, et notamment de sa rémunération, en présence d’un tel accord (voir page 16).
La Cour de cassation rappelle, de jurisprudence constante, que la répartition du temps de travail sur la journée ou sur la semaine relève du pouvoir de direction de l’employeur (Cass. soc., 17 octobre 2000 n° 98-42.264). Dans ces conditions, celui-ci est en droit de modifier les horaires du salarié sans avoir besoin de recueillir son accord.
Toutefois, les juges ont mis en place plusieurs exceptions à ce principe. Tout d’abord, lorsque la répartition du temps de travail est prévue par le contrat, il est nécessaire pour le modifier de solliciter l’accord du salarié (Cass. soc, 11 juillet 2001, n° 99-42.710). En l’espèce, le contrat prévoyait les jours et les horaires de travail. La juridiction a ainsi expressément relevé que la répartition du temps de travail présentait un caractère contractuel.
De surcroît, le changement de la répartition du travail s’analyse comme une modification du contrat lorsqu’elle induit un bouleversement très important des conditions de travail. Tel est le cas, par exemple, lorsque le salarié passe d’un horaire continu à un horaire discontinu (Cass. soc., 3 novembre 2011, n° 10-30.033).
En outre, la haute juridiction estime qu’il est nécessaire de recueillir l’accord préalable du salarié si la nouvelle répartition de son temps de travail entraîne une atteinte excessive à ses droits, au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos (Cass. soc., 3 novembre 2011, n° 10-14.702). En l’espèce, une salariée qui travaillait auparavant du lundi au vendredi de 5 h 30 à 10 h et de 15 h à 17 h ainsi que le samedi de 7 h 30 à 10 h avait ensuite été affectée sur deux sites et avait vu son rythme de travail totalement bouleversé.
Par ailleurs, le législateur prévoit des dispositions particulières pour la répartition du temps de travail des salariés à temps partiel. Toutes modifications de cette répartition entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois doivent être notifiées aux salariés en respectant un délai de prévenance d’au minimum sept jours (C. trav., art. L. 3123-11). Toutefois, une convention ou un accord d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, de branche étendu peut déterminer le délai dans lequel la modification de la répartition de la durée du travail est notifiée aux salariés. Ce délai ne peut cependant pas être inférieur à trois jours ouvrés. Le législateur prévoit des exceptions pour les associations et les entreprises d’aide à domicile et précise que le délai peut être réduit pour les cas d’urgence par accord collectif. Les contreparties doivent être prévues par accord collectif lorsque le délai de prévenance du salarié est inférieur à sept jours ouvrés (C. trav., art. L. 3123-24).
La convention collective nationale étendue des entreprises de services à la personne prévoit des spécificités pour la répartition de l’horaire de travail. Elle peut ainsi être modifiée en fonction des impératifs de service. Les salariés à temps partiel doivent être avertis de cette modification dans un délai minimal de trois jours calendaires avant la date à laquelle la modification apportée au planning initial doit avoir lieu, dans le respect des plages d’indisponibilité prévues au contrat. Cependant, afin de faire face à la fluctuation des demandes inhérentes à l’activité et d’assurer une continuité de service, le délai d’information de la modification apportée au planning peut être réduit dans certains cas. Ainsi, le salarié à temps partiel pourra être prévenu dans un délai inférieur à trois jours calendaires dans des cas d’urgence prévus par la convention collective :
• absence non programmée d’un ou d’une collègue de travail ;
• aggravation de l’état de santé du bénéficiaire ;
• décès du bénéficiaire ;
• hospitalisation ou urgence médicale d’un bénéficiaire entraînant son absence ;
• arrivée en urgence non programmée d’un bénéficiaire ;
• maladie d’un enfant ;
• maladie de l’intervenant habituel ;
• carence du mode de garde habituel ou des services assurant habituellement cette garde ;
• absence non prévue d’un salarié intervenant auprès d’un public âgé ou dépendant ;
• besoin immédiat d’intervention auprès d’un enfant dû à l’absence non prévisible de son parent.
