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« Des possibilités de prévention bridées »

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Pour le psychiatre Charles-Edouard Notredame, lutter contre les inégalités sociales de santé permettrait de mieux prévenir le risque suicidaire chez les jeunes suivis par l’aide sociale à l’enfance. Autre axe prioritaire : une meilleure coordination entre l’éducatif et le soin.
Quelle est la place des jeunes dans le dispositif 31 14 de prévention du suicide ?

Le 31 14 ne s’adresse pas uniquement à ce public, mais nous y accordons une attention toute particulière avec un socle de formation dédié justement aux enfants et adolescents. Nous réalisons également un travail autour des procédures d’informations préoccupantes lorsqu’une situation de danger est repérée. Nous encourageons par ailleurs la mise en lien de nos différents centres régionaux avec les départements ou les unités territoriales de prévention d’action sociale. Un travailleur social accompagne chaque centre dans cet objectif.

La protection de l’enfance rencontre-t-elle des difficultés particulières dans ce domaine ?

La protection de l’enfance compte aujourd’hui parmi nos projets importants, afin de développer, aux côtés de la protection judiciaire de la jeunesse et de l’aide sociale à l’enfance, une meilleure connaissance mutuelle et réciproque. Car nous savons de manière très évidente que les enfants confiés sont, de par leur parcours, beaucoup plus vulnérables aux comportements suicidaires. Il reste encore beaucoup d’efforts à fournir envers ce public. Nous avons, par exemple, des progrès à faire sur la problématique des inégalités sociales de santé, qui est l’une des thématiques spécifiques de la prévention du suicide. Car au-delà d’être plus à risque, ces jeunes accèdent souvent plus difficilement aux parcours de soins, ils sont soumis à davantage de ruptures et font ainsi face à une double peine. Ils sont aussi souvent plus difficiles à intégrer dans les protocoles de recherche car il faut obligatoirement obtenir la signature des deux parents. Enfin, ces enfants et adolescents mobilisent différents champs d’action, socio-éducatif, sanitaire et parfois médico-social. Or, ce travail de coordination s’avère souvent insuffisant et difficile à mettre en œuvre. Les jeunes pris en charge par l’ASE cumulent beaucoup de difficultés qui brident les possibilités de prévention du suicide.

Quels sont les principaux freins à la coordination entre les différents secteurs ?

Le sujet relève principalement, selon moi, du discours de relégation mutuelle. Nous avons du mal à opérer ensemble dans une perspective de globalité. Au lieu de travailler conjointement en reconnaissant les doubles besoins de ces jeunes, à la fois d’ordre sanitaire – psychologique ou psychiatrique – et d’ordre socio-éducatif, la tendance, la propension spontanée, est de placer ces situations prioritairement dans le champ de l’éducatif ou du psychiatrique. Par défaut de coordination, mais surtout, par manque de connaissances réciproques, avec des représentations concernant les différents milieux, les domaines d’action des uns et des autres. Il est pourtant essentiel de reconnaître les limites de chacun, car elles sont réelles des deux côtés. D’autant que le manque de ressources en protection de l’enfance et en psychiatrie est aujourd’hui majeur. Mais au lieu de partager ces difficultés et d’essayer d’y faire face ensemble, il y a, en général, une forme d’isolement, une séparation.

On parle de prévention du suicide, mais aussi de « postvention ». C’est-à-dire ?

Il est prouvé qu’être exposé à un suicide, pas nécessairement celui d’un proche d’ailleurs, augmente le risque de passage à l’acte. Les structures, telles que les foyers de la protection de l’enfance sont sensibles à ce qu’on appelle les « suicides en grappes localisées », c’est-à-dire au risque, qu’un suicide – ou même une tentative – en génère d’autres derrière. La postvention est une démarche qui consiste à prévenir les effets de contagion au sein d’une institution. Plusieurs plans existent parmi lesquels le programme national Papageno, pour se préparer, à l’avance, à d’éventuels incidents et mettre en place une cellule de crise qui permettra de se mobiliser le cas échéant à la suite de la survenue d’un suicide.

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