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Des foyers où il est question d’amour

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A Lyon, l’association Adelaïde Perrin – Les établissements Sainte Marie Rhône a inscrit la vie affective, amoureuse et sexuelle des personnes en situation de handicap psychique et mental au cœur de son ADN. Une histoire vieille de vingt ans.

Dès leur arrivée au sein des foyers d’Adelaïde Perrin, professionnels, résidents et proches sont prévenus : la vie affective et sexuelle est un enjeu incontournable de l’accompagnement. Résultat : « Nous avons des foyers où les personnes sont quasiment toutes en couple », raconte le chef de service Franck Romanet. Tout a commencé deux ans avant la loi de 2002-2 rénovant l’action sociale et médico-sociale, lorsque l’association a choisi de ne plus considérer ses quelque 200 résidents « comme des objets de soins mais comme des personnes aptes à être actrices de leur vie, se souvient-il. Il n’était plus envisageable, alors, de leur nier la possibilité d’avoir une vie affective et sexuelle. Il s’agit du premier élément à prendre en compte quand on accompagne un être humain. »

L’organisation, au lourd passé religieux, s’est alors lancée dans une profonde déconstruction. L’objectif ? Remettre les personnes au cœur du dispositif. Ce qui suppose de considérer que le médecin psychiatre ne soit plus le seul décideur. « La personne était invitée avec tous les professionnels à exposer qui elle était, d’où elle venait et ce qu’elle voulait faire, détaille Franck Romanet. Tout le monde a alors pu découvrir ses attentes, ses envies, ses besoins, ses difficultés… » Plusieurs notions ont ainsi émergé, telle celle du « projet individuel d’accompagnement » associé à l’idée de « prestations ». Sont venues s’y ajouter des transformations structurelles, comme la fin des dortoirs. « Nous avons réalisé des travaux afin que les résidents puissent avoir leur espace personnel et inviter chez eux », ajoute le chef de service. Et au-delà d’entretiens spécifiques, où il s’agissait d’abord « d’oser parler » de ces questions amoureuses, des groupes de parole se sont très rapidement mis en place.

Vingt ans plus tard, c’est toujours sur cette base qu’Adélaïde Perrin conçoit son accueil. Les entretiens se sont étoffés, les groupes perdurent… Mais l’association reste vigilante. « Le risque est que la vie sexuelle et affective ne puisse se nommer qu’à l’intérieur de ces groupes », souligne Anne-Sophie Pechery, qui a désormais pris la responsabilité de ces questions au sein de l’association. La parole y est confidentielle, respectueuse et les résidents ne partagent pas leurs propres expériences sexuelles. « Nous travaillons beaucoup sur les notions de “consentement”, de “choix”, de “rapport privé/public” », explique-t-elle. « Ils peuvent s’appuyer les uns sur les autres. Les éducateurs sont surtout des tremplins pour la parole », renchérit Franck Romanet.

« Des couples qui se font et se défont »

Les professionnels, pour leur part, bénéficient depuis de nombreuses années d’actions de sensibilisation. « La formation est l’une de nos priorités, assure Anne-Sophie Pechery. Car les équipes changent et les représentations aussi doivent évoluer. Nous voulons que les repères institutionnels soient au centre. Il faut que ces problématiques soient discutées le plus facilement possible, au quotidien, dans tous les foyers. Il reste, par exemple, de vrais sujets à interroger. Comme la vie affective des personnes vieillissantes ou ce qui peut se jouer lors de l’accompagnement des actes de proximité, la question du genre et de l’homosexualité… » D’autant que certaines situations peuvent en parallèle inquiéter les équipes. « Nous avons des couples qui se font et se défont. Quand l’histoire devient plus difficile, il est aussi de notre rôle de rappeler que cela fait partie de la vie. Il faut aider le résident à se penser dans cette séparation. »

Autre enjeu : l’entourage. « C’est un sujet qui reste difficile pour les parents, constate Anne-Sophie Pechery. Les familles savent dès l’admission que nous accompagnons des couples mais tous ne l’entendent pas. Ils le découvrent quand leur enfant commence une histoire. » Il s’agit alors pour les équipes de conserver la place centrale du résident. « Nous n’allons pas parler aux parents sans qu’il soit présent, par exemple. Et nous allons discuter en amont avec lui, pour l’aider à penser sa place d’adulte, décider de ce que lui-même veut partager ou pas. » Pour Franck Romanet, « le sujet de la vie affective et sexuelle est toujours en mouvement ». De nouveaux chantiers sont en cours, en lien notamment avec une circulaire de 2021 de la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées : nomination de référents et formalisation des procédures liées aux abus sexuels. Les groupes de parole pourraient également évoluer pour permettre aux résidents de les co-animer.

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