Alors que les réseaux sociaux et la pornographie jouent un rôle de plus en plus important dans les représentations de la sexualité, l’éducation sexuelle constitue plus que jamais un enjeu majeur de la formation des jeunes. Mais les motifs pour promouvoir sa sensibilisation n’ont cessé d’évoluer.
Au cours du XIXe siècle, le silence est érigé comme une norme, particulièrement vis-à-vis des jeunes filles dont il conviendrait de préserver l’innocence. Les priver de tout savoir en ce domaine garantit en quelque sorte leur pureté. Pourtant, les préoccupations hygiénistes inscrivent peu à peu sur l’agenda public la question de l’éducation sexuelle, notamment pour faire face à la syphilis et autres maladies vénériennes. Au nom de la santé publique autant que de la morale, il s’agit de dénoncer certaines pratiques qui mettent en péril l’ordre social : la Société française de prophylaxie sanitaire et morale, fondée en 1901, regroupe des médecins qui veulent protéger les filles et les femmes contre des hommes présumés dangereux. L’Eglise joue également un rôle dans cette croisade, par son discours sur l’importance du cadre du mariage pour vivre sa sexualité. La lutte contre le mal vénérien connaît son apogée pendant la Première Guerre mondiale, tandis que des féministes commencent à s’engager sur cette question, à l’instar de Madeleine Pelletier qui publie L’Education féministe des filles en 1914. Cet effort se poursuit dans l’entre-deux-guerres : des conférences sont assurées en direction des institutrices dans les écoles normales pour introduire la thématique à l’école, tandis qu’un centre de consultation pour le contrôle des naissances est ouvert à Suresnes en 1938 par Berty Albrecht, pionnière du service social.
Après la Seconde Guerre mondiale, le développement de la psychiatrie infantile laisse admettre l’existence d’une sexualité des enfants. Mais il faut attendre les années 1960 pour que la libération sexuelle s’accompagne d’une vraie réflexion. Autour du Planning familial, créé en France en 1956 d’abord sous le nom de la Maternité heureuse, la question de la contraception et du contrôle des naissances s’impose dans le débat public. Dans ce contexte, alors que la valeur récréative de la sexualité est mieux admise et que la pilule contraceptive est autorisée, un enseignement sur l’information sexuelle en sciences naturelles est instauré par une circulaire de 1973. Au cours de la décennie suivante, l’épidémie de sida change la donne : les campagnes de prévention, plus visibles et très médiatisées, mobilisent largement l’opinion publique. Enfin, la loi du 4 juillet 2001 rend obligatoire à l’école l’éducation à la santé et à la sexualité, qui englobe aussi la question des violences sexuelles. L’importance de l’éducation sexuelle n’est plus à démontrer : familles, enseignants, professionnels de la santé et du social, tous ont un rôle à jouer pour accompagner les plus jeunes sur la voie d’une sexualité libre et responsable.