Traditionnellement, on présente le secret professionnel comme un concept juridique. En effet, des textes de loi épars soumettent certains professionnels au secret, mais celui-ci peut aussi résulter d’un état (le prêtre) ou d’une mission (l’éducateur de l’aide sociale à l’enfance [ASE]). Curieusement, hors Alsace et Moselle, où s’appliquent encore des bribes de droit allemand, les ministres du culte ne sont pas des professionnels à proprement parler. Pourtant, la jurisprudence admet qu’ils soient astreints au même secret, dans la limite de la confession.
Qu’en est-il pour les travailleurs sociaux ? Notre dossier se propose de définir la notion de secret professionnel, de présenter le périmètre et les conditions de mise en œuvre du secret partagé ainsi que les limites au secret.
S’agissant des travailleurs sociaux, il faut distinguer les assistants de service social (que nous désignerons ici par assistantes sociales [AS], tant les femmes y sont majoritaires) des autres travailleurs sociaux. Les AS sont astreintes au secret par profession, peu importe la nature et la qualité de leur employeur. L’article L. 411-3 du code de l’action sociale et des familles (CASF) dispose en effet que : « Les assistants de service social et les étudiants des écoles se préparant à l’exercice de cette profession sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les réserves énoncées aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
La communication par ces personnes à l’autorité judiciaire ou aux services administratifs chargés de la protection de l’enfance, en vue de ladite protection, d’indications concernant des mineurs dont la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation sont compromises n’expose pas, de ce fait, les intéressés aux peines fixées par l’article 226-13 du code pénal. »
Cet article renvoie au code pénal (CP), qui sanctionne la violation du secret professionnel : « La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie de 1 an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende » CP, art. 226-13).
Il n’existe pas de travail social sans partage d’informations, cela ne signifie pas que tout est permis, et que l’on peut mépriser le principe du secret professionnel. Le violer est aussi une faute professionnelle, et à défaut de se retrouver devant le tribunal correctionnel ou en prison, c’est surtout la sanction disciplinaire, allant jusqu’au licenciement, que l’on peut encourir.
Si le législateur a voulu que les assistantes sociales, et d’autres travailleurs sociaux dans le cadre de leur mission (aide sociale à l’enfance, protection maternelle infantile, agents de la sécurité sociale, ceux traitant le revenu de solidarité active…), soient astreintes au secret professionnel, c’est parce que se confier à l’un d’eux est un peu comme « se déshabiller devant son médecin ». En outre, si le secret sert avant tout à protéger l’usager, il est aussi indispensable à l’exercice de certaines professions, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 8 avril 1998 concernant un médecin, mais transposable à un travailleur social : « L’obligation au secret professionnel, établie et sanctionnée par l’article 226-13 du code pénal pour assurer la confiance nécessaire à l’exercice de certaines professions ou de certaines fonctions s’impose aux médecins, hormis les cas où la loi en dispose autrement, comme un devoir de leur état ; sous cette seule réserve, elle est générale et absolue et il n’appartient à personne de les en affranchir » (Cass. crim., 8 avril 1998, n° 97-83656).
Cet arrêt de 1998 rappelle aussi que personne ne peut affranchir un professionnel de son obligation de secret, qu’il s’agisse de l’usager lui-même, de son employeur, ou même d’un policier ou d’un juge :
« Toute personne citée pour être entendue comme témoin est tenue de comparaître, de prêter serment et de déposer sous réserve des dispositions des articles 226-13 et 226-14 du code pénal » (code de procédure pénal [CPP], art. 109, al. 1er).
Dans un même ordre d’idées, on relèvera la condamnation pour violation du secret professionnel d’un médecin qui avait déposé plainte contre un patient qui le menaçait, situation qui peut concerner un travailleur social. Motif de la condamnation : au lieu de s’en tenir aux faits, il a relaté dans sa plainte des éléments supplémentaires relevant du secret médical, donc professionnel.
Le secret professionnel n’est pas seulement une question juridique, en particulier pour les travailleurs sociaux qui doivent parfois faire montre de détermination pour le faire respecter. Autant le secret médical est parfaitement ancré dans les esprits, autant c’est bien moins vrai du secret professionnel des travailleurs sociaux. Par exemple, l’invoquer pour refuser de témoigner ou de déposer peut être ressenti par un officier de police ou un magistrat comme une entrave à l’enquête ou à la justice. Si le travailleur social est fonctionnaire, son interlocuteur peut tenter de lui opposer l’article 40, alinéa 2 du code de procédure pénale, qui dispose que : « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
Cet article ne transforme pas tous les fonctionnaires en délateurs, et ne met pas fin à toute obligation de secret professionnel. Mais trouver son chemin entre différents textes parfois contradictoires n’est pas chose aisée, et on est souvent amené à choisir entre plusieurs options dont chacune comporte un risque, celui de trop parler ou celui de se taire. En outre, il ne faut jamais oublier que le droit est le royaume de l’interprétation, d’où il résulte un considérable aléa judiciaire.
