Le faible nombre de relayages est lié au contexte sanitaire et aux problématiques financières. En aucun cas aux besoins des personnes. On constate d’ailleurs de plus en plus de demandes de répit chez les aidants depuis la fin des confinements. Que ce soit dans le domaine du handicap ou pour les personnes âgées. Tout l’enjeu pour Baluchon France est de mobiliser les politiques pour pouvoir proposer un répit de longue durée avec des moyens pérennes. Pendant plusieurs mois, nous avons réussi à convaincre certaines caisses de retraite qui ont financé plusieurs jours de baluchonnage. C’est une première victoire. Nous espérons que la promesse du président de la République – qui a annoncé en mars dernier 15 jours de répit gratuit aux aidants – prendra la forme d’un financement. L’avancée serait importante. Néanmoins, nous avons réussi à proposer des journées de baluchonnage, ce qui montre que la volonté est plus forte que les freins politiques ou financiers, même si nous aspirions à beaucoup mieux.
Les insuffisances du financement ou encore les difficultés de remboursement des frais kilométriques sont liées aux services à domicile mais pas au baluchonnage où tous les frais sont payés, comme toutes les heures travaillées de jour comme de nuit. Le baluchonnage est une innovation majeure qui bouleverse le système traditionnel de prise en compte des besoins des personnes en perte d’autonomie et de leurs aidants ; c’est la raison pour laquelle elle est difficile à implémenter. Quand on travaille avec les partenaires sociaux locaux, qu’ils sont associés au projet, il y a une véritable adhésion. Nous considérons qu’il faut promouvoir le modèle du baluchonnage et non celui du relayage tel que l’a instauré l’expérimentation où les travailleurs ne sont pas forcément payés pour toutes leurs heures de nuit et où il n’y a pas de formation. Le service serait plus « sécure » avec tous les prérequis et les outils qui ont fait leurs preuves au Québec depuis plus de vingt ans.
Dans le baluchonnage, la notion de libre choix est centrale : la personne peut accepter ou non une mission. Ce qui est fondamentale. En Ehpad ou dans les services à domicile, on ne demande pas l’avis des professionnels. Ils n’ont pas le choix d’intervenir auprès de tel ou tel usager. L’astreinte est par ailleurs une autre garantie. J’ai déjà remplacé au pied levé une baluchonneuse devant s’absenter pour raison familiale urgente. On doit toujours pouvoir trouver des solutions. Autre bouclier : les professionnels bénéficient d’autant de jours de repos que de jours travaillés en amont et en aval de l’intervention. C’est par la qualité qu’on imposera le baluchonnage, qui nécessite au minimum trois jours de formation. C’est un métier difficile, mais quand tout est bien organisé, il séduit des professionnels. Je connais des baluchonneurs qui ne veulent plus travailler en Ehpad ou dans un service à domicile classique.
Le lobbying du domicile a pesé. Le renouvellement de l’expérimentation a intégré les services à domicile publics mais pas les Ehpad publics alors qu’ils vont porter les pôles gérontologiques. Je ne comprends pas cette incohérence et plaide pour que le domicile comme les Ehpad publics puissent proposer cette offre de répit de longue durée. Mais nous savons que tous ne le pourront ou ne le voudront pas. Pour se lancer dans cette aventure, il faut faire preuve d’une grande ouverture à la nouveauté et d’une culture de l’innovation. L’expérience du baluchonnage, qui essaie de s’implanter en France depuis 2008, apporte un véritable soutien aux aidants familiaux. Avoir le temps de s’occuper de personnes vulnérables a du sens. Et leurs retours extrêmement positifs constituent notre moteur. Les avancées ne peuvent vraiment être impulsées que par le terrain, là où les besoins s’expriment t où les professions s’exercent.