À neuf ans, un accident domestique a fait perdre la vue à Guillaume. Enseignante spécialisée auprès de jeunes déficients visuels, Anne Lorho raconte avec humour la vie de cet homme dans le noir, ses stratégies quotidiennes, son envie de toucher des femmes… Il hait celles qui se montrent compatissantes envers lui et préfère fréquenter des prostituées. Son handicap lui a appris à écouter le silence, le vide dans les conversations, à faire des choses que « les voyants » n’osent pas. Parfois, il se remémore les sensations de son enfance, quand il avait encore ses yeux. A la banque où il travaille, il s’occupe de l’accessibilité informatique, un poste « politiquement correct » qu’on lui a confié parce qu’il est handicapé. Il connaît les lignes de métro par cœur. Pour s’habiller, il se sert d’un détecteur qui lui nomme les couleurs. A force d’expérience, ses doigts repèrent les tissus, les rayures, les aspérités… Ses oreilles décodent les sons. Dans la rue, parfois, il glisse sur une crotte de chien. « Je ne connais pas grand-chose de plus ridicule dans une vie d’aveugle », plaisante-t-il.
« L’aveuglé » – Anne Lorho – Ed. Mercure de France, 21 €.