Lorsque le délai de prévenance de modification des horaires est inférieur à sept jours, dans le respect des plages d’indisponibilité devant figurer impérativement au contrat de travail, le salarié bénéficie en contrepartie de la possibilité de refuser sept fois par année civile la modification de ses horaires, sans que ses refus ne constituent une faute ou un motif de licenciement et sans que ses heures ne puissent être déduites d’une quelconque manière. Pour précision, la convention collective nationale des entreprises de services à la personne précise que tout refus de modification d’horaire devra être confirmé par écrit par l’employeur au salarié. Cette confirmation devra notamment reprendre la proposition d’horaire d’intervention refusée par le salarié, le nombre de refus comptabilisé par l’employeur au cours de l’année civile, mais également les plages d’indisponibilité contractuelle.
En outre, le législateur précise que si le contrat de travail du salarié ne prévoit pas les cas et la nature de telles modifications, le refus du salarié d’accepter la modification demandée par l’employeur ne s’analyse ni comme une faute, ni comme un motif de licenciement (C. trav., art. L. 3123-12). Egalement, le refus du salarié d’accéder à la demande de modification de l’employeur ne s’analyse pas comme une faute ou un motif de licenciement dès lors que les modalités et les cas sont préalablement définis dans le contrat de travail mais que cette modification n’est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, avec le suivi d’un enseignement scolaire ou supérieur, avec l’accomplissement d’une période d’activité fixée par un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée.
A noter : Le législateur précise que si l’horaire moyen réellement accompli par un salarié à temps partiel a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou de l’équivalent mensuel de cette durée au cours d’une période de 12 semaines consécutives ou pendant 12 semaines pendant une période de 15 semaines ou selon des dispositions spécifiques prévues par accord collectif, l’horaire prévu par le contrat de travail est modifié sous réserve d’un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié intéressé. Le nouvel horaire de travail du salarié est donc égal à la différence entre l’horaire antérieur et l’horaire moyen réellement accompli (C. trav., art. L. 3123-13). Dans ces conditions, à titre d’exemple, si un salarié est embauché à 24 heures de travail hebdomadaire et que, pendant 12 semaines consécutives, il effectue deux heures complémentaires par semaine, son horaire prévu dans son contrat de travail pourra être modifié, à condition que le salarié ne s’y oppose pas et qu’un préavis de sept jours soit respecté. L’horaire de travail correspondrait donc à 26 heures (l’horaire préalablement contractualisé plus les deux heures correspondant aux heures complémentaires réalisées).
Par ailleurs, la haute juridiction retient que la modification de la cadence de travail constitue un simple changement des conditions de travail lorsqu’elle n’entraîne aucune répercussion sur la rémunération ou le temps de travail du salarié (Cass. soc., 20 octobre 2010 n° 08-44.594). En l’espèce, une société de nettoyage avait prévu que les salariés disposaient d’une heure par cage d’escalier, avant d’établir finalement un nouveau planning sur la base de 45 minutes par cage d’escalier. Ayant refusé ce changement, les salariés avaient été licenciés. Toutefois, dans la mesure où cette nouvelle cadence de travail n’avait eu aucune influence sur la rémunération des salariés, la juridiction a considéré que cette situation s’analysait comme un simple changement de leurs conditions de travail.
Par principe, les juges retiennent que la durée du travail s’analyse comme un élément contractuel de la relation entre le salarié et l’employeur (Cass. soc., 20 octobre 1998, n° 96-40.614). Toutefois, ce dernier est en droit de demander au salarié qu’il effectue des heures au-delà de la durée fixée. Ces heures constituent des heures complémentaires pour les salariés à temps partiel et des heures supplémentaires pour les salariés à temps plein.
Les heures supplémentaires sont effectuées à la demande de l’employeur ou avec son accord, dans la limite d’un contingent annuel d’heures. Ce nombre est fixé par accord collectif ou, à défaut, par le législateur. L’accomplissement de ces heures ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent (C. trav., art. L. 3121-28). Les contreparties sont fixées par accord collectif, sans pouvoir être inférieures à 10 %, ou, à défaut, par le législateur (C. trav., art. L. 3121-33). En l’absence d’une contrepartie fixée par accord collectif, elle est égale à 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires et à 50 % au-delà (C. trav., art. L. 3121-36). Pour précision, les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos (C. trav., art. L. 3121-30).
