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Une charge, ces étrangers ?

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La campagne présidentielle a récemment été l’occasion de faire entendre des voix hostiles à l’immigration, prétendant que les populations arrivées sur le territoire français constitueraient un coût pour la collectivité.

Faire venir des travailleurs de l’étranger n’est pas une pratique récente : les Etats mercantilistes ont joué un rôle considérable dans le transfert d’ouvriers qualifiés dans toute l’Europe moderne, comme les célèbres verriers de Murano. Dans un continent encore largement rural, les migrations saisonnières sont en outre essentielles pour faire vivre certaines régions françaises, qui comptent, par exemple, sur les Espagnols pour les vendanges ou les moissons.

L’industrialisation, au XIXe siècle, renforce et institutionnalise ces stratégies, notamment dans les départements frontaliers du nord-est et ceux de la région parisienne qui ont besoin de main-d’œuvre pour développer les nouvelles activités productives (70 % des étrangers en France travaillent dans l’industrie en 1901, contre 35 % des Français). Dans une France à la démographie peu dynamique, cet apport constitue une nécessité, le mouvement étant encouragé par les patrons eux-mêmes qui organisent des filières de recrutement pour s’assurer une main-d’œuvre souvent docile et meilleur marché. Jusqu’en 1891, les Belges sont majoritaires parmi les étrangers présents en France ; ils sont alors dépassés par les Italiens qui restent la première nation représentée jusqu’en 1968 ! Des stéréotypes professionnels, comme celui du maçon italien ou portugais, se forgent.

C’est à la fin du XIXe siècle que s’opère une mutation du regard porté sur ces travailleurs avec la systématisation des papiers d’identité, l’instauration d’obstacles au franchissement des frontières nationales et l’apparition de violences xénophobes sur le marché du travail, avec comme point culminant le massacre d’Italiens à Aigues-Mortes en 1893. Le thème de l’étranger profiteur apparaît, ce qui permet de justifier l’exclusion de ces populations de l’assistance médicale gratuite, sauf si leur pays d’origine a passé un accord avec la France. Ces arrangements, justement, permettent la reconstruction du pays et la relance économique à la sortie des deux guerres mondiales, en lien avec le Bureau international du travail. La création de l’Office national de l’immigration en 1945 facilite l’organisation du transport et du recrutement des travailleurs. L’effectif des étrangers double ainsi entre 1946 et 1999, en dépit des restrictions posées en 1974 par Valéry Giscard d’Estaing avec la fermeture des frontières.

Aujourd’hui, des pans entiers de l’économie vivent grâce au travail des immigrés. Prétendre qu’ils représentent une charge et refuser de les accueillir revient à nier une partie importante de l’histoire de la société française, pourtant si riche par sa diversité.

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