Pour un travailleur social, le secret professionnel est une prérogative qu’il doit faire respecter par tous ses interlocuteurs, hiérarchie comprise. Pourtant, il ne faut pas que le secret se retourne contre celui qu’il est censé protéger, qu’il devienne un étendard presque idéologique. On peut comprendre qu’une entreprise soit préoccupée par les risques psycho-sociaux, a fortiori de suicide. Mais de là à transformer l’assistante sociale du travail en « télégraphiste » de la direction, il y a un pas qui ne doit pas être franchi.
Il convient de distinguer le secret professionnel de l’obligation de confidentialité à laquelle est astreint tout salarié ou stagiaire d’un établissement ou d’un service social, en sus d’éventuelles règles propres à chaque profession réglementée :
« L’exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, lui sont assurés : […] 4° La confidentialité des informations la concernant ; […] » (CASF, art. L. 311-3).
Il n’y a pas de définition claire de l’obligation de confidentialité. Certains considèrent qu’elle englobe le respect de la vie privée, la discrétion et le secret professionnel. C’est une analyse factuellement légitime dans la relation du professionnel à l’usager. Le juriste sera tenté de rétorquer que seule la violation du secret professionnel est passible de sanctions pénales. En pratique, si l’on considère qu’aucun travailleur social n’a jusqu’alors été condamné pénalement pour violation du secret professionnel, le premier risque, tant pour l’assistante sociale (secret) que pour la secrétaire d’un établissement social (confidentialité) est la sanction disciplinaire.
S’agissant de la définition d’un secret, ou plus exactement d’une information à caractère secret, elle n’existe pas à l’égard des travailleurs sociaux, mais on peut leur transposer celle s’appliquant aux médecins, le social étant souvent lié au médico-social :
« Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris » (code de la santé publique [CSP], art. R. 4127-4, al. 2).
Par ailleurs, la jurisprudence considère qu’une information a priori anodine et banale prend le caractère de secret dès lors qu’elle est confiée à un professionnel qui y est astreint (Cass. crim., 7 mars 1957).
Comme déjà indiqué, travail social rime avec partage d’informations, lesquelles sont toutes à caractère secret lorsqu’elles sont confiées à un professionnel qui y est astreint. Néanmoins, comme on ne peut partager n’importe quoi avec n’importe qui, il est important de connaître le périmètre et les conditions de mise en œuvre dudit partage.
Dans certaines hypothèses, la loi organise le partage. C’est le cas dans les deux domaines essentiels que sont la protection de l’enfance et l’hôpital, ou plus largement les établissements sanitaires, même dans leurs relations avec des intervenants externes à l’hôpital. Ailleurs, il ne devrait en principe pas y avoir de partage, puisque la loi ne le prévoit pas. La réalité est néanmoins bien plus nuancée.
Les travailleurs sociaux apportant leur concours à la protection de l’enfance sont tous potentiellement concernés par l’article L. 226-2-2 du CASF, qui autorise un partage d’information entre les professionnels « strictement » cantonné aux besoins de la mission poursuivie :
« Par exception à l’article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfance définie à l’article L. 112-3 ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d’évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d’aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à l’accomplissement de la mission de protection de l’enfance. Le père, la mère, toute autre personne exerçant l’autorité parentale, le tuteur, l’enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l’intérêt de l’enfant. »
Ce « secret partagé » est fort utile, notamment avant de prendre une décision potentiellement lourde de conséquences, comme une information préoccupante ou un signalement. Il permet en quelque sorte de faire une pré-évaluation informelle.
La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a étendu le partage d’informations entre les intervenants sanitaires, médico-sociaux et sociaux, entérinant une pratique généralisée et indispensable à la prise en charge globale du patient, en particulier à l’issue de son hospitalisation. Cela ne concerne donc pas exclusivement des travailleurs sociaux hospitaliers : « Un professionnel peut échanger avec un ou plusieurs professionnels identifiés des informations relatives à une même personne prise en charge, à condition qu’ils participent tous à sa prise en charge et que ces informations soient strictement nécessaires à la coordination ou à la continuité des soins, à la prévention ou à son suivi médico-social et social » (CSP, art. L. 1110-4).
