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Pas de panique

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Elle demande naïvement, la gamine de 15 ans. C’est sa première fois, elle est un peu effrayée : « Tu es sûr que ça ne risque rien ? » Il balaie la question de son sourire enjôleur. « Pas de panique, je fais attention. Et puis ça n’arrive jamais la première fois. » Elle le croit. Parce qu’il a l’air sûr de lui. Parce qu’il est plus âgé, plus expérimenté. Parce qu’elle a peur de tout gâcher.

Elle est fatiguée, la mère trentenaire. La grande est malade et le petit pleure sans arrêt. Son mari travaille toute la journée et il rentre épuisé, elle ne connaît personne dans ce nouveau quartier, et elle est seule avec le petit si petit et la grande pas si grande. Le petit qui pleure, la grande qui pleurniche, le petit qui mange, la grande qui vomit, et son homme qui voudrait bien, entre une couche et un petit pot, retrouver sa femme rien qu’à lui.

« Pas de panique, avec l’allaitement tu n’auras pas de retour de couches avant au moins six mois, tu peux faire une pause dans ta contraception », lui a assuré son beau-frère médecin. Elle le croit. Parce qu’il est médecin et que ça a marché pour sa sœur, et pour sa mère, et pour sa meilleure amie.

Elle est débordée, la quadra hyperactive. Le grand qui prépare ses examens, les réunions de boulot tard le soir, la fête des voisins, et cette maison qu’il faut encore et toujours ranger… Elle a un peu maigri. Trop de travail sans doute, trop de pression peut-être. Elle a bien remarqué que ses derniers cycles devenaient sporadiques, mais le stress, la préménopause, encore le stress…

« Pas de panique, tout est normal là-dedans. Une bonne hygiène de vie, du repos, et tout devrait rentrer dans l’ordre », lui a dit le spécialiste. Elle le croit. C’est un spécialiste, il sait ce qu’il dit, il a l’habitude de voir des femmes comme elle. De toute façon, elle a un stérilet, elle ne risque rien.

Une gamine naïve, une maman fatiguée, une salariée débordée… Et ce corps féminin qu’il faut toujours contrôler, chaque mois, sans faillir. Parce que le corps des hommes, lui, ne se contrôle pas.

Elle ne comprend pas, la gamine naïve. Cette tension dans les seins, cette fatigue, ces nausées.

Elle comprend très vite, la maman fatiguée. Non, pas déjà ? Pas encore ?

Elle comprend trop tard, la quadra débordée. Non, c’est impossible et impensable, pas à son âge !

Et maintenant ?

Elle est paniquée, la gamine de 15 ans. La première clinique à pratiquer encore les IVG est à 600 kilomètres. Comment fait-on pour parcourir une telle distance quand on a 15 ans ?

Elle est désabusée, la mère trentenaire. Elle a cessé de travailler une première fois, « parce que pour le premier enfant, c’est mieux, tu comprends ? », lui avait conseillé sa mère. Puis une deuxième fois, « parce que ton travail est moins important que le mien », lui avait dit son mari. Devra-t-elle donc toujours renoncer ?

Elle est désespérée, la quadra débordée. Un enfant, à son âge ? Les biberons, l’école, les activités et les goûters d’anniversaire, elle a déjà vécu tout ça, avant, mais maintenant, elle ne veut pas, elle ne veut plus.

Elles n’ont plus le choix, celles de 15 ans, de 30 ans et de 45 ans. Il leur faudra enfanter malgré elles, parce que la loi des hommes n’est pas faite pour les femmes.

Pas de panique, c’est l’Amérique !

La minute de Flo

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