De même, les heures complémentaires s’effectuent sur demande de l’employeur ou avec son accord. Le nombre desdites heures que le salarié peut effectuer est fixé à 1/10e de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue dans le contrat (C. trav., art. L. 3123-28). Toutefois, par accord collectif, ce nombre peut être porté au tiers de la durée hebdomadaire ou mensuelle (C. trav., art. L. 3123-20). En outre, la contrepartie est de 10 % pour chaque heure complémentaire accomplie dans la limite du dixième des heures prévues au contrat, et de 25 % pour chaque heure accomplie entre le dixième et le tiers des heures prévues (C. trav., art. L. 3123-29). Le taux de majoration des heures complémentaires peut être modifié par convention ou accord de branche étendu, sous réserve de ne pas être inférieur à 10 % (C. trav., art. L. 3123-21). Le salarié est en droit de refuser d’accomplir les heures complémentaires proposées par l’employeur lorsqu’il est nécessaire qu’elles soient effectuées au-delà des limites fixées par le contrat de travail. De même, il est en droit de refuser s’il est informé moins de trois jours avant la date prévue pour leur réalisation. Ces différents refus ne peuvent constituer ni une faute, ni un motif de licenciement (C. trav., art. L. 3123-10).
Par ailleurs, un employeur peut proposer à un salarié d’augmenter temporairement la durée de travail par un avenant à son contrat. Toutefois, la conclusion dudit avenant est soumise à plusieurs conditions cumulatives. Il est ainsi obligatoire qu’une convention ou un accord de branche étendu prévoit cette possibilité (C. trav., art. L. 3123-22), tout en déterminant le nombre maximal d’avenants pouvant être conclus, dans la limite de huit par an et par salarié, en dehors des cas de remplacement d’un salarié absent nommément désigné. Cette convention ou cet accord peut prévoir la majoration salariale des heures effectuées dans le cadre de cet avenant, et doit également déterminer les modalités selon lesquelles les salariés peuvent bénéficier prioritairement des compléments d’heures. Quant aux heures complémentaires accomplies au-delà de la durée déterminée par l’avenant, elles donnent lieu à une majoration salariale qui ne peut être inférieure à 25 %.
Très récemment, la Cour de cassation est venue préciser que la conclusion d’un avenant de complément d’heures à un contrat de travail à temps partiel ne peut avoir pour effet de porter la durée du travail convenue à un niveau égal à la durée légale du travail (35 heures par semaine) ou à celle fixée conventionnellement (Cass. soc., 21 septembre 2022, n° 20-10.701).
Enfin, la mise en place par accord collectif d’un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine ne s’analyse pas comme une modification du contrat pour les salariés à temps complet et ne nécessite donc pas leur accord préalable (C. trav., art. L. 3121-43). En revanche, il convient de solliciter l’accord des salariés à temps partiel. Dans ces conditions, si une entreprise de services à la personne négocie un accord d’annualisation du temps de travail, elle devra recueillir l’accord individuel des salariés à temps partiel mais ne sera pas contrainte d’obtenir celui des salariés à temps plein.
Dans le secteur sanitaire et social, l’organisation du travail des salariés peut être amenée à évoluer. En effet, à titre d’illustration, les salariés peuvent passer d’un horaire de jour à un horaire de nuit. De même, ceux travaillant dans les entreprises de services à la personne peuvent modifier leurs plages d’indisponibilité. Il convient donc de s’intéresser aux démarches et de comprendre si l’accord du salarié est obligatoire.
De jurisprudence constante, la Cour de cassation rappelle que le passage d’un travail de jour à un travail de nuit, même partiel, constitue une modification du contrat du salarié, que celui-ci doit expressément accepter (voir notamment Cass. soc., 7 avril 2004, n° 02-41.486). De surcroît, dans la branche des services à la personne, l’avenant du 11 octobre 2021 prévoit la conclusion d’un avenant au contrat de travail spécifique qui reprend les principales mesures prévues par les dispositions conventionnelles.
S’agissant des plages d’indisponibilité d’un salarié de terrain dans le secteur des services à la personne, dans la mesure où ces dispositions sont contractualisées dans son contrat, il sera nécessaire de recevoir son accord préalable à toute modification.