Le législateur a créé l’« équipe de soins » (CSP, art. L. 1110-12) et un mécanisme de partage complexe, difficile à comprendre et à appliquer. Devant la perplexité générale, un arrêté rassurant fut pris :
« Elle [l’équipe de soins] n’implique pas une modification des pratiques professionnelles. Elle a au contraire vocation à être suffisamment souple pour permettre l’échange et le partage des données de santé dans le respect des droits des personnes concernées, entre des professionnels agissant au bénéfice d’une même personne, ne relevant pas uniquement du secteur sanitaire et pouvant intervenir en dehors des murs de l’hôpital » (arrêté du 25 novembre 2016).
Schématiquement, l’équipe de soins se compose de deux catégories : les professionnels de santé et les autres, dont les assistants de service social. Un patient est censé être informé qu’en se confiant à un membre de la première catégorie (médecin, infirmier…), il se confie à tous les autres qui participent à sa prise en charge sanitaire, sauf s’il s’y oppose. Mais si des professionnels de catégories différentes doivent partager des informations (ex. : un médecin et une assistante sociale dans ou à l’extérieur de l’établissement), il faut recueillir par écrit le consentement éclairé du patient, préalablement informé des motifs et modalités du partage, à condition qu’il soit en état d’y consentir, sans quoi on agira si tel est son intérêt. A cela s’ajoute le règlement général européen sur la protection des données (RGPD), qui en matière de prise en charge sanitaire ou sociale n’impose pas de consentement formel, mais exige une large information préalable des personnes. Il s’applique par conséquent au sein de tout service social, hors cadre sanitaire.
Peut-on considérer que lorsque le partage du secret n’est pas prévu par la loi, chaque professionnel doit soigneusement garder pour lui toute information confidentielle ? Dans l’absolu et surtout dans l’absurde, le secret individuel et susceptible d’aucun partage rendrait tout travail d’équipe impossible.
Afin de rassurer les professionnels et de les conforter dans leurs pratiques, une lettre-circulaire du 21 juin 1996 leur avait donné une sorte de mode d’emploi du secret partagé. Une circulaire n’est certes pas un décret et encore moins une loi. Elle ne crée pas de droits, mais en l’espèce, elle entérine une pratique généralisée en s’efforçant de l’encadrer quelque peu.
« […] Il convient, dans cette hypothèse, de ne transmettre que les éléments nécessaires, de s’assurer que l’usager concerné est d’accord pour cette transmission ou tout au moins qu’il en a été informé ainsi que des éventuelles conséquences que pourra avoir cette transmission d’informations et de s’assurer que les personnes à qui cette transmission est faite sont soumises au secret professionnel et ont vraiment besoin, dans l’intérêt de l’usager, de ces informations.
Le professionnel décidant de l’opportunité de partager un secret devra également s’assurer que les conditions de cette transmission (lieu, modalités) présentent toutes les garanties de discrétion » (lettre-circulaire Santé-Justice du 21 juin 1996).
L’intérêt de l’usager est un critère essentiel, celui qui justifie qu’on puisse (selon la circulaire) se passer de son autorisation (et donc violer la loi). Finalement, cette circulaire n’est pas si éloignée de ce que prévoiront 20 ans en plus tard la loi « santé », puis le RGPD : en matière sanitaire et/ou sociale, on informe et on transmet (donc on partage) ce qui est strictement nécessaire, sauf opposition de l’usager. Dans l’absolu, appliquer la circulaire dans des hypothèses où le partage n’est pas prévu par la loi revient à prendre un risque juridique. En pratique, rappelons qu’aucun travailleur social n’a été condamné pénalement pour violation du secret professionnel, alors qu’on peut être amené à communiquer des informations confidentielles à un partenaire non astreint au secret, dans l’intérêt de l’usager. Pour éviter tout risque, la solution peut consister, lorsque les circonstances s’y prêtent, à ce que ce soit l’usager qui transmette les informations, et non le travailleur social.
Dans certaines hypothèses, le professionnel astreint au secret est autorisé à le lever, alors que dans d’autres, il y est contraint, ce qui prend souvent la forme d’un signalement. Dans des domaines aussi sensibles que la protection de l’enfance ou les violences faites aux femmes, la réponse institutionnelle est souvent aléatoire. Combien d’« informations préoccupantes » ou de plaintes pour violences conjugales n’ont pas reçu de suite ?
