C’est un programme qualifié « d’ambitieux » que vient de lancer l’ONG Action éducation, en partenariat avec l’Unicef, dans l’Etat d’Assam, situé à l’extrême nord-est de l’Inde, à la frontière du Bhoutan et du Bangladesh. Comme en France, dans l’Etat le plus peuplé du monde, « tous les jeunes adultes qui atteignent l’âge de 18 ans doivent quitter les foyers de l’aide sociale à l’enfance et entrer dans la vie active. Cette transition, d’un environnement encadré par une institution, à une vie indépendante sans supervision, impose de nombreux défis à ces jeunes particulièrement vulnérables », déplore l’association. Laquelle ambitionne de « renforcer les compétences des fonctionnaires chargés de la protection de l’enfance tout en accompagnant l’autonomie des jeunes qui quittent l’aide sociale à l’enfance en leur proposant un suivi individualisé et renforcé ».
Le projet est censé offrir des « formations socio-professionnelles essentielles à leur entrée dans la vie active », tout en les aidant à obtenir des « documents officiels » (carte d’identité, certificat de naissance, carte des services fiscaux, carte d’électeur), de même qu’un compte bancaire, au cœur d’un Etat complexe frappé par une crise sociale et environnementale d’une ampleur inédite.
Car les besoins sont effectivement immenses. Riche en ressources naturelles, notamment en hydrocarbures, l’Etat d’Assam demeure un parent pauvre de la redistribution en Inde, avec à peine 3 % de croissance (contre 6 % au niveau national), et plus qu’ailleurs fragilisé par les catastrophes climatiques frappant la région comme le Bangladesh voisin, en particulier les inondations, aggravées par la fonte des glaciers de l’Himalaya. Quant à « l’intégration dans la société indienne », promue par Action Education, elle demeure une gageure dans cet Etat montagneux, célèbre pour ses plantations de thé qui occupent environ 20 % de la population, et où les travailleurs doivent récolter au moins 20 kg par jour pour assurer leur salaire quotidien, selon les chiffres de l’Unicef.
« En tant que membre de l’Association des anciens jeunes des foyers en Assam, je me suis inscrite à un programme de formation des cadres. Cette formation durait un mois et, pendant ce temps-là, j’ai également cherché un emploi. Actuellement, je travaille et touche un salaire de 9 000 roupies (110 €) », se réjouit cependant Pompi Das, une jeune Indienne ayant bénéficié du dispositif d’Action Education. Selon Ashok Sharma, responsable de programme à la protection de l’enfance, citée par l’organisation non gouvernementale, « la meilleure réalisation est la création de l’Association des anciens jeunes des foyers en Assam. A ce jour, plus de 150 jeunes ont été mis en réseaux. Nous avons créé un groupe WhatsApp et utilisons différentes technologies pour rester en contact avec chacun d’entre eux. »
Un travail d’autant plus crucial que, rappelle l’Unicef, l’Etat d’Assam est confronté à des « complexités supplémentaires » qui fragilisent la mise en œuvre d’un développement équitable : plus de 80 % de la population vit dans des zones rurales où les violences communautaires sévissent de longue date, notamment entre Hindous et la forte minorité musulmane, souvent immigrée du Bangladesh. Près de 4 millions ont le statut d’apatrides, ce qui rend particulièrement difficile l’obtention des papiers indispensables à la recherche d’un emploi. Au mois de juin dernier, l’Assam a subi l’une des pires inondations de son histoire. Près de 7 millions de personnes ont alors été privées de leur abri ou leur maison, accélérant le processus de migration vers les Etats voisins.