La Cour de cassation rappelle, de jurisprudence constante, que « la mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d’information à moins qu’il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu » (voir notamment Cass. soc., 21 janvier 2004, n° 02-12.712). En pratique, il convient donc d’analyser quelle est la valeur de la mention du lieu de travail dans le contrat du salarié avant d’envisager toute modification.
A noter : Certaines conventions collectives fixent de façon précise le lieu d’exécution du contrat de travail. Par exemple, la convention collective nationale des entreprises de services à la personne précise que les salariés intervenant à domicile exercent leurs fonctions au sein d’une « zone d’intervention » définie au sein de leur contrat. Cette zone se détermine par rapport à une commune de référence (éventuellement un arrondissement) choisie d’un commun accord, pouvant correspondre domicile du salarié au jour de son engagement, et s’étend aux communes et arrondissements distants d’un maximum de 45 kilomètres ou de 6 minutes du lieu de référence. Par ailleurs, s’agissant des salariés exerçant des prestations organisées en tournée, cette zone géographique est librement déterminée entre l’employeur et le salarié par une clause spécifique définie au sein du contrat. Par conséquent, dans ce secteur d’activité, les salariés de terrain disposent d’une clause spécifique pour leur lieu de travail et toute modification nécessiterait leur accord préalable.
Afin d’identifier précisément les formalités à réaliser, plusieurs situations doivent être étudiées.
Tout d’abord, lorsque le lieu de travail du salarié est fixé précisément dans son contrat et que ce dernier ne comporte aucune clause de mobilité, tout changement sollicité par l’employeur s’analyse comme une modification du contrat, nécessitant par conséquent l’accord exprès et préalable du salarié.
A l’inverse, lorsque le contrat ne fixe pas avec précision le lieu de travail et qu’aucune clause de mobilité n’y est prévue, il convient d’analyser deux situations distinctes. Dans l’hypothèse où le nouveau lieu de travail se situe dans le même secteur géographique que le précédent, le changement sollicité par l’employeur s’analyse comme un simple changement des conditions de travail et ne nécessite aucun accord préalable du salarié (voir notamment Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-15.461). A l’inverse, lorsque le nouveau lieu de travail proposé par l’employeur se situe dans un autre secteur géographique ou un autre bassin d’emploi, cette proposition s’analyse comme une modification du contrat et requiert l’accord exprès et préalable du salarié (Cass. soc., 4 mai 1999, n° 97-40.576).
Attention : Lorsque le changement s’effectue au sein du même secteur géographique, le salarié est toujours en droit d’arguer que son nouveau lieu de travail porte atteinte à sa vie personnelle et familiale (voir notamment Cass. soc., 7 juillet 2016, n° 15-15.342). En cas de contestation, il appartient donc au juge de vérifier si tel est le cas et si la modification est justifiée et proportionnée au but recherché par l’employeur.
Enfin, lorsque le contrat de travail comporte une clause de mobilité, le changement de lieu de travail s’analyse comme un simple changement des conditions de travail du salarié. La jurisprudence pose toutefois des conditions de validité pour la clause de mobilité. Ainsi, cette clause doit définir de façon précise sa zone géographique d’application. Elle ne peut donc conférer à l’employeur la possibilité de modifier ou d’étendre unilatéralement sa portée (voir notamment Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-45.846).
Selon la Cour de cassation, l’employeur ne peut imposer à un salarié protégé ni modification de contrat de travail ni changement des conditions de travail. En cas de refus du salarié, il incombe éventuellement à l’employeur d’engager une procédure de licenciement après autorisation de l’inspection du travail (Cass. soc., 22 juin 2011, n° 10-13.820).
La liste des salariés protégés, fixée par le code du travail, regroupe notamment les délégués syndicaux, les membres élus à la délégation du personnel du comité social et économique (CSE), les représentants syndicaux au CSE, les représentants de proximité, les membres de la délégation du personnel au CSE interentreprise, les salariés mandatés dans les entreprises ou associations dépourvues de délégué syndical ou encore les défenseurs syndicaux (C. trav., art. L. 2411-1).