Il y a quelques années, un enfant est décédé dans une machine à laver où l’avaient fait tourner ses parents. Préalablement, deux informations préoccupantes et un signalement au procureur étaient restés sans réponse effective. Inversement, certaines personnes n’hésitent pas à solder les comptes de leur rupture conjugale sur le dos de leurs enfants, allant jusqu’à inventer des maltraitances dont leur ex-conjoint serait l’auteur pour mettre fin à ses relations avec leur progéniture. Or, parfois, la machine judiciaire peut se déclencher sur un claquement de doigts, comme l’« affaire d’Outreau » en avait donné une dramatique illustration à la fin des années 1990, broyant des innocents sur le fondement de mensonges proférés par des enfants manipulés.
Prévenir et traiter toutes formes de danger pesant sur des mineurs est une priorité des pouvoirs publics. A cet effet, le législateur a instauré en 2007 un mécanisme dérogatoire tant au secret professionnel qu’au régime général des signalements. Ce régime vise à informer les services du conseil départemental dont dépend l’ASE en cas de « risque de danger » (nous dirons de « danger potentiel ») et le procureur de la République en cas de danger avéré. Cette dualité information préoccupante/signalement est inscrite dans le code de l’action sociale et de familles, lequel ne prévoit pas de sanction pénale en cas de non-respect de ces obligations. En revanche, ne pas signaler au parquet un danger sur un mineur peut porter violation d’autres dispositions légales, cette fois visées au code pénal, comme la non-assistance à personne en péril.
Une autre différence entre le régime des informations préoccupantes et signalements du CASF (art. L. 226-2-1 et L. 226-4) et les obligations du code pénal réside dans le fait que le professionnel n’a jamais le choix dès lors que le danger pèse sur un mineur : émettre une information préoccupante en cas de danger potentiel ou un signalement en cas de danger avéré est une obligation et non une option à la charge de chaque professionnel et non de l’institution qui l’embauche. Cela n’interdit pas des concertations avant décision, mais il se saurait y avoir de blocage ou d’entrave hiérarchique.
Le code pénal réprime la violation du secret professionnel et dresse une liste d’exceptions, dont la première vise « les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret ». Il s’agit notamment des informations préoccupantes et signalements propres à la protection de l’enfance, évoqués ci-dessus : « L’article 226-13 n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n’est pas applicable :
• à celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ; […]
• aux professionnels de la santé ou de l’action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu’elles détiennent une arme ou qu’elles ont manifesté leur intention d’en acquérir une ; […].
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s’il est établi qu’il n’a pas agi de bonne foi » (CP, art. 226-14).
Ainsi, un travailleur social ayant connaissance de certaines formes de maltraitance sur une personne vulnérable, a fortiori mineure, ne doit pas être découragé de les signaler par peur de sanctions pénales ou disciplinaires. Une sanction hiérarchique à son égard serait abusive, sauf mauvaise foi caractérisée.
D’autres dispositions du code pénal établissent une différence selon que l’on est ou non astreint au secret professionnel. Ainsi, les articles 434-3 et 434-1 punissent sévèrement le défaut de signalement, sauf à l’égard du professionnel astreint au secret, auquel lesdits articles laissent le choix. Par exemple, si une femme manifestement battue ou violée (un crime) refuse de déposer plainte et demande à une assistante sociale de ne rien signaler, cette dernière a le choix de garder le silence, sauf si des mineurs sont touchés ou s’il existe un péril évident ou un risque imminent pour l’intégrité physique de la personne (CP, art. 223-6).
Révéler un délit n’est pas la même chose que dénoncer des dysfonctionnements organisationnels, un encadrement tatillon, voire des conditions de travail qui, sans être nécessairement illégales, n’en sont pas pour autant acceptables. La situation de certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou hôpitaux a été largement relayée par la presse, même si les réalités ne sont pas comparables.
Tout salarié, même du secteur public, est, à un titre ou à un autre, astreint à une forme d’obligation de discrétion, de réserve, de loyauté et de probité à l’égard de son employeur. De même, on ne se livre pas à de la diffamation, un délit qui peut être constitué même si les personnes ou institutions ne sont pas nommées (mais seulement identifiables), voire si les faits sont avérés.
Le lanceur d’alerte(1) peut s’abriter derrière l’anonymat, mais là aussi la prudence s’impose, car il peut y avoir enquête pour identifier l’auteur des révélations, et levée de l’anonymat sur Internet.
Dénoncer la maltraitance dans un établissement médico-social est d’une autre nature. D’ailleurs, l’article L. 313-24 du code de l’action sociale et des familles instaure une immunité disciplinaire dans cette hypothèse.